Depuis que la pandémie de Covid-19 a commencé, il y a plus d’un an, ne craignez-vous pas, Père, malgré sa gravité, de vous rendre dans des hôpitaux. Le risque d’y être contaminé vous préoccupe-t-il ?
Au début de l’année dernière, lorsque je devais me rendre dans un hôpital, j’éprouvais quelque crainte ou appréhension car cette épidémie était nouvelle, personne ne connaissait cette maladie ni ne savait comment la traiter. Alors j’ai pensé que Jésus avait guéri beaucoup de malades, qu’il avait touché des lépreux, qu’il se faisait proche de ceux qui étaient dans le besoin et qu’il les sauvait. Depuis lors, j’ai trouvé, dans le Seigneur Jésus, le courage et la force de ne pas seulement prêter attention à la virulence de l’épidémie, mais surtout de voir les besoins des malades. Je suis un humble instrument de Dieu, j’espère pouvoir apporter, de sa part aux malades, bénédiction et réconfort, guérison et paix.
Qu’est-ce que l’épidémie a changé dans vos visites aux personnes hospitalisées ?
En ces temps-ci, pouvoir se rendre au chevet d’un malade est déjà une grâce, tant pour le malade que pour ses visiteurs, parce que, pendant une épidémie, les visites sont strictement réglementées pour protéger les patients et aussi les personnes qui viennent les rencontrer. Il faut, tout d’abord, présenter une demande de visite à la direction de l’hôpital, puis, si elle est approuvée, observer diverses mesures de prévention de la contagion, ce qui n’est pas facile. Les malades aspirent à recevoir la visite de quelqu’un, et nous désirons beaucoup aller à eux afin de prier pour eux, de les bénir et, en particulier, de leur donner de recevoir le sacrement des malades.
Quelles sont les situations qui vous ont particulièrement marqué ?
Il y en a beaucoup. Je pense en particulier à quelques cas de figure. Il y a des mères qui ont accouché avant terme ou fait une fausse couche, le fœtus est mort, c’est très douloureux et triste pour de jeunes parents, surtout pour les mères. Nous ne pouvons que prier pour le fœtus et ses parents, nous ne pouvons qu’accompagner ceux-ci et prier avec eux, demandant à Dieu de fortifier leur foi et de les réconforter, de leur donner la grâce et la force pour affronter cette épreuve.
Dans ce genre de situation, la présence des religieuses de l’aumônerie est d’un grand secours. Nous voyons souvent ces parents trouver, au sein de leur douleur, une paix et un réconfort.
Dans certaines circonstances, l’hôpital nous permet de visiter un patient, mais, en raison du risque d’infection ou bien parce que seuls les membres de sa famille sont autorisés à entrer dans sa chambre, le médecin nous permet seulement de prier pour lui avec ses proches et de le bénir à distance au moyen d’une liaison audiovisuelle. Bien qu’il ne soit alors pas possible d’être physiquement auprès de lui pour célébrer les sacrements et pour prier, nous croyons que, par ce moyen, la bénédiction, la grâce et la paix de Dieu deviendront réalité pour le malade.
Récemment, s’est présenté un cas particulièrement émouvant : une femme atteinte d’une maladie grave qui, quoique non baptisée, nous avait demandé de prier pour elle. La première fois que nous avons prié avec elle, elle nous a fait part du cheminement de sa vie. Dans son enfance, elle avait étudié dans une école catholique, découvert la Bible et la foi, mais n’avait pas choisi de se faire baptiser. Tout en faisant mémoire du passé et en le confiant à la sœur Cheung et à moi-même, elle était très émue et profondément reconnaissante pour toutes les grâces que Dieu lui avait données, elle regrettait aussi profondément ses fautes passées et de n’avoir pas saisi les occasions que Dieu lui offrait. Par la suite, elle a peu à peu retrouvé confiance, écouté la parole de Dieu et des cantiques, prié avec nous. Finalement, elle a reçu la grâce divine de la foi et elle a reçu le sacrement de baptême. Dès lors, chaque semaine nous priions avec elle et pour elle, nous lui donnions la sainte communion. À une ou deux reprises, son état étant devenu critique, nous lui avons donné le sacrement des malades. Chaque prière et chaque bénédiction lui ont apporté confiance et force pour affronter courageusement les souffrances de sa maladie et, chaque fois, apporté espérance, joie et paix. Cette situation s’est poursuivie pendant trois mois jusqu’à ce qu’elle quitte ce monde paisiblement à la mi-juillet pour s’en aller reposer dans le Seigneur. Tout cela fut, pour elle, une grande grâce et une grande bénédiction de Dieu, mais aussi une bénédiction pour nous qui allions la visiter, car Dieu nous a donné cette grâce d’accompagner, de réconforter et de bénir cette sœur en Christ, loué soit-il !
Nous savons, Père, qu’au début vous hésitiez un peu à vous faire vacciner, mais que, comme dans le cadre de votre travail pastoral, vous devez faire des visites dans les maisons de retraite, vous avez finalement décidé de recevoir les injections. Pourriez-vous nous dire ce qui a soutenu votre décision et comment vous l’avez prise en tant que pasteur ?
Si j’ai tardé à me faire vacciner, c’est parce que je craignais que les injections provoquent des réactions ou des effets secondaires qui affecteraient ma santé. Depuis le mois d’août les hôpitaux exigent que tous les visiteurs soient vaccinés. En raison, d’une part, de cette exigence de l’hôpital et, d’autre part, des nécessités de mon travail pastoral, j’ai finalement décidé de me faire vacciner afin de pouvoir me donner, visiter les malades, servir les personnes qui en ont besoin, conférer les sacrements, accomplir ma mission pastorale. En fait, l’amour du Christ me pousse, et la foi me donne espérance et force, pour devenir de plus en plus comme le Christ, bon Pasteur donnant sa vie pour ses brebis.
Depuis le début de l’épidémie jusqu’à présent, au cours de ses phases, divers règlements administratifs concernant la pastorale des malades sont entrés en vigueur. Quelle est votre opinion au sujet de ces règlements ?
Au cours de cette épidémie plusieurs règlements administratifs ont successivement encadré la pastorale dans les hôpitaux. Au début, je les trouvais très contrariants, très contraignants, et j’éprouvais un sentiment d’impuissance. Pourquoi tant de restrictions, la guérison du cœur et le salut de l’âme ne sont-ils pas plus importants encore ? Plus tard, j’ai compris que les restrictions et règlements de l’hôpital avaient tous pour but le bien des patients et cherchaient à éviter que visiteurs et patients se contaminent mutuellement. Par conséquent, j’ai fini par accepter et considérer positivement les règlements de l’hôpital. Je voudrais, ici, rendre hommage aux membres des unités pastorales catholiques des hôpitaux 1. J’apprécie grandement leur esprit de service. Chaque fois qu’un catholique est admis à l’hôpital, ils font de leur mieux pour demander l’autorisation et faire les arrangements nécessaires pour qu’un prêtre puisse aller le visiter, prier, le bénir et lui administrer les sacrements. Je les en remercie sincèrement et je prie le Seigneur de bénir leur personne et leur ministère.
P. Pierre Lam Minh, MEP
Article paru en chinois dans la revue Hospital pastoral care, en décembre 2021, et traduit en français par P. Xavier Demolliens, MEP.
———————————————————————————————–
- Les Unités pastorales catholiques, présentes dans la plupart des hôpitaux de Hong-Kong, sont les aumôneries chargées de la pastorale des malades. Elles sont reconnues par l’administration hospitalière et coopèrent avec les paroisses proches. Les responsables et les permanents de ces aumôneries sont des laïcs et des religieuses employés par le diocèse.
CRÉDITS
MEP