Eglises d'Asie

Les gouvernements d’Asie estiment nécessaire de considérer les droits de l’homme dans le contexte asiatique

Publié le 18/03/2010




Une déclaration que viennent de publier à Bangkok les représentants de 40 gouvernements d’Asie et du Pacifique insiste sur la nécessité de considérer les droits de l’homme dans le contexte du pays et de la région géographique et rappelle les principes de respect de la souveraineté nationale et de non-ingérence dans les affaires intérieures de chaque pays.

C’est en vue de la conférence mondiale des Nations Unies sur les droits de l’homme qui se tiendra à Vienne du 14 au 25 juin 1993, et après deux autres conférences préparatoires régionales tenues l’une à Tunis en novembre 1992, l’autre à Costa-Rica en janvier 1993, que la conférence réunie à Bangkok du 29 mars au 1er avril 1993 a préparé la contribution de quarante pays situés du Moyen-Orient au Pacifique-sud (25).

La déclaration finale en trente points réaffirme l’adhésion des pays de la région aux principes fondamentaux des Nations Unies: universalité, interdépendance et indivisibilité des droits politiques, civils, économiques, sociaux et culturels. Elle se félicite aussi de l’attention croissante donnée par la communauté internationale aux droits de l’homme. Elle renouvelle son engagement de protéger les droits des femmes, reconnaît le droit des enfants à une protection spéciale et réitère le besoin de ressources régionales pour protéger et promouvoir les droits de l’homme.

En même temps, les signataires de la déclaration n’admettent pas que le respect des droits de l’homme conditionne l’aide au développement. Ils réaffirment le droit au développement, auquel la situation de l’économie mondiale actuelle fait obstacle, et désignent la pauvreté comme l’obstacle majeur à la pleine jouissance des droits de l’homme. Tout en reconnaissant que les droits de l’homme sont universels, la déclaration dit qu’il faut les considérer “dans le contexte d’un processus dynamique et évolutif vers une norme internationale, en gardant présents à l’esprit le sens et la portée des particularismes nationaux et régionaux comme de la différence des arrière-plans historiques, culturels et religieux

Au sujet de l’autodétermination, la déclaration voit dans la négation de ce principe de la loi internationale une grave violation des droits de l’homme, et demande que soient prises des mesures efficaces pour protéger les droits d’une population soumise à un occupant étranger. Elle affirme que le droit d’autodétermination ne devrait cependant pas être invoqué pour saper l’intégrité territoriale et la souveraineté d’un Etat. Les délégués ont fait à ce sujet référence à l’autodétermination des Palestiniens, en s’abstenant de citer le Cambodge, Timor oriental et la Birmanie.

Tout en acceptant de signer la déclaration finale de la conférence de Bangkok, le Japon a fait de sérieuses réserves sur son contenu au cours de la dernière séance. Le chef de la délégation japonaise, Seichiro Otsuka, a réaffirmé que, pour son gouvernement, exprimer des inquiétudes sur des violations des droits de l’homme, ce n’est pas s’ingérer dans les affaires internes d’un pays. Rappelant que l’aide extérieure du Japon est mondialement la plus importante, il a ajouté que son pays ne serait pas d’accord avec un article de la déclaration critiquant les efforts qui visent à lier l’assistance au développement d’un pays à son comportement en matière de droits de l’homme.

En revanche, beaucoup des gouvernements asiatiques représentés ont dit partager la vision des droits de l’homme qui place la croissance économique et le développement collectif avant les libertés individuelles. “Nous n’avons pas une vue individualiste des droits de l’homme, a dit le représentant de l’Indonésie, car nous ne pouvons pas négliger l’intérêt de la société, de l’Etat et de la nationSelon U Win Mra, représentant de la Birmanie : “les pays d’Asie ont leurs propres normes et critères des droits de l’homme, ils ne doivent pas se les laisser dicter par un groupe d’autres pays très éloignés d’eux par la géographie, l’économie, la situation sociale et politique

C’est en Asie que se trouvent plusieurs des gouvernements les plus contestés par les nations occidentales au sujet des droits de l’homme. Retiennent particulièrement leur attention la Chine, la Birmanie et l’Iran, dont le chef de délégation était à la tête de la commission qui a préparé le texte de la déclaration finale de Bangkok.

Mais la situation peut changer grâce aux voix que font de plus en plus entendre dans les débats internationaux les organisations non gouvernementales de défense des droits de l’homme. Plus d’une centaine d’entre elles ont assisté à la conférence de Bangkok. Elles ont collaboré entre elles pour présenter en commun leurs points de vue aux gouvernements. Ainsi le communiqué publié par les organisations non gouvernementales estime-t-il inquiétant que le droit à l’autodétermination soit limité aux populations sous domination étrangère ou coloniale, au mépris des droits les plus fondamentaux des populations indigènes d’une nation. Ces organisations non gouvernementales ont été bien accueillies par des pays comme la Thaïlande, les Philippines et le Japon.

Le Japon a essuyé des critiques de ses voisins, principalement de la Chine, pour ses positions jugées trop occidentales. Au dire des diplomates, si la conférence de Bangkok sur les droits de l’homme est parvenue à un consensus, c’est surtout grâce à la solidarité des pays de l’Asean, qui ont formé un pont entre le Japon et des pays comme la Chine, la Birmanie et l’Iran.