Eglises d'Asie

Mise en garde du Saint-Siège contre le Comité d’union du catholicisme

Publié le 18/03/2010




Au mois de mai 1992, peu de temps avant la venue de la délégation vietnamienne officielle à Rome, une lettre signée du cardinal Angelo Sodano, secrétaire d’Etat, a été adressée au président de la Conférence épiscopale du Vietnam et transmise pour information aux autorités du pays. Elle priait les évêques de mettre en garde les prêtres et les religieux de leurs diocèses contre une éventuelle adhésion au “Comité d’union du catholicisme vietnamien” (5).

Fondée en 1983 à Hanoi sous le nom de “Comité d’union des catholiques patriotes” (6), l’association a changé de nom lors de son deuxième congrès à Hanoi et adopté son actuelle appellation (7). Les statuts du Comité précisent qu’il est membre du Front patriotique, qu’il se soumet à ses directives et qu’il est chargé de les diffuser dans les milieux catholiques. Au Nord-Vietnam où le Comité a pris la succession d’une association nommée “Comité de liaison des catholiques patriotes”, fondée en 1954, il est encore aujourd’hui fort peu implanté. C’est à Hô Chi Minh-Ville qu’il a connu son plus grand développement à cause du jeune âge et du dynamisme de ses membres. Il y publie un hebdomadaire et s’est imposé dans le diocèse grâce à ses rapports étroits avec les autorités civiles. Depuis le début de l’année 1992, il s’efforce de créer des comités locaux dans d’autres diocèses du Sud où l’association était encore absente; c’est ainsi que des comités viennent d’être fondés dans les diocèses de Dalat et de Buon Ma Thuot.

Bien que le contenu de la lettre de la secrétairerie d’Etat n’ait pas été divulgué par le Vatican, on sait cependant qu’elle s’appuie sur une déclaration de la Congrégation pour le clergé du 8 mars 1982 (8), dont elle reprend une partie du contenu. C’est le troisième paragraphe de ce document qui semble concerner le Comité d’union. Il y est affirmé que “sont sans aucun doute inconciliables avec l’état clérical et donc interdites à tous les membres du clergé, les associations de clercs, même érigées ou constituées uniquement sur le plan civil, qui, directement, de manière ouverte ou détournée, poursuivent des finalités touchant à la politique, même si elles se présentent sous l’apparence extérieure de vouloir favoriser des idéaux humanitaires, la paix et le progrès social”.

Dès 1983, Mgr Nguyên Kim Diên, archevêque de Huê, s’était appuyé sur cette déclaration (9) pour s’opposer à la fondation du Comité qu’il considérait comme un instrument de l’Etat pour contrôler l’Eglise et y introduire la division. En 1984, le cadre qui lui a fait subir un interrogatoire de 50 jours lui avait répliqué que l’application de cette déclaration romaine au Vietnam constituait une violation de la loi. Il avait ajouté que “s’opposer au Comité d’union c’était s’opposer à l’Etat”. Le P. Chan Tin, aujourd’hui en résidence surveillée, s’est aussi violemment opposé au Comité à la fin des années 80. Lors d’un entretien avec lui, le secrétaire d’Etat à l’Intérieur lui avait rappelé la protection spéciale dont jouissait le Comité (10).

Selon des nouvelles en provenance du Vietnam, le président de la Conférence épiscopale a lui-même adressé un exemplaire de cette lettre à tous les évêques du Vietnam. Dans beaucoup de diocèses, elle est, aujourd’hui, largement connue du clergé et des laïcs. De la même source, on laisse entendre que l’Etat vietnamien profiterait de la réunion de la Conférence épiscopale pour manifester sa mauvaise humeur à ce sujet. Cette réunion, qui devait initialement se tenir à Hô Chi Minh-Ville au mois de mai, a été reportée plusieurs fois. Elle devait débuter le lundi 12 octobre 1992, à Hanoi.