Eglises d'Asie

Dans le Tamil Nadu, les fondamentalistes hindous s’en prennent aux chrétiens

Publié le 18/03/2010




Le 12 septembre 1993, dans le diocèse de Kottar, une église catholique a été rasée par un groupe de membres du RSS (“Rashtryia Swayamsevaka Sangha”: organisation fondamentaliste hindoue qui travaille en rapport très étroit avec le BJP, parti politique d’extrême droite). Les militants avaient à leur tête un certain Ravindram, secrétaire local du BJP. Le curé et les chrétiens de l’endroit n’ont pas voulu porter plainte car ils savaient la police et les autorités civiles noyautées par le RSS. Ils ont préféré, avec l’aide de catholiques venus des villages voisins, construire le jour même, sur l’emplacement de leur ancienne église, une hutte de branchages qui leur sert désormais de lieu de culte.

Trois jours plus tard, le 15 septembre 1993, dans le village de Manalikhuzivilai, avait lieu la sépulture d’un catholique. Conduits par les responsables de l’arrondissement de Thuckalay, des membres de la police et de l’administration civile entrèrent dans l’église, insultèrent les femmes présentes et allèrent jusqu’à faire rouler sur le sol le corps du défunt.

Ce village de Manalikhuzivilai, situé dans le district de Kanyakumari, à l’extrême pointe de l’Inde, rassemble 130 familles chrétiennes. Tous les habitants du village sont chrétiens. Depuis 68 ans, la paroisse possède une petite église et un prêtre y réside depuis 1989.

Tout s’est bien passé jusqu’au milieu de 1990, quand des membres du RSS, venus de la ville voisine de Vazhuthanampallam, se sont opposés à un projet du curé de Manalikhuzivilai qui voulait construire une école maternelle dans sa paroisse. On accusait le prêtre de vouloir transformer le bâtiment en église.

Poussée par le BJP et le RSS, l’administration du district ordonna la démolition de l’église et de l’école maternelle, sous prétexte que l’une et l’autre étaient causes de désordre au sein de la population. Les chrétiens portèrent alors l’affaire devant la Cour suprême. Celle-ci la renvoya à la Haute cour de Madras qui ordonna de rapporter l’ordre de démolition et de faire une nouvelle enquête. C’est alors que les autorités civiles du district ont pris les chose en main. De leur côté, le curé de la paroisse, l’évêque de Kottar, l’archevêque de Madurai (président de la Conférence épiscopale régionale) portèrent l’affaire jusqu’au plus hautes instances de l’Etat du Tamil Nadu. Un homme politique, M. Kumaradas, se joignit à eux pour réclamer la révocation de l’ordre de démolition. Le 15 juin 1993, le sénat des prêtres de Kottar appuya cette réclamation. Mais le 5 juillet suivant, les autorités civiles empêchaient la célébration d’un mariage catholique, sous prétexte que des membres du RSS s’y oposaient.

Le 31 juillet 1993, les catholiques de Manalikhuzivilai ont alors lancé un mouvement pour la défense de leur église et pour la liberté de religion auquel M. Kumaradas participe activement. Les autorités du district de Kanyakumari avaient autorisé la tenue d’une manifestation de protestation pour le 26 septembre 1993. Mais la veille, l’autorisation a été retirée. Sans se laisser intimider, 50 000 personnes se sont néammoins rassemblées. Alors seulement les autorités du Tamil Nadu se sont décidées à ouvrir une véritable enquête.

Devant l’attitude des responsables, les catholiques de l’endroit ne peuvent s’empêcher de penser qu’ils agissent en étroite collusion avec le RSS et le BJP. Selon l’hebdomadaire catholique de Madras, The New Leader, “leur idée était probablement de provoquer les minorités dans l’espoir de les pousser à la révolte et d’aider ainsi politiquement le BJP

En butte à toutes ces difficultés, les chrétiens de l’endroit trouvent cependant consolation dans le fait qu’une organisation de jeunesse hindoue a pris fait et cause pour eux contre le RSS.