Eglises d'Asie

A l’heure du Koweit

Publié le 18/03/2010




« La ferme et immédiate réaction des Nations Unies, notamment du Conseil de sécurité, à l’invasion et l’annexion du Koweit mérite, sans équivoque, tout notre appui », a affirmé M. L.R. de Albuquerque, représentant du Portugal auprès de la Commission des droits de l’homme de l’ONU. Il rappelle ensuite que, les 22 décembre 1975 et 22 avril 1976, le Conseil de sécurité avait aussi exigé le « retrait sans délai » des forces armées indonésiennes de Timor Oriental. L’intervention du diplomate a eu lieu au cours de la 47ème session de ladite commission, réunie à Genève du 21 janvier au 8 mars 1991.

Il était tentant, au moment de la crise du Golfe, de rapprocher les situations et de montrer que l’inégalité des enjeux pouvait dicter des attitudes divergentes quant à « la mise en oeuvre des résolutions visant le rétablissement de la légalité si manifestement bafouée ». L’ambassadeur n’a pas manqué de rappeler qu' »on ne doit pas faire une application sélective des principes en utilisant deux poids et deux mesures ». Son argumentation a été largement reprise par plusieurs organisations non gouvernementales ayant statut consultatif auprès de l’ONU.

L’une d’elles a de plus souligné les graves violations des droits de l’homme toujours perpétrées par les autorités indonésiennes, et a suggéré que le dialogue entamé sous l’égide de M. Perez de Cuellar soit élargi en y associant la Résistance armée. Celle-ci – réduite à 400 hommes selon le gouverneur de Dili, mais estimée à 4 000 par le commandant Xanana Gusmao, son chef charismatique -, serait disposée à répondre positivement à une invitation en ce sens. Vue utopique peut-être, quand on constate que, depuis 4 ans, les délégués du Portugal et de l’Indonésie à l’ONU ne sont pas parvenus à s’accorder sur les modalités d’une visite de députés portugais à Timor Oriental.

Par ailleurs, aux Etats-Unis, plus de la moitié des membres du Congrès ont signé un message adressé au secrétaire d’Etat James Baker, par lequel ils entendent dénoncer les violations des droits de l’homme à Timor Oriental, et en comparer l’annexion, en 1975, à celle du Koweit en 1990.

Sur place, les incitations à l’apaisement n’ont pas manqué ces derniers temps de la part des autorités civiles et ecclésiastiques (10); elles ne semblent pas avoir produit d’effet. Les jeunes rejettent ouvertement l’occupation indonésienne. Les violences se multiplient, visant surtout des non-Timorais qui, à Dili par exemple, représentent environ 20% des 120 000 habitants de la ville. De petites mosquées y sont apparues dont la présence irrite les autochtones, chrétiens pour la plupart. Les paysans se plaignent d’abus, d’exactions ou de sévices. Les militaires promettent enquêtes et aide, mais concrètement ne réalisent rien qui satisfasse les plaignants. Au contraire, la police est accusée de procéder à des arrestations arbitraires suivies d’interrogatoires musclés, dont la Croix-Rouge, impuissante, recueille ensuite le témoignage (11). Pour les seuls districts de Dili et de Liquiça, des statistiques, sans doute incomplètes, couvrant les mois d’octobre et novembre 1990, font état des chiffres suivants: 5 assassinats; 7 disparitions, dont celle d’un petit-neveu, âgé de 15 ans, de l’ancien administrateur apostolique, Mgr da Costa Lopes; 23 cas de tortures ou de mauvais traitements, et 73 arrestations simples.

M. Carrascalao, le gouverneur, affirmait en octobre 1990: « Il faut reconnaître que nous nous sommes trompés, nous avons adopté durant ces 15 années une très mauvaise approche. Nous n’avons pas su attirer les jeunes, qui sont contre nous maintenant. Tout est arrivé à cause de nos erreurs. »