Eglises d'Asie

OU EN EST LE PROGRAMME D’ALPHABETISATION ?

Publié le 18/03/2010




L’ancien premier ministre, Rajiv Gandhi, disait: “Le développement ne se limite pas aux usines, aux barrages et aux routes. Le développement vise à l’épanouissement matériel, culturel et spirituel de l’homme. Le facteur humain, le contexte humain sont de la plus grande importance. Nous devrons à l’avenir prêter davantage attention à ces questions”. Par alphabétisation, nous n’entendons pas seulement le fait de savoir lire, écrire, compter. Nous entendons aussi aider les gens à prendre conscience des raisons pour lesquelles ils vivent dans la pauvreté et leur prêter main-forte afin qu’ils puissent progresser grâce à une meilleure organisation et par leur participation à l’effort de développement. L’alphabétisation est, par conséquent, un élément indispensable du développement des ressources humaines. C’est un instrument à double finalité: un outil pour commencer, puis continuer à apprendre. L’alphabétisation est une condition nécessaire à l’évolution et à la croissance de l’individu aussi bien qu’au développement national.

Pourquoi la majorité de la population est-elle analphabète ?

Si nous voulons mieux comprendre l’énorme retard d’une grande partie de la population, nous devons commencer par analyser notre système d’instruction. En 1835, Lord Macaulay approuvait la “circulaire sur l’éducation” qui est à la base du système tel que nous le connaissons aujourd’hui. La Compagnie des Indes orientales, trouvant que cela lui coûtait trop cher d’importer d’Angleterre des fonctionnaires pour son énorme machine administrative, mit au point un système éducatif qui avait un triple but:

a) Il s’adressait à des Indiens qui auraient pour tâche de faire fonctionner cette machine administrative et politique de la Compagnie, dont ils devaient accepter les principes directeurs.

b) Il devait également aider ces Indiens à apprendre des techniques et à faire leurs les valeurs fondées sur la structure économique capitaliste que les Britanniques étaient en train de créer en Inde.

c) Il devait former une classe de citoyens, Indiens de naissance, qui apparaîtraient britanniques dans leurs goûts, leur conduite et même leur apparence extérieure, des gens à qui on pourrait, par conséquent, se fier parce qu’ils seraient loyaux envers l’autorité britannique.

Notre système d’instruction est fondamentalement défectueux parce qu’il a été établi pour répondre aux besoins des colonisateurs.

Progrès

Depuis les années 1950, un progrès a été accompli dans le domaine éducatif. Le nombre des institutions est passé de 231 000 en 1951 à 755 000 en 1985. Au cours de la même période, les inscriptions dans les écoles sont passées de 24 millions à 132 millions. Le taux d’alphabétisation, qui était de 16,7% en 1951, a atteint 52,11% en 1991.

Au cours des dernières décennies, le pays a connu une croissance “quantitative” de l’instruction. Le gouvernement insiste maintenant davantage sur la qualité. Avant 1976, l’enseignement était placé sous l’autorité exclusive des Etats de l’Union; le gouvernement central se contentait d’un travail de coordination, tout en surveillant le niveau des enseignements techniques et supérieurs. En 1976, le système a été placé sous la responsabilité conjointe des Etats et du gouvernement central. Il a fallu pour cela amender la constitution. Depuis lors, de gros efforts ont été accomplis pour combattre l’analphabétisme. Nous n’avons pas, cependant, complètement atteint notre but, en raison de la masse de la population de notre pays.

Ampleur de l’analphabétisme

D’après le recensement de 1991, 47,89% de la population totale de l’Inde sont illettrés. Quarante-cinq après l’indépendance, 5 Indiens sur 10, trois femmes sur cinq, huit sur dix des membres des tribus aborigènes et des castes inférieures, ne savent ni lire ni écrire. Si l’on considère le nombre total des analphabètes, 100 millions d’entre eux appartiennent à la tranche d’âge des 15 à 35 ans. Selon le même recensement de 1991, les taux d’alphabétisme par Etat sont les suivants pour les Etats de plus de 10 millions d’habitants:

Etat Total Hommes Femmes

1. Andhra Pradesh 45,11 56,24 33,71

2. Assam 53,42 62,34 43,70

3. Bihar 38,54 52,63 23,10

4. Gujarat 60,91 72,54 48,50

5. Haryana 55,33 67,85 40,94

6. Karnataka 55,98 67,25 44,34

7. Kerala 90,59 94,45 86,93

8. Madhya Pradesh 43,45 57,43 28,39

9. Maharasthra 63,05 74,84 50,51

10. Orissa 48,45 62,37 34,40

11. Pendjab 57,14 63,68 49,72

12. Rajasthan 38,81 55,07 20,84

13. Tamil Nadu 63,72 74,88 52,29

14. Uttar Pradesh 41,71 55,35 26,02

15. West Bengal 57,72 67,24 47,15

Taux national 52,11 63,86 39,42

Le Kerala se distingue du reste du pays puisqu’il est parvenu à un taux d’alphabétisation de 90% grâce à la participation enthousiaste des citoyens aussi bien que des associations de bénévoles. Tous les autres Etats sont invités à prendre modèle sur le Kerala.

La politique nationale d’éducation

En 1986, le parlement a approuvé une politique nationale en vue d’élaborer un système national d’éducation. Il a été décidé que seraient considérées comme autant de responsabilités nationales, la transformation du système éducatif, la suppression des différences, l’universalisation de l’enseignement primaire, la formation des adultes, la recherche scientifique et technique.

Et l’on s’est donné différents moyens au service d’un vaste programme de formation permanente des adultes: (a) en établissant, dans les zones rurales, des centres de formation continue; (b) en organisant la formation des travailleurs par les employeurs et les services concernés du gouvernement, (c) par des programmes de télévision, radio, cinéma; (d) en créant des clubs et des organisations d’étudiants; (e) en encourageant les autodidactes; (f) en établissant des programmes de cours par correspondance.

Selon ce plan d’action, quelque 40 millions de personnes devaient être touchées par le programme national de formation des adultes avant 1990 et 60 millions de plus avant 1995. Cependant, un discours prononcé par l’ancien premier ministre Rajiv Gandhi à l’université de Harvard, le 19 octobre 1987, nous porte à douter de la sincérité du gouvernement dans l’application de ce programme. M. Rajiv Gandhi a dit en effet: “Je ne pense pas que l’alphabétisation soit la clé de la démocratie. La sagesse est beaucoup plus importante. Nous l’avons vu – et je ne parle pas uniquement de l’Inde, je pense aussi à d’autres pays – il peut arriver que l’alphabétisation, au lieu d’élargir les points de vue, les rende plus étroits”. Que signifie cette déclaration? Leader d’un parti politique qui a dirigé l’Inde pendant quatre décennies, Rajiv Gandhi encourageait-il la politique qui consiste à ne rien faire dans le domaine de l’instruction? Ou bien était-il en train d’apporter une justification à la nouvelle politique éducative ?

Trois mesures ont été adoptées pour combattre l’analphabétisme dans notre pays: (a) le programme national d’alphabétisation des adultes; (b) le programme d’alphabétisation des campagnes; (c) la mission nationale pour l’alphabétisation.

Le programme national d’alphabétisation des adultes

Lancé le 2 octobre 1978, il voulait unir les efforts du gouvernement central, des gouvernements provinciaux, des associations de bénévoles, des universités, des collèges. Son but fondamental était d’aider à l’alphabétisation des illettrés, en particulier dans le groupe d’âge des 15 à 35 ans. Il insistait plus spécialement sur l’alphabétisation des femmes, des castes inférieures, des secteurs défavorisés de la société, tous groupes qui forment la plus grande partie de la population illettrée de notre pays.

Le programme d’alphabétisation des campagnes

Il découle du précédent, qui est entièrement financé par le gouvernement central et mis en oeuvre par les Etats et les territoires de l’Union. Ses objectifs principaux sont d’encourager les intéressés à apprendre à lire et à écrire, tout en les éveillant à leur droits et devoirs et en les aidant à profiter des divers programmes mis au point par le gouvernement.

Ce programme a été lancé en mai 1986. Son principe était : “une personne enseigne une autre personne”.

La mission nationale pour l’alphabétisation

Inaugurée en mai 1988 par le premier ministre de l’époque, M. Rajiv Gandhi, elle se donnait pour objectif d’atteindre un taux d’alphabétisation de 80% en 1995, soit plus du double des 36% de 1981, en fournissant une “alphabétisation fonctionnelle” à 80 millions d’illettrés dans le groupe d’âge des 15 à 35 ans : 30 millions avant 1990, et 50 millions avant 1995.

Que réserve l’avenir ?

Il ne faut pas tout attendre du gouvernement. Chaque individu devrait prendre conscience de ses propres capacités à recevoir la lumière de l’instruction. De la même manière, il est bien évident que le gouvernement ne peut pas, seul, résoudre le problème de l’analphabétisme en Inde. Il ne peut pas, seul, accomplir le travail d’alphabétisation. Il peut cependant jouer le rôle de catalyseur en procurant les ressources humaines et financières qui rendront plus aisé l’accès au monde du savoir.

Pour renforcer ces efforts du gouvernement et les rendre significatifs, de nombreux concours sont nécessaires, particulièrement des associations de bénévoles, de la communauté estudiantine et de tous ceux qui sont prêts à se dévouer et à prendre leurs responsabilités dans la société.