Des informations contradictoires n’ont cessé de circuler depuis le jour des enlèvements. Selon certains, les ravisseurs auraient fait partie d’un groupe de rebelles détachés du Front Moro de libération nationale (20) et commandés par un musulman fondamentaliste, Abu Sayyaf. Les autorités civiles avaient alors demandé au Front Moro d’intervenir pour négocier la libération des deux prisonniers. A l’époque les rebelles réclamaient une rançon de 10 millions de pesos pour le missionnaire et de 4 millions pour l’enfant (respectivement 2,5 et un million de francs français). Un médiateur fut désigné, M. Joey Tugung, fils d’un député de Basilan, qui rapporta que les ravisseurs ne demanderaient plus que 5 millions de pesos si les négociateurs étaient des membres du Front Moro.
Dans les jours qui suivirent les enlèvements, une opération militaire a été montée pour retrouver les deux victimes. Très tôt le P. Blanco a fait parvenir à son évêque une lettre dans laquelle il demandait que l’intervention militaire soit suspendue : “Ils ne m’ont pas tué. Mais ils seraient heureux de le faire. Ayez pitié de moi. Le danger est grand par ici. J’ai été blessé à un pied; mais ce n’est pas grave. Dites aux marines de cesser le combat, sinon je serai tué”. La demande du P. Blanco a été prise en considération et les opérations militaires arrêtées.
Le 17 avril, on a appris que les deux prisonniers avaient été remis à un autre leader musulman, un certain “Kumander Bashiri”, qu’on supposait être membre du Front Moro, mais qui, apparemment, n’obéit plus aux responsables de cette organisation de guérilla. Quelques jours plus tard, la nouvelle parvenait aux autorités que le prêtre et l’enfant étaient désormais aux mains du “Kumander Virgin Killer”, un autre musulman fondamentaliste, chef de ce que l’on appelle “le bataillon perdu”.
Les deux prisonniers passent ainsi d’un groupe rebelle à l’autre. Le but de leurs ravisseurs est sans doute de semer la confusion dans le camp gouvernemental, mais aussi de gêner l’action du Front Moro, l’interlocuteur “privilégié” des autorités dans les négociations de paix. Les ravisseurs veulent encore, semble-t-il, utiliser leurs prisonniers comme monnaie d’échange pour obtenir soit des armes, soit de l’argent, soit des avantages politiques.