Eglises d'Asie – Vietnam
Les rumeurs qui couraient se sont confirmées : le Parti communiste du Vietnam a accepté la « démission » du président Vo Van Thuong pour des « manquements » non précisés – une décision qui révèle l’étendue de la tourmente politique que traverse le pays. Pour les analystes internationaux, la situation risque d’affecter la confiance des investisseurs étrangers envers le marché vietnamien et la possibilité de dialogue avec les différents partenaires du gouvernement, y compris le Vatican. Des étapes importantes ont été franchies récemment sous le président sortant, dont l’invitation officielle du pape François à venir au Vietnam.
Dans un communiqué publié ce mercredi 20 mars, le gouvernement a accusé le président de violer les règles du Parti, soulignant que ses « manquements ont affecté négativement l’opinion publique, en heurtant la réputation du Parti, de l’État ainsi que la sienne personnellement ». Le Comité central du Parti, un des principaux organes décisionnels au Vietnam, a approuvé la démission du président Thuong à peine plus d’un an après son élection. Le président vietnamien tient un rôle principalement honorifique, mais il est malgré tout l’un des quatre principaux postes politiques du pays d’Asie du Sud-Est.
En janvier 2023, son prédécesseur Nguyen Xuan Phuc avait connu le même sort, en démissionnant « volontairement » à cause de ses « violations et manquements » qu’il aurait commis en tant que Premier ministre entre 2016 et 2021. La réunion du Comité central du Parti a eu lieu le lendemain d’une session extraordinaire de l’Assemblée nationale, au cours de laquelle les législateurs ont confirmé la décision du Parti et lancé un nouveau processus pour sélectionner un successeur.
Inquiétude des investisseurs étrangers
Ces démissions successives au sein du pays à parti unique sont liées à une vaste campagne anti-corruption, appelée « fournaise ardente », et destinée à éradiquer une corruption généralisée. Mais cette campagne est aussi vue comme un moyen de régler des différents internes au Parti. Le président Vo Van Thuong, âgé de 53 ans, démissionne quelques jours après l’annonce de l’arrestation d’un ancien cadre du Parti dans la province de Quang Ngai, dans le centre du Vietnam, en lien avec une affaire présumée de corruption remontant à une décennie.
Par ailleurs, le président sortant était considéré comme proche de Nguyen Phu Trong, secrétaire général du Parti communiste vietnamien – premier homme politique du pays et artisan de la campagne anti-corruption. L’an dernier, l’Assemblée nationale du Vietnam a mis plus d’un mois et demi à nommer un nouveau président. Cette fois-ci, cela devrait se faire plus rapidement, ne serait-ce que pour rassurer les investisseurs étrangers sur la stabilité du pays et de ses principales institutions.
Toutefois, lundi dernier, la bourse de Hô-Chi-Minh-Ville (Saïgon), principal centre financier du pays, a perdu presque 3 % après les annonces de la démission imminente du président par les médias. Les ventes nettes des investisseurs étrangers, lundi et mardi, s’élevaient à près de 80 millions de dollars US selon la société de courtage Mirae Asset Securities. Selon un conseiller commercial basé au Vietnam, le retrait de Vo Van Thuon « pourrait ralentir encore davantage les décisions politiques et administratives, avec l’inquiétude grandissante des cadres du Parti face à la campagne anti-corruption ». Malgré tout, il est peu probable que les principales positions politiques de Hanoï soient affectées.
(Avec Asianews)