Eglises d'Asie

L’Eglise et les élections présidentielles de 1992

Publié le 18/03/2010




Le cardinal Sin, archevêque de Manille, a soulevé une tempête dans la presse des Philippines. Il y a quelques semaines, il se déclarait ouvertement en faveur de l’un des futurs candidats aux élections présidentielles qui doivent avoir lieu en 1992.

Un journaliste le compare au “Padre Damaso”, franciscain espagnol, personnage principal du roman,très populaire aux Philippines, “Noli me tangere” (“Ne me touche pas”) écrit par Jose Rizal, héros de l’indépendance: “Depuis le jour où le sinistre “Padre Damaso” était devenu le symbole de la tyrannie ecclésiastique, on n’a jamais vu un leader de la puissante hiérarchie catholique se mêler autant de petite politiqueécrit-il.

Par contre, un autre éditorial pose la question: “combien de temps une Eglise qui se soucie tellement de changer la société peut-elle répugner à être directement impliquée dans le choix des leaders nationaux ? Quoi qu’il en soit de la séparation de l’Eglise et de l’Etat, c’est un fait que plus de 80% des Philippins sont baptisés dans l’Eglise catholique”.

Un troisième journaliste commente: de toute façon, le cardinal n’a pas parlé “ex cathedra”. S’il s’est trompé, c’est lui qui en subira le ridicule.

La question des relations entre l’Eglise et le gouvernement vient en bonne place dans les textes de travail présentés au Concile pastoral. Une enquête a été faite parmi les catholiques. Beaucoup d’entre eux ont exprimé le désir de voir l’Etat et l’Eglise intervenir dans des problèmes tels que la corruption, la protection de l’environnement, l’injustice. D’après l’un de ces documents, ceux qui ont répondu à l’enquête “l’ont fait de telle manière que la vieille question des domaines propres à l’Eglise et à l’Etat ne semble pas les inquiéter outre mesure”. On va même jusqu’à dire qu’en demandant à l’Eglise de parler et d’enseigner les principes moraux sur des sujets comme la réforme agraire ou le développement économique, les chrétiens font preuve de maturité dans leur foi.

Le P. Felipe Dayao, du diocèse de Cabanatuan, dans l’île de Luçon, fait lui aussi remarquer: “les pauvres pensent en termes pratiques: que ferons-nous lorsque nos maisons seront emportées par les inondations, ou lorsque nos enfants n’auront plus rien à manger ? La séparation de l’Eglise et de l’Etat ne signifie pas grand-chose pour eux”.

Et Mgr Federico Escaler, évêque d’Ipil, à Zamboanga del Sur, conclut: “Les politiciens vont venir me demander de parler en leur faveur. Cela se passe à toutes les élections. L’Eglise peut bien répéter qu’elle ne prend pas parti officiellement, elle est encore perçue comme une sorte de courtier en pouvoir politique”.