Eglises d'Asie – Inde
Emotion dans le pays après l’assassinat de 21 dalits chrétiens
Publié le 18/03/2010
Dans ce village, les propriétaires terriens sont pour la plupart des « reddis », caste relativement élevée. Ils sont environ 3 000 et de religion hindoue. 1 500 dalits (appelés autrefois « intouchables ») sont à leur service depuis des siècles. Ceux-ci sont presque tous devenus chrétiens: quelques-uns sont catholiques, mais la plupart sont protestants.
Le drame a été provoqué par un incident apparemment mineur, mais très significatif de l’esprit de caste: le 4 juillet, dans une salle de cinéma, en étirant ses jambes, un dalit, malencontreusement, touche du pied un reddi; ce dernier s’estime insulté. S’ensuivent une altercation et des échanges de coups. Les jours suivants, les reddis ne songent plus qu’à « remettre les dalits à leur place », tandis que ces derniers refusent d’aller travailler pour les reddis. Les forces de police sont alertées et 60 policiers viennent camper dans le village.
Il semble bien que la police ait fait cause commune avec les reddis. Selon le quotidien « The Hindu », « le mardi 5 août, la police fait une descente chez les dalits, les bat et les chasse du village. Ces derniers veulent aller se cacher dans les champs ou le long de la voie ferrée. Mais 500 propriétaires terriens, armés de bâtons, de barres de fer, de lances et de hachettes les y attendent… » 21 dalits sont battus à mort, brûlés vifs ou enfermés dans des sacs lestés de pierres et jetés dans le canal.
La tragédie a suscité une émotion considérable dans le pays. Les autorités civiles et religieuses ont condamné ces atrocités. Une grève générale a été décrétée dans l’Andra Pradesh et de violentes altercations ont eu lieu au parlement de New Delhi. Les dirigeants politiques de la majorité et de l’opposition se sont rendus sur les lieux. Malgré leur intervention, les dalits du village refusent tout dédommagement aussi longtemps que les coupables ne seront pas arrêtés, jugés et sévèrement condamnés.
30 000 dalits ont manifesté leur colère pendant les obsèques des victimes. Le pasteur protestant James Massey et l’évêque catholique de Guntur ont eux aussi demandé que justice soit faite. Une commission d’enquête a été mise sur pied par le gouvernement et la Fédération des étudiants catholiques.
Quelques jours plus tard, le 18 août 1991, non loin de Tsundur, dans le district de Nalgonda, une femme de basse caste était à son tour victime d’une agression de la part de quelques propriétaires reddis. Ils lui reprochaient d’être responsable de la mauvaise conduite de l’un des leurs. Ils lui ont fait subir les pires indignités. Mais cette fois l’intervention de la police a été rapide et efficace: sans doute, estime le quotidien « The Hindu », parce que les événements de Tsundur lui avaient servi de leçon.
Depuis que les dalits sont devenus chrétiens et qu’ils ont accès à l’éducation, un certain nombre d’entre eux ont obtenu des diplômes universitaires et des emplois dans l’administration. Certains ont même réussi à acheter des terres. « Ils ont pris conscience de leurs droits, et sont devenus économiquement indépendantsrapporte un journaliste de « Frontline ». Ceci entraîne des tensions entre les membres des hautes castes peu disposées à renoncer à leurs privilèges traditionnels et les jeunes dalits devenus conscients de leur dignité.