Eglises d'Asie

Derrière les polémiques entre intellectuels musulmans, une compétition pour l’influence sur les masses

Publié le 18/03/2010




Au cours des derniers mois, les débats de certains séminaires portant sur des aspects à première vue peu sensibles de l’islam ont tourné en aigres joutes verbales, voire en insultes, entre les islamologues formés en Orient et les islamologues de formation occidentale. Ces affrontements, apparemment motivés par des points minimes de doctrine ou de méthode, s’expliquent en réalité, au dire d’un intellectuel musulman, Djohan Effendi, chef du service Recherche et développement au ministère des affaires religieuses, par une rivalité politique en vue d’obtenir la faveur du gouvernement et l’influence sur les 155 millions de musulmans d’Indonésie.

Les intellectuels islamiques formés en Occident sont très nombreux dans les institutions gouvernementales. Effendi voit là le signe qu’ils sont à présent en faveur, peut-être parce qu’ils sont perçus comme des modérés. Quant à l’influence sur les communautés musulmanes, selon lui aucun des groupes qui rivalisent pour démontrer leur maîtrise dans l’interprétation du saint Coran ne gagne ainsi la moindre audience : “Le musulman moyen a peu d’instruction et ne s’intéresse pas aux débats des intellectuels. Il voit sa religion dans la perspective de sa vie quotidienne, pas à partir de théories. Les communautés musulmanes ne se soucient en rien des questions philosophiques ou théologiques disputées entre les deux groupes d’islamologues

Projokusumo, vice-président du Conseil islamique indonésien des intellectuels, partage les vues d’Effendi. “Faire parade de son brio intellectuel, c’est rechercher la popularité à peu de fraisnous a-t-il déclaré. “Notre Conseil reste en dehors de ces polémiques. Selon nos dirigeants, elles trahissent une crise de foi chez les intellectuels islamiques des deux bords

Cependant, pour Abdurrachman Wahid (9), président du Nahdlatul Ulama, qui passe pour la plus grande organisation socio-religieuse islamique d’Indonésie, les études religieuses qui alimentent la réflexion sont bénéfiques pour les musulmans, dès lors qu’aucun préjugé ne s’en mêle, et les débats critiques sur l’étude de l’islam peuvent contribuer à la vigueur de la pensée chez les intellectuels musulmans. Wahid, qui a lui-même étudié au Moyen-Orient et en Europe, pousse donc les islamologues musulmans à se réconcilier pour édifier ensemble une pensée islamique vivante, accordée aux défis du présent. “Si les esprits des deux groupes se montrent magnanimes, ils peuvent enrichir la pensée islamique indonésienne en faisant la synthèse des idées développées au Moyen-Orient et en Occident. Ainsi revigoré, l’islam d’Indonésie pourrait apporter beaucoup au monde islamique