Eglises d'Asie

A Hô Chi Minh-Ville et à Phat Diêm: une même suspicion?

Publié le 18/03/2010




Les garderies d’enfants tenues par les religieuses relèveraient-elles de la haute politique? C’est ce que sembleraient indiquer les consignes envoyées par le Service de l’éducation à ses permanences de Hô Chi Minh-Ville: “Etant donné la situation internationale et nationale qui soulève une série de questions complexes, les autorisations d’ouverture de classes seront délivrées avec parcimonie, prudence et réserve … Cette année, les autorisations d’ouverture accordées aux classes d’obédience religieuse doivent être très limitées. Chaque arrondissement, si le besoin s’en fait sentir et si toutes les conditions sont réunies à un niveau élevé, délivrera au maximum une ou deux autorisations … Elles ne seront accordées qu’aux classes ayant déjà effectivement fonctionné durant l’année scolaire 89-90” (19).

Ces nouvelles consignes sont spécialement destinées aux écoles enfantines tenues par les religieuses qui, jusqu’ici, étaient régies par une réglementation générale pour les écoles privées, publiée en 1988 (20). Il est probable que les “questions complexes” que mentionne ce texte sont celles soulevées, dans le monde et au Vietnam, par l’actuel effondrement des régimes socialistes européens. Comme il n’est pas vraisemblable que les garderies d’enfants puissent être considérées comme d’éventuels foyers de contestation, on peut penser que ces dernières mesures sont motivées par la vigilance vis-à-vis de toute opposition potentielle, préconisée par le 8ème plenum du mois de mars 90 (21): sont entre autres visés les religions et tout ce qui pourrait être un accroissement de leur influence.

Ce texte a suscité une inquiétude générale parmi les congrégations religieuses et les parents d’élèves dont certains sont des cadres supérieurs du régime actuel. Dans beaucoup de congrégations, on avait profité des vacances d’été pour améliorer les locaux d’enseignement et les rendre plus conformes aux critères préconisés par la réglementation de 1988. Or, les conditions exigées par les nouvelles directives à l’usage des écoles religieuses sont beaucoup plus sévères. Alors que dans les salles de classe ordinaires, on ne réclame qu’un mètre carré et demi d’espace par élève, les établissements religieux, eux, devraient fournir 2 mètres carrés à chacun de leurs élèves. Au début du mois de septembre, seules 3 congrégations ont été autorisées à ouvrir des classes maternelles, en 3 endroits. Les autres classes vont, probablement comme l’an dernier, continuer à fonctionner dans une semi-illégalité.

Un autre incident, cette fois-ci au Nord-Vietnam, témoigne de la même suspicion portée par les autorités à toute manifestation trop visible de l’Eglise catholique. Selon une agence de presse (22), l’annonce radiodiffusée d’une indulgence accordée par le Saint-Père aux fidèles du diocèse de Phat Diêm à l’occasion du centième anniversaire de l’édification de la cathédrale, aurait provoqué “une certaine nervosité” chez les autorités. Ces dernières craignent que l’année jubilaire organisée par le diocèse, qui devrait commencer le 7 octobre, ne provoque, à la faveur de l’affluence des fidèles, des troubles qui favoriseraient l’expression de sentiments antigouvernementaux … Le diocèse de Phat Diêm, avec ses deux évêques, ses dix prêtres et, selon certaines estimations, ses 150 000 fidèles, est un des plus dynamiques du Nord-Vietnam. Les chrétiens de Phat Diêm avaient été très nombreux à venir saluer le représentant du pape, le cardinal Etchegaray, lors de son voyage au Vietnam, au mois de juillet 89 (23).