Eglises d'Asie

La liberté religieuse dans l’ancienne et la nouvelle Constitution

Publié le 18/03/2010




Au mois d’avril 1992, l’Assemblée nationale vietnamienne approuvera le texte définitif de la 4ème Constitution de la République socialiste du Vietnam. La première avait été publiée en 1946 au moment de la proclamation de l’indépendance. Le nouveau projet de Constitution a été discuté lors des dernières sessions de l’Assemblée (11) et publié par la presse, le 30 décembre 1991. Depuis le début de l’année 1992, il est devenu le principal sujet de discussions et de commentaires dans les réunions politiques organisées par les autorités. Le nouveau texte apporte un certain nombre d’amendements. Il corrige notamment l’ancien article proclamant la liberté religieuse.

C’est l’article 68 qui, dans la Constitution de 1980, affirmait la liberté de croyance: “Le citoyen jouit de la liberté de croire ou de ne pratiquer aucune religion. Personne ne peut se servir de la religion pour violer la loi et la politique de l’Etat.” Cet article, dans le projet de nouvelle Constitution, est remplacé par l’article 67 dont le contenu est le suivant: “Le citoyen jouit de la liberté de croire ou de ne pratiquer aucune religion. Les lieux de culte villageois (12), les pagodes, les églises, les temples et les autres lieux de culte public des diverses religions sont protégés par l’Etat. Les religions sont égales devant la loi. Personne ne peut violer la liberté de croyance, de religion, ou utiliser les croyances, la religion, pour aller à l’encontre de la loi ou de la politique de l’Etat”.

Pour certains commentateurs, l’ancien et le nouvel article sur la liberté religieuse ne différeraient seulement que par leur numérotation. Pour d’autres, par exemple au sein du Comité d’union de Hô Chi Minh-Ville (13), certains progrès seraient à souligner: dans l’ancienne Constitution, dit-on, seule l’utilisation de la religion à des fins condamnables était interdite. Le nouveau projet stigmatiserait aussi l’infraction opposée: les manquements au respect de la liberté religieuse. Cependant le même commentateur ajoute que ni l’une ni l’autre de ces deux condamnations ne seraient nécessaires si le gouvernement et le Parti n’avaient aucune arrière-pensée et ne nourrissaient aucune méfiance à l’égard des milieux religieux.

Il est assez difficile d’apprécier la portée de la plupart des ajouts à l’ancien article 67. Par exemple, on voit mal ce que peut signifier l’affirmation de l’égalité de toutes les religions devant la loi. C’est la première fois aussi que, dans ce type de texte, on parle de liberté de religion; il n’était jusqu’ici question que de liberté de croyance. Cependant, dans une vigoureuse déclaration à ce sujet (14), Mgr Nguyen Van Hoa fait remarquer que l’introduction de ce mot dans l’article 67 est mal placée, timide et ambiguë. Il demande que l’on affirme clairement et sans ambages la seule liberté que puisse garantir la loi, “la liberté de religion”.

Il est curieux de voir apparaître la mention des lieux de culte à protéger à l’intérieur d’un texte d’ordre aussi général qu’une Constitution. Toutefois un détail peut paraître intéressant. Dans la liste des édifices religieux protégés par l’Etat, est mentionné en premier lieu le “dinhle lieu de culte villageois, c’est à dire la très ancienne et très célèbre “maison commune” du village traditionnel. A notre connaissance, c’est la première fois que, dans des textes concernant la religion, on fait mention de cette part très importante du culte et du sentiment religieux vietnamiens: la religion du village. Peut-être faut-il y voir l’influence d’un certain nombre de membres du Parti qui, devant l’effondrement général des valeurs communistes, se tournent de plus en plus, en tous domaines, vers la tradition vietnamienne parée par eux de toutes les qualités.