Eglises d'Asie

Le dalaï-lama se dit prêt à mettre fin à la fonction qu’il représente si tel est le souhait des Tibétains

Publié le 05/05/2010




Lundi 22 février, lors d’une interview accordée à la NPR (National Public Radio) à Los Angeles, le dalaï-lama a déclaré qu’il ne voyait « aucun problème » à mettre fin à sa fonction si les Tibétains le souhaitaient.Tenzin Gyatso, XIVe dalaï-lama, qui effectue en ce moment un voyage aux États-Unis particulièrement peu apprécié par la Chine, laquelle menace de sanctions Washington, …

… a été interviewé le 22 février dernier par Renee Montagne sur la principale radio publique américaine, NPR, après sa rencontre très médiatisée, le 19 février, avec le président Barack Obama à la Maison Blanche.

Après avoir évoqué différents thèmes, comme son combat pour les droits de l’homme, la paix interreligieuse ou encore son choix de la non-violence et d’une « voie moyenne » dans les pourparlers avec Pékin au sujet du Tibet, le dalaï-lama a créé la surprise en déclarant qu’il était prêt à mettre fin à l’institution qu’il représentait et qui existe depuis le XIVe siècle, si les Tibétains préféraient cette solution à un successeur qui serait choisi par le gouvernement chinois. « C’est en fin de compte, je l’ai toujours dit, aux gens de décider si cette institution doit perdurer ou non », a-t-il déclaré. « Si une majorité de Tibétains a le sentiment que l’institution du dalaï-lama n’a plus de sens, alors cette institution doit cesser d’exister, il n’y a aucun problème ».

En 1995, Pékin avait refusé le candidat que le chef spirituel tibétain avait désigné comme étant le nouveau panchen-lama, dont le rôle est décisionnaire pour la reconnaissance des réincarnations du dalaï-lama. Le jeune garçon, Gendhun, avait alors disparu mystérieusement pour être remplacé par un candidat choisi par le gouvernement communiste chinois. Ce dernier, Gyaincain Norbu est présenté aujourd’hui comme le panchen-lama officiel par Pékin, bien qu’il n’ait jamais été accepté par la communauté tibétaine. Il a fait récemment ses premières apparitions en public, confirmant ainsi les craintes du dalaï-lama concernant l’intention de la Chine d’imposer son successeur (1).

Le choix d’un nouveau dalaï-lama répond à des règles précises : la nouvelle réincarnation du chef spirituel doit être recherchée après la mort de celui-ci, par le panchen-lama ainsi que par quelques responsables religieux habilités. L’ actuel dalaï-lama, Tenzin Gyatso, avait été désigné à l’âge de 4 ans, après avoir notamment « reconnu » des objets ayant appartenu au précédent dalaï-lama, un élément indispensable dans le processus d’identification des tulku (maîtres spirituels réincarnés) du bouddhisme tantrique.

Âgé de près de 75 ans aujourd’hui, Tenzin Gyatso vit en exil en Inde depuis 1959, date de sa fuite du Tibet (2). Ces dernières années, il s’est beaucoup exprimé au sujet de sa succession, pour laquelle il a envisagé plusieurs scénarios possibles. Parmi eux, le dalaïlama a évoqué à plusieurs reprises la possibilité, peu fréquente mais prévue par la tradition bouddhique tibétaine, qu’un lama « hautement réalisé » puisse choisir la date et le lieu de sa renaissance, ce qui signifie qu’il pourrait reconnaître sa future réincarnation de son vivant (madhé tulku).

Cette alternative pourrait bien être la plus apte à contrer les projets de Pékin, et ce d’autant plus que le chef spirituel bouddhiste a également souligné que l’institution du dalaï-lama n’existant que pour servir le peuple et le bouddhisme tibétain, les modalités des réincarnations s’adaptaient aux circonstances et à l’histoire du Tibet. Il serait donc logique, a-t-il expliqué, qu’il se réincarne en dehors du Tibet, dans un pays libre, et que sa nouvelle renaissance marque un changement dans la lignée des tulku, en étant peut-être même, une fille (3).