Par le P. Étienne Frécon, MEP
Depuis plus d’un an, notre paroisse a commencé l’expérience du volontariat. Au-delà des questions matérielles, je craignais que la mission soit insuffisante et peu exaltante pour une personne d’une vingtaine d’années qui rêve de conquérir le monde. Il en a été tout autrement.
En prenant la responsabilité de la paroisse, je m’étais posé la question de l’accueil d’un volontaire. J’ai mis du temps à franchir le pas. La population âgée de l’Église taïwanaise, les difficultés de communication à cause d’une langue difficile à maîtriser, la dimension pastorale et religieuse du projet ont été des freins à cet accueil.
L’arrivée d’un jeune Français en propédeutique a créé l’occasion de
cet accueil. Nous avons commencé doucement en l’accueillant
trois jours pendant la semaine.
La mission était simple : à travers différentes activités, il s’agissait de lancer un dynamisme missionnaire dans la paroisse. Nous avons organisé à nouveau des cours de français abandonnés par manque de temps. Nous avons aussi débuté, une fois par semaine, un atelier « gaufres » consistant à préparer et à distribuer gratuitement des gaufres aux enfants et aux parents du jardin d’enfants de la paroisse et aussi aux passants. Enfin, nous avons continué à développer les visites auprès de personnes séropositives dans un centre non chrétien mais sur le territoire paroissial. Le but de toutes ces activités est clair : il s’agit d’ouvrir la paroisse sur l’extérieur et d’offrir les conditions d’une rencontre dans une ville où beaucoup sont victimes de la solitude. Cette première expérience de six mois a été un succès puisqu’elle a commencé à engendrer un dynamisme les jours de semaine, si calmes d’habitude. Elle nous a permis d’accueillir d’avantage de personnes dans nos locaux paroissiaux.
Un succès à plein temps
Malgré la question de savoir si une telle mission peut remplir un emploi du temps hebdomadaire, la paroisse s’est lancée dans l’expérience à plein temps. En relisant cette aventure, j’avoue qu’elle est un succès, car nous avons aujourd’hui deux volontaires.
La présence de volontaires MEP dans une paroisse taïwanaise est un atout pastoral et missionnaire. Le plus visible est le dynamisme, la joie et la nouveauté qu’apportent les volontaires à la mission. La présence de jeunes Français pousse les personnes âgées, ou en quête d’un nouveau souffle, à se remettre en route. Elles sont interpellées par leur choix de consacrer une partie de leur année au service de l’Église et de la mission.
La présence des volontaires permet d’élargir les champs d’action missionnaire. Nous ne souhaitons pas nous contenter d’une vie pastorale et cultuelle. Nous voulons que la paroisse devienne un lieu riche de propositions pour accueillir les personnes chrétiennes et non-chrétiennes, vivre une rencontre interculturelle, trouver un lieu de soutien fraternel ou alors, tout simplement, offrir un lieu où chacun pourra enfin être lui-même sans la pression subie dans son entreprise ou son école.
Après le deuil de la mission idéale, et l’acceptation du projet tel qu’il est, et non tel qu’il devrait être, les volontaires découvrent la joie en s’emparant du défi de la mission chrétienne dans cette grande ville de Taipei.
Le semeur est sorti pour semer
Les activités ont permis de continuer le travail d’ouverture de la paroisse et ont contribué à changer le regard de nos voisins, adeptes de la religion traditionnelle et peu ouverts à l’Église. Elles nous ont permis d’accueillir de plus en plus de non-chrétiens aux cours de français et de cuisine et d’être présents dans des lieux où nous n’étions pas auparavant comme le centre pour les personnes malades du VIH- Sida, un orphelinat, lors de visites auprès des travailleurs migrants et lors de cours de français dans les écoles : « le semeur est sorti poursemer1 ».
Si la présence de volontaires nous demande du temps pour leur permettre de s’insérer et de comprendre les codes et les usages à Taïwan, elle est aussi bénéfique au missionnaire que je suis. En renouant avec les jeunes Français, avec leur foi et leur dynamisme, je crois avoir été en partie redynamisé et stimulé par leur enthousiasme et leur désir de vivre ce service missionnaire.
Un des charismes des MEP est la présence missionnaire auprès des non-chrétiens et la formation des communautés chrétiennes. En relisant cette expérience, chacun à notre place respective, volontaires et prêtres missionnaires, je m’aperçois que c’est bien ce charisme missionnaire que nous avons tous partagé, qui nous a enrichi mutuellement et qui nous a lié pour le service des hommes et des femmes de la paroisse de Zhonghe.
1. Évangile selon Saint Matthieu chapitre 13 versets 1 à 9.