Eglises d'Asie – Indonésie
Des personnalités politiques chrétiennes se plaignent d’avoir perdu de l’influence
Publié le 18/03/2010
La Chambre des représentants a 400 membres élus et 100 membres choisis dans les rangs des forces armées, les militaires n’étant pas admis à voter dans les élections générales. Les dernières ont eu lieu en juin 1992. L’Assemblée consultative du peuple réunit en son sein les 500 représentants de la Chambre et 500 personnes choisies par le président en fonction de la région, de la religion et du groupe social. Elle se réunit tous les cinq ans pour élire un président et voter le plan quinquennal du gouvernement.
Selon les chiffres disponibles, l’Assemblée consultative compte 56 catholiques, dont 31 sont membres élus de la Chambre et 25 ont été désignés. Les données détaillées manquent pour les protestants à l’Assemblée, mais de l’avis des observateurs ils ne sont pas mieux lotis que les catholiques.
Les hommes politiques chrétiens et nationalistes craignent qu’à la faveur de leur déclin au parlement et grâce à la percée des musulmans de droite au parti du Golkar, de nouveaux projets de lois islamiques puissent être adoptés au cours des cinq prochaines années. Aux élections du mois de juin, le Golkar a obtenu 282 sièges à la Chambre, 17 de moins qu’en 1987. Le Parti uni du développement, parti musulman, a obtenu 66 sièges, un de plus qu’en 1987, et le Parti démocrate indonésien (PDI), composé de chrétiens et de nationalistes, 56 sièges, 16 de plus qu’en 1987.
Paulus Krissantono, catholique réélu à la Chambre et ancien secrétaire de la commission de la Chambre pour les affaires socio-religieuses et scolaires, a déclaré que le changement qui vient de se produire est une incitation pour les politiciens catholiques. « Voyant le côté positif des choses, j’espère que la situation les poussera à donner le meilleur d’eux-mêmes et à confirmer leur valeur à ceux qu’ils représentent « .
Marcel Beding, du Parti démocrate indonésien, membre catholique de la Chambre, a fait remarquer que le déclin du rôle des chrétiens à l’assemblée nationale change radicalement la constellation politique nationale. Désormais, la majorité musulmane va chercher à imposer son point de vue dans toutes les affaires socio-politiques.
Autre membre du Parti démocrate à la Chambre, Vincentius B. Da Costa a fait observer qu’à la différence de ce qui se passait au début de l’ère de l' »ordre nouveau » (à la fin des années 60), les propositions des chrétiens concernant la politique de développement national sont aujourd’hui ignorées et ont cédé la place à l’influence grandissante des musulmans.
Sabam Sirait, représentant protestant à la Chambre, membre du Parti démocrate, se déclare moins pessimiste quant à l’avenir des hommes politiques chrétiens dans les cinq prochaines années. « N’oubliez pas, dit-il, que notre Etat unitaire est une grande famille. La domination d’un groupe majoritaire en politique ne garantit pas que l’Etat deviendra meilleur. La politique est l’art de se faire des alliés et aujourd’hui le gouvernement se rapproche des musulmans pour une raison pratique. Il n’y a pas là de quoi inquiéter. Mais si la collaboration entre le gouvernement et les groupes musulmans sacrifie les intérêts d’autres groupes dans notre Etat pluraliste, l’unité nationale sera en sérieux danger ».
De l’avis de Deliar Noer, intellectuel nationaliste qui enseigne les sciences politiques à l’université de Jakarta, la prépondérance des musulmans dans les organismes législatifs « montre que le régime n’est plus crédible aux yeux de la population et qu’il compte en conséquence sur le soutien des intellectuels musulmans et des leaders religieux. Mais, ajoute Noer, en politique on ne reste pas indéfiniment ami ou ennemi. Je devine qu’une fois que le régime aura atteint le but pratique qu’il poursuit, les musulmans risquent bien d’être déçus ».