Eglises d'Asie – Indonésie
Débat entre catholiques sur l’idée d’alliance avec les militaires contre les progrès de l’islam
Publié le 18/03/2010
Au cours d’un séminaire organisé le 4 avril par la commission de l’apostolat des laïcs de la conférence épiscopale d’Indonésie, Harru Tjan Silalahi, directeur du “Centre d’études stratégiques internationales” et ancien dirigeant du “Parti catholique” aujourd’hui défunt, a estimé que les forces islamiques qui se font jour visent à imposer au pays leur idéologie. Il a préconisé une collaboration des groupes non musulmans avec l’armée comme le meilleur moyen de maintenir l’idée nationale et l’unité.
La publication de sa conférence dans la presse a suscité une réponse du militant catholique Chris Siner Key-Timu, directeur de “La fondation du peuple”. Dans une interview donnée le 28 avril à l’agence UCA News, Key-Timu a dénoncé une telle stratégie comme antidémocratique et opportuniste. Selon lui, on crée chez les hommes politiques catholiques un “syndrome de minoritaires”, qui les pousse à rechercher la protection de groupes plus grands et plus forts. “Cet opportunisme n’est pas seulement antidémocratique, il s’oppose à nos valeurs morales chrétiennes. Nous devons viser à faire ce qui est le mieux pour l’ensemble du pays
Key-Timu est également un membre actif du “Petisi 50”, groupe de cinquante personnalités : hommes politiques, généraux en retraite et intellectuels, étiquetées par Jakarta comme dissidents et figurant parmi les quatre mille citoyens indonésiens que le gouvernement empêche de quitter le pays. Mais, ajoute Key-Timu, “ce n’est pas parce que notre intérêt est menacé que notre lutte pour la démocratie va s’arrêter. C’est la démocratie qui est notre stratégie fondamentale, quel qu’en soit le prixA son avis, les catholiques font partie intégrante de l’Indonésie et doivent s’appliquer à un dialogue honnête avec les gens de toutes les religions. “C’est l’absence de dialogue qui a fait naître des préjugés aveugles entre les groupes religieux
Directeur du service recherche et développement au quotidien catholique “KompasDaniel Dhakidae souhaite, lui, une évaluation plus réaliste de la géographie politique actuelle. “Je ne pense pas que ce soit les musulmans qui contrôlent la politique. Ce sont des musulmans laïcs de JavaDhakidae nie également que l’islam soit une menace pour les groupes minoritairesA force de regarder l’islam comme une menace, il en deviendra une parce que nous en viendrons à vivre avec cette obsession
Emmanuel Subangun, directeur d’Alocita, fondation catholique de recherche de Surabaya, Java de l’Est, souligne que les idées du “Centre d’études stratégiques et internationales”, dont les membres sont connus pour leur complexe de minoritaires, ne sont pas celles de l’ensemble des catholiques. “Malheureusement, les non-catholiques confondent souvent les idées de ce Centre avec la position catholique. Il est temps de rappeler qu’il n’est qu’un institut de recherche, sans qualité représentative
Fondé dans les années 60 par quelques personnalités politiques catholiques et par des généraux de l’armée, le “Centre d’études stratégiques internationales” a joué un rôle de groupe de réflexion auprès du gouvernement de l’ordre nouveau du président Suharto. Son influence dans l’administration passe pour avoir décliné depuis le milieu des années 80.