Eglises d'Asie

La paix sera au cœur du prochain déplacement du pape François en Birmanie et au Bangladesh

Publié le 01/09/2017




Lundi 28 août, la Salle de presse du Saint-Siège a officiellement annoncé que le pape François se rendra en Asie cet automne. Pour son 21ème voyage apostolique, le Saint-Père effectuera une visite en Birmanie et au Bangladesh, du 27 novembre au 2 décembre.

Pour son troisième déplacement sur le continent asiatique (1), le pape François a choisi de se rendre en Birmanie, du 27 au 30 novembre, puis au Bangladesh, du 30 novembre au 2 décembre. Deux pays où l’Eglise locale, minoritaire, a récemment accueilli un cardinal pour la première fois de son histoire : le cardinal Charles Bo, archevêque de Rangoun, et le cardinal Patrick D’Rozario, archevêque de Dacca, tous deux élevés au cardinalat par le pape François. Ces nominations et visites constituent un soutien à l’Eglise catholique sur un continent où, hormis le cas philippin, elle est le plus souvent très minoritaire.

L’Inde n’accueillera pas le Saint-Père cette année, alors qu’une visite était pourtant qualifiée de « presque sûre » en octobre 2016. Le dernier pape à s’être rendu en Inde est Jean-Paull II, en 1999. A cette époque, le BJP (Parti du peuple indien – parti nationaliste hindou), était alors au pouvoir et les milieux hindouistes avaient fait savoir leur opposition à la visite du chef de l’Eglise catholique. Ce dernier était venu, selon eux, pour convertir les hindous au christianisme. Le BJP, de retour au pouvoir depuis 2014 et qui multiplie depuis les succès électoraux, n’a donc apparemment pas cette fois-ci facilité la venue du pape en Inde, pays où l’intolérance religieuse est croissante.

En Birmanie, une visite pontificale « historique »

Le pape François se rendra par contre en Birmanie, du 27 au 30 novembre. Cette visite pontificale, qualifiée d’« historique » par le Myanmar Times, constitue le premier déplacement d’un pape dans ce pays. Cela aurait été inenvisageable il y a encore quelques années : le 500ème anniversaire de la première présence catholique n’a été célébré qu’en 2014, et non pas en 2010, car à cette date les restrictions édictées par la junte militaire étaient trop importantes.

Le Vatican et la Birmanie ont récemment renforcé leurs liens, comme l’indiquent l’établissement de relations diplomatiques entre ces deux Etats le 4 mai dernier et la nomination du premier nonce dans le pays, Mgr Paul Tschang In-Nam, officialisée le 12 août.

Cette visite intervient alors que la transition démocratique semble délicate. Dans ce pays où Aung San Suu Kyi, conseillère d’Etat et ministre birmane des Affaires étrangères, et les militaires (qui contrôlent 25% du parlement et dirigent les trois ministères clés de la défense, des frontières et de l’intérieur) se partagent le pouvoir, les conflits ethniques et religieux se sont multipliés au nord et à l’est de la Birmanie ainsi que dans l’Arakan. Dans cette région frontalière du Bangladesh, depuis le 25 août dernier, un nouvel épisode de violences a conduit plus de 18.000 Rohingyas à fuir.

Le pape François n’est pas resté insensible au sort de cette minorité. Le 8 février dernier, il invitait les pèlerins à prier « pour nos frères et sœurs Rohingyas ». Plus récemment, dimanche 27 août, soit la veille de l’annonce de sa visite en Birmanie, le Saint-Père faisait état de « tristes nouvelles sur la persécution de la minorité religieuse de nos frères Rohingyas ». En Birmanie, la question des Rohingyas constitue un sujet ultra-sensible : le simple fait d’utiliser l’appellation ‘Rohingya’ est inacceptable pour beaucoup de Birmans bouddhistes, lesquels utilisent l’appellation ‘Bengalis’, pour souligner le fait qu’à leurs yeux, ces musulmans sont des immigrés venus récemment du Bangladesh.

Si le programme détaillé de ce déplacement consacré à « l‘amour et la paix » n’a pas encore été communiqué, le pape devrait se rendre à Naypyidaw et à Rangoun. A Naypyidaw, capitale officielle et siège de la junte militaire, le Saint-Père devrait rencontrer le président Htin Kyaw et Aung San Suu Kyi. A Rangoun, capitale économique et principale ville birmane, il devrait notamment célébrer une messe à la cathédrale Sainte-Marie.

Au Bangladesh, pour promouvoir l’harmonie interreligieuse

Le Saint-Père se rendra ensuite au Bangladesh, du 30 novembre au 2 décembre, un pays où la communauté chrétienne est ultra-minoritaire. Sur une population de 160 millions d’habitants, très largement musulmane, les chrétiens sont moins de 0,5 %, soit 600 000 croyants dont 350 000 catholiques, répartis en huit diocèses.

En octobre 2016, le nonce en poste à Dacca, Mgr George Kocherry, avait fait savoir que les autorités civiles et religieuses locales avaient adressé une invitation officielle au Saint-Père. « Une visite est dans l’ordre du possible, j’en attends la confirmation de la Secrétairerie d’Etat », écrivait-il dans un mail à l’agence Ucanews.

Cette visite aujourd’hui confirmée, le cardinal Patrick D’Rozario a fait part de son enthousiasme à Asianews : « Nous attendons cette nouvelle depuis longtemps. Le pape François sera accueilli chaleureusement, non seulement par les chrétiens, mais aussi par les hindous et les musulmans. » Pour le premier cardinal du pays, la venue du pape François constitue une opportunité de célébrer « l’harmonie interreligieuse, qui a caractérisé les relations au sein de notre population depuis des siècles ». « Harmonie et paix » est d’ailleurs le thème du voyage pontifical.

Le Bangladesh, longtemps réputé pour sa tolérance à l’égard des minorités, est, depuis quelques années, confronté à un terrorisme de masse. Les blogueurs faisant profession d’athéisme, les intellectuels perçus comme libéraux et les minorités religieuses, notamment chrétiennes, doivent faire face à une multiplication des violences organisées par des groupes islamistes. Le rapport de la Commission des Etats-Unis sur la liberté religieuse dans le monde, rendu public le 26 avril dernier, dénonçait un climat de « peur » qui s’est installé dans le pays.

Si le programme détaillé de la visite du pape François n’a pas encore été officiellement communiqué, outre les entretiens avec les personnalités politiques, le Saint-Père devrait célébrer une grande messe dans le stade de Dacca, prendre part à une rencontre interreligieuse et rencontrer des pauvres et des personnes handicapées soutenues par l’Eglise, avait confié le cardinal D’Rozario à Eglises d’Asie. Le souverain pontife ne devrait rester qu’à un seul endroit, Dacca, capitale du pays.

La visite du pape François « va donner une énergie nouvelle à la petite Eglise qui est au Bangladesh » avait déclaré Mgr Sebastian Tudu, évêque de Dinajpur et président de la Commission épiscopale pour l’évangélisation et la promotion des sociétés pontificales missionnaires, d’autant que la seule et unique visite d’un pape dans ce pays remonte au 19 novembre 1986, lorsque Jean-Paul II s’arrêta 24 heures à Dacca. Le dispositif de sécurité entourant ce déplacement promet d’être particulièrement renforcé.

(eda/pm)

(1) Le pape François s’est rendu en Corée du Sud (13-18 août 2014) puis aux Philippines et au Sri Lanka (13-19 janvier 2015).