Ce serait la troisième fois depuis la mi-mars que pareil scénario se reproduit. Ces groupes de réfugiés, pour la plupart des villageois, comportent une forte proportion de femmes et d’enfants.
Il n’est pas aisé de savoir ce qui se passe exactement dans la région d’Aceh où l’agitation séparatiste est endémique. Les cercles dirigeants de Jakarta se montrent extrêmement réservés sur le sujet, et minimisent l’importance de l’affaire. D’après eux, il ne s’agirait nullement de troubles d’ordre politique ou d’une insurrection armée visant à satisfaire des aspirations à l’indépendance, dont on n’ignore pourtant pas l’existence.
Si l’on reconnaît officiellement que 5 à 6 000 hommes de troupe ont été envoyés dans cette région de la pointe septentrionale de Sumatra, on explique qu’ils sont chargés d’une double mission. La première consisterait à apaiser l’agitation religieuse suscitée par des leaders islamiques dont le fanatisme s’accommode mal de la tolérance recommandée par le gouvernement central. La seconde – et c’est sur celle-là que l’on insiste surtout – ne serait autre que celle d’une opération de police d’envergure, destinée à bloquer une fois pour toutes le trafic de stupéfiants florissant dans cette zone.
De toute manière, des associations de défense des droits de l’homme se sont déjà manifestées à l’étranger pour protester contre des exactions mises sur le compte de l’armée. Par ailleurs, dès décembre 1990, une organisation de juristes indonésiens signalait dans un rapport que les militaires, dans leur souci de restaurer l’ordre, utilisent, dans la province d’Aceh, une “thérapie de choc” dont on redoute qu’elle n’engendre une atmosphère de terreur.