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Le gouvernement philippin déclare que la baie de Manille est une « zone morte »

Publié le 02/02/2023




Le lundi 30 janvier, le gouvernement philippin a annoncé que la baie de Manille était devenue une « zone morte », c’est-à-dire une zone hypoxique provoquant l’asphyxie de la faune marine, en raison d’une pollution extrême. « Depuis 2000, nous avons enregistré au moins douze marées noires dans la baie de Manille, sans compter la présence de terminaux pétroliers ainsi que les déversements des industries et des cargos », a déclaré Jeoffroy Santos, directeur régional du Département de l’Environnement et des Ressources naturelles.

Une plage couverte de déchets à Baseco, dans la baie de Manille (2014).

Le 30 janvier, le Département des Pêches du gouvernement philippin a annoncé que la baie de Manille était déclarée comme une « zone morte » (c’est-à-dire une zone océanique hypoxique, où le taux d’oxygène est au plus bas, provoquant l’asphyxie de la faune marine) à cause de la pollution extrême. Par conséquent, le Département des Pêches, ainsi que le Département de l’Environnement et des Ressources naturelles, ont demandé aux pêcheurs de cesser leurs activités dans la baie.

« Nous leur avons dit que la baie de Manille est morte. Cela ne sert à rien d’aller là-bas pour pêcher. À cause de la pollution, il n’y a plus de poissons vivants dans ces eaux », a signalé Jeoffroy Santos, directeur régional du Département de l’Environnement et des Ressources naturelles, interrogé par les journalistes.

Les environnementalistes ont testé les eaux de la baie et constaté que la pollution était surtout due à au moins une douzaine de marées noires au cours des dernières années. « Depuis 2000, nous avons enregistré au moins douze marées noires dans la baie de Manille, ce qui a augmenté la quantité de pétrole et de graisses dans l’eau, sans compter la présence de terminaux pétroliers et les déversements des industries et des cargos qui s’amarrent à Manille », a-t-il ajouté.

Le Département des Pêches a mené une étude sur les traces de métaux comme le cuivre, le cadmium et le zinc en surface, et provenant des fonds marins. « Ces minerais couvrent théoriquement toute la surface de la baie, tout comme les déchets plastiques, ce qui réduit la quantité d’oxygène dans l’eau. Le résultat, bien sûr, c’est que les poissons meurent parce qu’ils ont besoin d’oxygène, sans compter le fait que ces minerais sont également dangereux pour les oiseaux », a déclaré Jenny Ortiz, porte-parole du Département des Pêches. Le département a décrit la baie comme un « égout de boue » qu’il faut éviter.

« Je ne peux pas renoncer à la pêche, nous devrons déménager »

Les pêcheurs locaux, toutefois, ont contesté la déclaration des autorités. « La baie de Manille n’est pas morte. Elle est peut-être polluée, mais elle n’est pas morte parce que nous pouvons toujours y attraper du poisson », assure Robert Oredain, 43 ans, qui gagne environ 16 000 pesos par mois (270 euros) et qui affirme que la dernière fois qu’il a pêché dans la baie remonte au 29 janvier.

Un autre pêcheur, Leo Ranieres, explique qu’il prévoit de partir pour une ville de la région de Bicol, au sud de Manille, avec sa famille. « Il n’y a plus d’espoir à Manille maintenant. Je ne pourrai plus vivre si nous ne pouvons plus attraper de poisson ici », confie-t-il. « Je ne peux pas renoncer à la pêche, parce que c’est ce que je connais. Nous devrons déménager. »

Selon les environnementalistes, la pollution de la baie est aussi due à l’extraction des fonds marins, un projet qui a été autorisé par le gouvernement. Pour Peter Castro, de Greenpeace, ceci « a détruit la vie marine encore plus que la pollution de l’eau ». Un biologiste marin explique que ces activités ont causé des panaches de sédiments (soulevés par les machines d’extraction) qui ont affecté la vie aquatique.

En 2021, Joseph Cincua, un chercheur de l’Université des Philippines, a affirmé que le gouvernement n’avait pas rassemblé de données suffisantes pour déterminer l’étendue de ces extractions. Il a également souligné que la majeure partie de la pollution de la baie de Manille était due à des activités humaines basées à terre, comme des déversements de déchets municipaux, industriels et agricoles. Près de 21 % de la pollution organique de la baie vient du bassin fluvial de la Pasig, dont près de 70 % provenant de déchets ménagers.

(Avec Ucanews)