Eglises d'Asie

Les démocrates progressistes musulmans dans l’arène politique

Publié le 18/03/2010




Une manifestation massive de musulmans a eu lieu à Jakarta le 1er mars 1992, à l’appel du “Nahdlatul Ulama”, l’organisation musulmane la plus importante du pays. Selon M. Abdurrahman Wahid (9), son président, elle aurait rassemblé 800 000 personnes si le gouvernement n’avait pas fait preuve de mauvaise volonté pour accorder les permis nécessaires et découragé des autocars entiers de se diriger vers Jakarta. Le gouvernement avait, par décret, interdit un rassemblement de plus de 200 000 personnes.

L’objectif de cette manifestation était d’une part de renforcer le pouvoir de M. Wahid, quelque peu contesté récemment à l’intérieur de l’organisation, mais aussi de prouver la popularité des thèses sociales et politiques qu’il soutient: Il estime que l’islam doit accepter le pluralisme politique et religieux et faciliter l’avènement d’une société démocratique dans le pays.

“Il y a, en Indonésie, deux types de dirigeants musulmans”, a déclaré M. Wahid au “Far Eastern Economic Review” de Hongkong: “Ceux qui voudraient introduire officiellement l’islam dans la vie de l’Etat parce qu’ils pensent que la modernisation est une menace pour eux; ce sont ceux-là qui se plaignent de discrimination et qui disent que le gouvernement devrait accorder des privilèges spéciaux aux musulmans pour corriger le déséquilibre social. Puis, il y a ceux qui, comme moi, sont convaincus que les minorités (non musulmanes, ndlr) donnent vie à la nation et doivent être protégées. Nous pensons aussi que l’islam ne doit pas être introduit dans la législation et doit être vécu comme un “plus” social et moral. Nous devons privilégier une vision nationale plutôt qu’une vision islamique

Sans le dire directement, M. Wahid suggère que seule une telle vision de l’islam permettra au gouvernement de progresser rapidement et efficacement vers davantage de démocratie dans le pays.

Le débat, lancé par M. Wahid à propos du rôle de l’islam dans la société indonésienne, intéresse dans une certaine mesure toutes les organisations musulmanes du pays. Un certain nombre d’observateurs pensent cependant que les opposants de M. Wahid, à l’intérieur de ces organisations, ne sont pas tous nécessairement en faveur d’un islam extrémiste.

Quoi qu’il en soit, la plupart des observateurs s’accordent à dire que la campagne lancée par M. Wahid pour que les musulmans d’Indonésie optent résolument pour un système démocratique pourrait bien s’avérer la dynamique politique la plus importante des années 90 (10). A propos du rassemblement populaire du 1er mars 1992, il faut noter que la hiérarchie militaire indonésienne avait pris position en faveur de la manifestation.

L’Indonésie, avec 180 millions de fidèles de l’islam, est le plus grand pays musulman du monde.