Eglises d'Asie

Un chrétien candidat de l’opposition à l’élection présidentielle

Publié le 18/03/2010




M. George Gilbert Swell, chrétien presbytérien, membre de l’ethnie aborigène “Khaal” et originaire de l’Etat du Maghalaya au nord-est de l’Inde, est candidat à l’élection présidentielle du 13 juillet 1992, destinée à trouver un remplaçant à M. Ramaswamy Venkataranam, actuel président. On considère en général que M. Swell a peu de chances d’être élu, son rival, M. Shankar Dayal Sharma, jouissant du soutien à la fois du parti du Congrès au pouvoir et des partis communistes indiens.

M. Swell est, lui, soutenu par le parti du Janata Dal, et par le BJP (Parti du peuple indien, fondamentaliste hindou). Ce dernier est pourtant bien connu pour son opposition militante au christianisme et aux religions minoritaires (10). L’affaire provoque de vives réactions au sein de la communauté chrétienne.

M. Chothebai, président de l’Union catholique panindienne, se félicite de cette candidature: “Que Swell gagne ou perde, peu importe. Nous sommes heureux de voir qu’une part appréciable de la classe politique et des parlementaires trouve juste de proposer un chrétien pour le poste. C’est bien la preuve que la communauté chrétienne en Inde fait partie intégrante de la nation”.

Par contre, le P. Sathyaseelam, secrétaire de la Commission épiscopale pour la jeunesse, voit dans le soutien du BJP une manoeuvre habile visant à “berner la communauté chrétienne. Le BJP, dit-il, essaie de se faire une réputation de protecteur des minorités. Il veut faire croire qu’il est au-dessus des différences de religion et de caste”. Il ajoute: “Le BJP ne permettra jamais qu’à un candidat hindou et de haute caste de devenir président”.

Du côté des protestants, M. Sydney Ribeiro, président national de la YMCA (“Young men’s Christian Association”), invite aussi les chrétiens à se méfier: “Le BJP n’a pas la moindre intention de venir en aide aux minorités. Swell n’est qu’un pantin entre leurs mains”.

Par contre, le P. George Pereira, secrétaire-général adjoint de la Conférence épiscopale, se réjouit: “Swell a fait preuve de ses grandes capacités tout au long des 40 années de sa carrière politique. Sa candidature est une bonne chose, qu’il soit élu ou non”. De son côté, un jésuite sociologue, le P. Walter Fernandes, préfère voir venir avant de porter un jugement. Pour lui, cette candidature “fait partie de la polarisation politique” que l’on peut actuellement constater dans le pays.

Un observateur attentif de la scène indienne déclare: “M. Swell ne sera sans doute pas élu. Mais certains pensent proposer son nom au poste de vice-président, pour succéder à M. Sharma lui-même. Le parti du Congrès pourrait ne pas s’opposer à cette nomination. Si les espoirs du candidat étaient comblés, pour la première fois dans l’histoire de l’Inde indépendante, un dalit chrétien se trouverait placé au sommet de l’Etat”.

Certains commentateurs considèrent le soutien promis à M. Swell par le BJP comme une basse revanche politique prise par ce parti contre le Congrès en même temps qu’une manoeuvre du Janata Dal pour favoriser la promotion des basses castes. “Quel que soit le résultat, dit M. Zafar Agha, journaliste à la revue “India Today”, cette élection présidentielle aura produit deux résultats majeurs: elle aura amené les partis politiques à la confrontation, mettant ainsi fin à la politique de consensus en vigueur depuis un an; et M. V.P. Singh, président du Janata Dal, aura fait de la promotion des basses castes un facteur permanent de toute future élection”.