CEREMONIES ET DEVOTIONS
Au fur et à mesure que s’étend, au cours de XIX° siècle, la renommée des Martyrs largement médiatisée par les Annales de la Propagation de la Foi, les aspirants aux Missions Etrangères se font de plus en plus nombreux, et de plus en plus jeunes. Pour les former et les héberger au cours de leurs années d’étude, il faut agrandir le séminaire de la rue du Bac et acquérir celui de Bièvres. L’enseignement et la spiritualité y sont globalement les mêmes que dans la plupart des séminaires diocésains de l’époque.
Cependant, la vénération croissante pour les Martyrs et les risques réels qu’implique la vocation missionnaire en Asie à cette époque contribuent à développer une dévotion spécifique à la Vierge, figure maternelle et protectrice, souveraine bienveillante et tendre, ultime recours affectif pour ces jeunes hommes qui, s’étant arrachés pour toujours à leur famille, se préparent à une existence hasardeuse et parfois dramatique. L’oratoire de la Vierge, dans le jardin, est, avec la salle des Martyrs, le haut lieu de cette double dévotion particulièrement chère à l’âme sensible de Théophane Vénard :
« Nous nous réunissons en ce lieu chaque samedi soir et la veille des fêtes, après notre souper (…) Puis une voix adresse à Marie, en latin, les invocations écrites au-dessus des différentes entrées de l’oratoire : « Cause de notre joie, Reine des martyrs, Reine des confesseurs, Reine des apôtres, ô Reine conçue sans pêché, Marie, Etoile des mers! » Et tous les aspirants du Séminaire des Missions Etrangères répondent, chantant : Ora pro nobis. On récite Pater, Ave, Memorare, Sub tuum, et on chante quelques hymnes ou antienne à la Sainte Vierge, ou un cantique. Suit la récréation, puis la prière à neuf heures.
Mais en sortant de la chapelle pour rentrer à sa cellule, personne n’oublie d’aller rendre visite aux restes vénérés de ceux dont nous avons chanté Marie Reine. Autour d’une salle dont le parquet est couvert d’un grand et beau tapis, dont les murs sont parsemés d’étoiles et de palmes d’or, sont rangés avec ordre les nombreux reliquaires qui renferment les dépouilles des martyrs de la Chine, les un missionnaires, d’autres indigènes, qui ont pu être soustraites aux persécuteurs. Chacun s’agenouille, prie et se retire silencieux… (Théophane Vénard à sa sœur Mélanie, 17 avril 1851).
La cérémonie la plus spécifique des Missions Etrangères reste cependant celle du départ qui attire un public enthousiaste, mi-curieux, mi-fervent, et impressionne beaucoup les nouveaux arrivants : « J’ai vu plusieurs départs de missionnaires. La cérémonie qui les précède est très touchante. Une allocution est adressée aux missionnaires partants par M. le supérieur, après laquelle tous les assistants vont baiser leurs pieds et recevoir l’accolade fraternelle. Les laïques ne sont pas exclus. Les dames peuvent assister à la cérémonie dans les chapelles, mais, comme vous imaginez bien, elles ne sont pas actrices. » (Th. Vénard à Mme Nepveu-Rousseau, le 25 août 1851).