Eglises d'Asie

La dernière édition du quotidien hong-kongais pro-démocratie Apple Daily publiée ce jeudi

Publié le 25/06/2021




Le 24 juin, la dernière édition du quotidien hong-kongais pro-démocratie Apple Daily a été publiée à près d’un million d’exemplaires, dans une ville de 7,5 millions habitants. Dans le cadre de la nouvelle loi sur la sécurité nationale à Hong-Kong, entrée en vigueur l’an dernier, cinq responsables du journal ont été arrêtés et l’ensemble de ses actifs ont été gelés par les autorités. Le groupe médiatique a donc décidé de publier sa dernière édition ce jeudi, après 26 ans de publication. « La liberté de la presse a été victime de la tyrannie », a dénoncé Chan Pui-man, éditeur en chef adjoint du journal.

De nombreux Hong-Kongais ont fait la queue, le 24 juin, pour pouvoir acheter la dernière édition du quotidien pro-démocratie Apple Daily.

La dernière édition du quotidien hong-kongais pro-démocratie Apple Daily est parue ce jeudi 24 juin. Le journal a été forcé de fermer dans le cadre de la nouvelle loi sur la sécurité nationale, mettant fin à 26 ans d’édition pour un média ouvertement critique envers Pékin et l’autoritarisme chinois. La mort soudaine de ce quotidien populaire est un nouveau coup dur pour les libertés à Hong-Kong, alors que la Chine cherche à faire taire toute dissidence. Ce jeudi, des queues se sont formées à travers la ville, alors que de nombreux habitants ont cherché à se procurer la dernière édition de l’Apple Daily, publiée à près d’un million d’exemplaires. Beaucoup de vendeurs, qui ont été à cours de stock en seulement quelques minutes, ont demandé de nouvelles livraisons. La dernière « une » du journal affiche les journalistes du quotidien, saluant la foule devant le siège.

« Apple Daily est mort », a écrit Chan Pui-man, éditeur en chef adjoint du journal, arrêté la semaine dernière sous le coup de la même loi, dans une lettre adressée aux lecteurs. « La liberté de la presse a été victime de la tyrannie », a-t-il dénoncé. Dans le quartier populaire de Mongkok, plusieurs centaines d’habitants ont patienté dès l’aube pour pouvoir trouver une copie de la dernière édition. « C’est vraiment choquant », souffle Candy, une Hong-kongaise âgée de 30 ans. « En seulement deux semaines, les autorités ont pu utiliser cette loi sur la sécurité nationale pour démanteler une entreprise cotée. » Le quotidien le plus populaire de la ville a été une épine dans le pied pour Pékin depuis longtemps, avec son soutien affiché au mouvement pro-démocratie et sa ligne ouvertement critique envers les dirigeants chinois. Ces mêmes dirigeants ont utilisé la nouvelle loi pour accélérer la fin du journal.

Le propriétaire catholique du quotidien, Jimmy Lai, actuellement en prison pour avoir participé à des manifestations pro-démocratie, a fait partie des premiers à subir les conséquences de la nouvelle loi, entrée en vigueur l’an dernier. Mais une nouvelle page a été tournée la semaine dernière, quand les autorités ont utilisé la loi pour s’attaquer au journal, arrêter cinq dirigeants du quotidien et en geler l’ensemble de ses actifs. Cette dernière mesure a empêché le journal d’agir et de payer son personnel ; c’est pourquoi le groupe médiatique a décidé que l’édition du 24 juin serait la dernière. Dans la nuit de mercredi à jeudi, le quotidien a fermé son site web et ses comptes Twitter et Facebook. Près de mille personnes, dont 700 journalistes, sont désormais sans travail. « Les Hong-kongais ont perdu un média qui osait élever la voix et qui insistait pour défendre la vérité », ont déclaré huit associations journalistiques locales, dans un communiqué conjoint appelant leurs collègues à s’habiller en noir.

Hong-Kong classée 80e sur 180 par le classement annuel de Reporters sans Frontières

La Chine a imposé sa loi sur la sécurité nationale à Hong-Kong l’an dernier, après les nombreuses manifestations massives pro-démocratie, parfois violentes, qui ont secoué la ville en 2019. L’attaque contre l’Apple Daily a été déclenchée notamment à cause d’articles et de chroniques soutenant les sanctions internationales contre la Chine, une position désormais considérée comme illégale. Jimmy Lai, Ryan Law (rédacteur en chef du journal) et Cheung Kim-hung, directeur général, tous été accusés de « collusion avec des forces étrangères » en menaçant la sécurité nationale chinoise, ont été placés en détention provisoire. Le 23 juin, Yeung Ching-kee, l’un des principaux chroniqueurs du journal, a également été arrêté pour les mêmes raisons. La décision de geler les actifs du journal a également mis en évidence l’étendue du pouvoir désormais entre les mains des autorités, capables de poursuivre n’importe quelle société susceptible de représenter une menace pour la sécurité nationale.

De nombreuses multinationales ont des sièges régionaux à Hong-Kong, attirées par un climat favorable aux investissements. Mais beaucoup d’entreprises locales et internationales commencent à remettre en question leur avenir dans la région. Hong-Kong s’est retrouvée à la 80e place du classement annuel de Reporters sans Frontières sur la liberté de la presse (une chute depuis la 18e place en 2002). De son côté, la Chine est au 177e rang sur 180, devant le Turkménistan, la Corée du Nord et l’Erythrée. La Chine et les autorités hong-kongaises ont défendu la loi sur la sécurité nationale en affirmant qu’elle a permis de rétablir l’ordre avec succès après les manifestations de 2019. À l’origine, les autorités avaient prétendu que la loi ne viserait qu’une « petite minorité », mais elle a radicalement transformé le contexte politique et juridique, alors que la Chine avait garanti de respecter les libertés et l’autonomie à Hong-Kong après sa rétrocession à Pékin par la Grande-Bretagne en 1997.

(Avec Ucanews)

Crédits Pakkin Leung