Eglises d'Asie

Travailleurs “résidents illégaux”

Publié le 18/03/2010




Ces travailleurs qui affluent à Taiwan de toute l’Asie du Sud et du Sud-est – surtout des Philippines, de Malaisie, de Thaïlande et d’Indonésie – ne sont pas mécontents de leur sort, assure-t-on du côté des Eglises, car leurs salaires sont beaucoup plus élevés que ce qu’ils pourraient gagner dans leurs pays respectifs. Pourtant, leur situation ne paraît pas tellement enviable (10).

Il faut dire en effet que la politique gouvernementale à leur égard est plutôt hésitante: en général, on ne les expulse pas, mais on ne leur donne aucun statut régulier, ce qui les met trop souvent à la merci d’employeurs peu scrupuleux. Les statistiques les concernant varient dans d’énormes proportions. D’après la police des étrangers, chargée de l’application des lois sur la résidence dans le pays, ils seraient 41 000, mais les données fournies par les foyers sociaux de l’Eglise catholique font état de chiffres cinq fois plus forts, la nationalité la plus représentée étant celle des Philippins, avec un effectif d’environ 30 000 personnes qui, vu leur nombre, se défendent peut-être mieux que celles venant d’autres régions, parfois aussi lointaines que l’Inde, le Pakistan et l’Afrique.

Or, le chômage à Taiwan affecte moins de 2% de la population, et les petites et moyennes entreprises – textiles, plastiques, métaux – où les rémunérations sont peu élevées, sont quasi abandonnées par les ouvriers taiwanais qui trouvent ailleurs de meilleures conditions d’emploi. C’est là que sont engagés la plupart des immigrants, recrutés dans leurs pays d’origine par des agents qui se font largement payer leurs services : en général quelque 6 000 F au départ et autant à l’arrivée…

Une enquête menée sous les auspices de la Conférence épiscopale à propos des illégaux philippins a révélé qu’ils sont embauchés surtout comme domestiques à domicile, ou comme manoeuvres dans des usines mal équipées, ou même dans des fabriques semi-clandestines des banlieues industrielles de Taipei et de Kaohsiung. La paie, dans l’ensemble, peut aller de 1 500 à 3 500 F par mois, sans aucune sécurité sociale ni assurance contre les accidents. Il arrive que les heures supplémentaires restent impayées, et comme l’employeur a soin de garder les passeports, les ouvriers lui sont en quelque sorte enchaînés.

Pareille situation serait sans doute moins généralisée si les règlements existants étaient effectivement appliqués, et si les visas étaient plus facilement accordés aux étrangers demandeurs d’emploi. Les autorités se montrent avares à cet égard, au risque de handicaper la réalisation des projets de développement prévus par elles. Un exemple typique : la construction du métro à Taipei, qui doit s’échelonner sur dix ans, nécessitera pour les deux années à venir l’embauche de 28 000 travailleurs. Depuis plusieurs mois les entrepreneurs ont été autorisés à faire venir officiellement de la main-d’oeuvre étrangère, mais jusqu’à présent les services de l’immigration n’ont approuvé l’admission que de quelques centaines de candidats.