Eglises d'Asie

Un groupe d’aide juridique publie une enquête sur les difficultés d’accès à la justice pour les minorités

Publié le 27/10/2021




Le 20 octobre à Islamabad, le groupe LAS (Legal Aid Society) a publié les résultats d’une enquête sur les difficultés d’accès à la justice pour les minorités religieuses. Selon le groupe LAS, qui a mené son enquête durant près de six mois auprès de 324 personnes, dont des hindous, des chrétiens et des sikhs de la province de Sindh, explique que « les répondants ont évoqué la pauvreté, et non la discrimination religieuse, comme leur problème majeur » : « Ils ont cité le manque d’opportunités, la corruption et l’incompétence administrative comme les principales causes de leur situation. »

Une équipe du groupe d’aide juridique LAS (Legal Aid Society) interroge un pandit hindou au temple de Sadhu Bela, à Sukkur dans la province de Sindh.

Le manque d’assistance et les coûts élevés sont les principales barrières qui freinent l’accès à la justice pakistanaise pour les minorités religieuses, selon une enquête menée par le groupe LAS (Legal Aid Society). « Les minorités religieuses sont moins confiantes à l’idée de pouvoir bénéficier d’un procès équitable, comparé à leurs compatriotes musulmans. Avant tout, ils se considèrent comme peu influents et peu puissants ; d’où la difficulté d’accéder aux protections juridiques nécessaires et à leur portée, et le fait qu’ils soient peu considérés par la loi pakistanaise. Par conséquent, ils osent rarement s’approcher du système juridique pour réclamer justice », conclut l’enquête menée par LAS, publiée le 20 octobre à Islamabad.

« Les répondants ont évoqué à de nombreuses reprises la pauvreté, et non la discrimination religieuse, comme leur problème principal. Ils ont identifié leur statut de minorité comme une cause aggravante de leur pauvreté. Par ailleurs, ils ont cité le manque d’opportunités, la corruption et l’incompétence administrative comme les principales causes de leur situation », poursuit le groupe juridique. « Ces problèmes résultent directement de leurs conditions précaires. La discrimination structurelle, et notamment l’absence d’opportunités d’embauche, piège ces communautés dans un cercle vicieux. La majorité de nos répondants a fini par croire que ce pays est pour les musulmans, ainsi que la loi. La discrimination rencontrée par ces communautés n’est pas seulement externe, elle aussi renforcée par le système de castes et par leur disparité socio-économique. »

« C’est le devoir de l’État de corriger les choses »

L’enquête menée par LAS, qui a duré six mois, a été achevée en mai dernier, avec 324 personnes interrogées, dont des hindous, des chrétiens et des sikhs issus de huit districts de la province de Sindh. Selon Dawer Hameed, un chercheur du groupe juridique, on estime qu’il s’agit de la première initiative de ce genre entreprise au Pakistan. « Les minorités religieuses pakistanaises rencontrent de nombreux problèmes sociaux et juridiques. Le lancement de cette enquête cherche à rassembler les acteurs et les parties prenantes du système juridique afin de parler des barrières auxquelles font face les minorités, les empêchant d’accéder à la justice, et d’envisager des réformes possibles pour alléger ces barrières », explique Dawer Hameed. « Si les minorités sentent que leurs droits ne sont pas respectés, c’est alors le devoir de l’État de corriger les choses. » Dans le cadre de son projet, LAS a déjà apporté une aide juridique à 150 personnes appartenant aux minorités pakistanaises.

Près de 25 % des répondants à l’enquête sont des femmes, qui rencontrent un nombre de problèmes sensiblement plus important, concernant leur droit à la consommation, à la propriété, au logement et à l’emploi, ainsi que leurs droits familiaux et leur accès aux services publics. Pour le groupe, les tribunaux sont déjà considérés comme chers et inaccessibles, et les femmes rencontrent des barrières supplémentaires, d’autant plus que le nombre de femmes reste limité au sein du personnel juridique. « Les lois concernant le divorce et la dissolution sont également ambiguës, et beaucoup de femmes issues de communautés non-musulmanes expliquent comment les hommes de leurs communautés bénéficient de davantage de droits », assure LAS.

Le gouvernement et l’Église locale négocient depuis des décennies en vue d’une réforme des lois concernant les conflits conjugaux chrétiens, couvertes par la loi de 1872 sur le mariage chrétien et par celle de 1869 sur le divorce chrétien. Ainsi, un mariage non-musulman peut être dissout si l’un des deux conjoints se convertit à l’islam. En février, le gouvernement a finalisé l’ébauche d’un nouveau projet de loi afin de répondre à une demande de longue date de la part de la minorité chrétienne. Kashif Aslam, coordinateur national de la Commission nationale Justice et Paix, se réjouit de l’enquête menée par LAS. « Les coûts des avocats varient selon la nature de l’affaire et selon le tribunal. Dans le cas d’une affaire de blasphème qui reste en suspens durant une décennie, les frais peuvent s’élever à 2,5 millions de roupies [12 287 euros]. Les aides juridiques au foyer affecté alourdissent les coûts. Et les femmes ont encore plus de difficultés à accéder à la justice. »

(Avec Ucanews)


CRÉDITS

Ucanews