Mgr Jean-Baptiste Budes de Guébriant (1860-1935)

Publié le 18/03/2021




Jean-Baptiste de Guébriant est né le 11 décembre 1860 à Paris, paroisse St Thomas d’Aquin, au n°14 de la rue Saint Guillaume. Ses parents sont originaires de St Pol de Léon (Finistère). Il est baptisé en l’église St Thomas d’Aquin et fait sa première communion dans cette même paroisse le 5 mai 1872. Il fait ses études secondaires au Collège Stanislas. Désirant être prêtre, il entre, au mois d’octobre 1881, au séminaire St Sulpice, à Issy-les-Moulineaux, puis aux MEP le 13 septembre 1883. Il est ordonné prêtre le 5 juillet 1885 et part le 11 octobre pour le Setchuen méridional.
Carte Budes de Guébriant

 

Chine (1883-1921)

La carrière apostolique de Mgr. de Guébriant au Sichuan peut se diviser en trois périodes.

La première comprend ses débuts comme jeune missionnaire, avec ses premiers travaux dans le district de Kuin-lin ; sa première prise de contact avec le Kientchang (1886-1898), la seconde,  va de 1898 à 1907 ; elle est plus mouvementée et marquée par de multiples changements de postes ; enfin, en 1907, il retourne au Kientchang où il se dépense pendant dix  ans avec beaucoup de zèle.

Débuts à Kuin-lin

Pour étudier le chinois, on l’envoie dans la petite ville de Tchao-boa-tchen. Il éprouve beaucoup de difficulté, au début, à apprendre cette langue difficile, mais le succès vient cependant et, à la fin de l’année, on lui donne la charge du district de Kuin-lin, qui compte environ 800 chrétiens dispersés dans une vaste paroisse.

Après sept ans de ministère, en 1893, il s’offre à aller travailler dans une partie de la mission plus difficile, le Kientchang. C’est une vaste région où se trouvent quelques 400 chrétiens dispersés, à d’énormes distances, en quinze ou vingt groupes différents. Avec son compagnon, le P. Uzureau, ils veulent entreprendre des voyages pour visiter les chrétiens, mais l’été qui fait fondre la neige des montagnes, les retient trois mois à Lou-kou, en raison des crues. Finalement, au bout d’un an d’apostolat, le P. de Guébriant tombe malade de la fièvre typhoïde. Son confrère le soigne et le malade recouvre la santé. Mais ce confrère finit lui-même par contracter la maladie et expire le 12 août 1894.

Après ce deuil, c’est la persécution… 1895 est pour le Kientchang une année terrible. La guerre sino-japonaise n’épargne pas ce coin reculé de la mission :  des oratoires sont démolis, des écoles et orphelinats fermés, des maisons de chrétiens brûlées, et les missionnaires sont obligés de fuir, pour aller se réfugier à Yunnan-sen. L’orage apaisé, les missionnaires reprennent leur travail, obtenant des résultats encourageants.

En 1898, une décision épiscopale vient enlever le P. de Guébriant à son oeuvre, quand il est nommé provicaire de toute la mission, avec résidence à Yatchéou.

Provicaire de la mission

Cette deuxième partie de sa vie missionnaire va être assez mouvementée. On l’envoie d’abord à Pékin pour traiter de la difficile question des réparations dues à la mission pour le pillage de l’année précédente. Puis il va à Shanghai et jusqu’au Japon, en attendant les résultats des négociations de Pékin, qui s’avèrent d’ailleurs favorables ; le Père retourne à Suifu en 1900. Au début de 1900, il s’établit au Séminaire de Ho-ti-kéou, et passe là quelque temps dans le calme et le réconfort de la communauté du séminaire.

Mais voilà maintenant l’insurrection des Boxers. Son évêque l’envoie à Shanghai, d’où il part pour l’Europe pour accompagner Mgr. Favier, vicaire apostolique de Pékin qui revient au milieu de 1901 à Suifu. Le 14 septembre, Mgr. Chatagnon partant pour Hongkong et la France, confie au Père provicaire l’administration provisoire du vicariat. L’intérim dure 18 mois, au cours desquels il installe le Collège des Pères Maristes et accueille les Franciscaines Missionnaires de Marie.

Après le retour de son évêque, le Père s’installe à Wang-ta-tsoui, au début de 1904. Il réussit à faire jusqu’à 200 baptêmes d’adultes, mais il est loin de jouir du calme; en effet, en 1905, une nouvelle explosion du boxerisme sévit dans la région avec des incursions de brigands. Le Père reçoit alors une nouvelle nomination pour le Kientchang. Il allait pouvoir s’y dévouer sans relâche pendant dix années.

Kientchang

En 1907, il part explorer le pays Lolo. En 1908, il visite cette région plus grande que dix diocèses de France. En 1910, le Kientchang est érigé en mission distincte, et le P. de Guébriant en est nommé le premier vicaire apostolique. Il est sacré le 29 novembre 1910 à Suifu. En 1911, après un rapide voyage en France, il apprend, à son arrivée à Hanoi, le 14 novembre, que le Kientchang est en révolution et que son provicaire, le P. Castanet, a été massacré par les brigands. Arrivé à Nyingiuangfu, il apprend qu’un missionnaire et 25 chrétiens ont été massacrés, plusieurs centaines de fidèles dispersés après avoir été traqués ou pillés. C’est un vrai désastre.

Au cours d’une période d’accalmie, on essaie de réparer les dégâts, mais la grande guerre est déclarée en 1914, et huit missionnaires sur douze sont mobilisés. Toutefois, au bout de quelques mois, sept d’entre eux reviennent à leur ministère. Alors l’horizon s’éclaircit pour le vicaire apostolique, qui compte, en 1915, 6.500 chrétiens dans son vicariat, 77 écoles, un séminaire avec 40 séminaristes. Mgr de Guébriant ordonne son premier prêtre chinois, le P. Damien Tchang ; le nombre des baptêmes de païens s’élève jusqu’à 200.

Canton

Cependant, le 2 avril 1916, il est nommé par Rome vicaire apostolique de Canton. Il quitte Ningiuanfu le 8 janvier 1917.

Il ne reste à Canton qu’à peine 4 ans. Il travaille immédiatement à la division de son immense vicariat, et à la création des vicariats apostoliques de Pakhoi et de Shluchow. Il cède la région de Kong-moon aux pères américains de Maryknoll. Le 22 juillet 1919, le Pape Benoît XV le charge de la visite apostolique des vicariats de Chine. En 1920, il va à Rome prendre part aux travaux d’adaptation du Règlement des MEP au nouveau droit canon. Le 21 mars 1921, à l’Assemblée générale des MEP, il est élu supérieur général. Il arrive à Paris le 9 octobre 1921 pour commencer son supériorat, qui devait durer 14 ans.

Mgr. de Guébriant fut un zélé missionnaire en Chine, un courageux archevêque et un brillant supérieur général.

Supérieur général des MEP (1921-1935)

Dans la période difficile d’adaptation au nouveau droit canon, il négocie habilement à Rome pour que soit préservé le statut de société de prêtres séculiers. En effet, cela permet de travailler à la promotion du clergé indigène, premier but des MEP. Il s’intéresse toujours aux travaux et aux efforts entrepris dans les Missions pour céder au clergé indigène les régions où la foi est déjà solidement implantée.

Il se réjouit de la nomination des premiers évêques chinois, proposés à Rome par d’autres missionnaires. Quant à lui, il a le bonheur de voir en 1927 la division du diocèse de Nagasaki, dont la portion principale est confiée au premier évêque japonais, Mgr. Hayasaka. Puis c’est le tour des Missions du Setchuen en 1929 : trois vicariats indigènes (Chungking, Wanhsien et Yachow). Dans le sud de l’Inde, vient la cession du nouveau diocèse de Kumbakonam en 1930, avec la nomination d’un évêque indien, Mgr. Peter Francis. Au Tonkin, le 11 juin 1933 Mgr. Tong est sacré évêque en la Basilique Vaticane par S.S Pie XI pour Phatdiem. En 1935, enfin, (année de la mort de Mgr. de Guébriant) une nouvelle préfecture apostolique est érigée, détachée du Yunnan, avec comme premier préfet le P. Damien Tchang, qui avait été ordonné prêtre au Kientchang par lui…

Apôtre avant tout, Mgr. de Guébriant cherche d’autres collaborateurs. C’est le cas pour l’île de Hainan, qui est confiée aux Picpuciens ; un territoire taillé dans le vicariat de Yunnanfu est confié aux Pères de Betharam ; au Japon, Hakodate échoit aux Dominicains canadiens. Ce sont ensuite Franciscains et Salésiens qui s’établissent au Japon, et au Siam, les missionnaires suisses de Bethlehem, ceux de Maryknoll, les Oblats de Marie, les Pères Rédemptoristes, les chanoines réguliers du Grand St Bernard, ceux de St Maurice en Valais. Enfin, les Sulpiciens, grâce à la générosité du futur Cardinal Verdier, viennent diriger le grand séminaire de Hanoi, et un peu plus tard celui de Yunnanfu.

Du côté des Frères, il n’obtient que de maigres résultats, mais il réussit à envoyer des religieuses en Asie : les Soeurs de St Vincent de Paul à Saigon et au Japon, les Salésiennes Missionnaires à Pakhoi et Fort Bayard, les Soeurs de Charité de St Anthide Thouret au Laos, les Franciscaines Servantes de Marie de Blois à Salem en Inde, les Franciscaines Missionnaires de Marie à Quinhon, à Kirin, au Tibet, les Chanoinesses de St Augustin en Cochinchine. Toutes ces fondations sont dues aux efforts de Mgr. de Guébriant.

Mais s’il cherche et accueille les collaborateurs du dehors, il ne néglige jamais le recrutement aux MEP. Il s’entoure de propagandistes pour faire connaître les missions d’Asie, et lui-même va souvent faire des conférences dans les séminaires et maisons d’éducation. Il s’intéresse personnellement aux candidats qui désirent entrer aux MEP et correspond souvent avec eux.

Une de ses préoccupations est de répondre à certains articles dans la presse catholique de « missiologues en chambre », selon ses termes, qui méconnaissent l’oeuvre des missionnaires, en particulier pour le développement, la formation et la promotion du clergé indigène.

La spiritualité et la piété de Mgr. de Guébriant est solide et profonde. Il s’inspire beaucoup de St Paul dans ses lectures spirituelles aux aspirants de Paris et de Bièvre et les encourage à devenir des missionnaires zélés dans une simplicité de vie exemplaire. Il dit souvent :

« Chers amis, si j’avais à recommencer aujourd’hui ma vie missionnaire, je le ferai de tout cœur. »

Le dernier voyage de Mgr. de Guébriant, le départ pour l’éternité, est simple et rapide, simple comme sa vie missionnaire durant 50 années au service de l’Église.

Le lundi 4 mars 1935, il rentre de Bretagne à Paris et, se sentant à bout de forces, il s’alite. Dans la nuit du 5 au 6 une hémorragie se produit. À 2 heures du matin, une autre hémorragie est suivie d’une autre à l’aube du 6 mars. Le P. Robert lui donne l’Extrême Onction. Dans la matinée, il reçoit les visites du Cardinal Verdier et de Mgr. Maglicone, nonce apostolique, de Mgr. Boucher, Mgr. Olichon et Mgr. Mério. Vers 10 heures du matin, Mgr. de Guébriant exprime le désir de revoir tous les aspirants, les pères et frères MEP de la maison. Il donne à chacun sa bénédiction, avec un sourire péniblement esquissé. À 3 heures de l’après-midi, il s’éteint paisiblement. Mgr. Maglicone, revenu une deuxième fois pour le voir, récite le Subvenite, l’adieu suprême de la liturgie.

C’était le mercredi des Cendres.

 

D’après les données de l’IRFA

 


CRÉDITS

MEP et IRFA