Eglises d'Asie

Bouddhisme : un nouveau manifeste du vénérable Thich Huyên Quang

Publié le 18/03/2010




Un nouveau brûlot vient d’être lancé par le plus haut responsable du bouddhisme unifié, le vénérable Thich Huyên Quang (29), depuis sa pagode du Centre-Vietnam où il est exilé, “isolé de tous … surveillé par les forces de la sécurité d’Etat secrètement disposées tout autour des bâtiments, pour en défendre l’accès et en interdire la sortie…” (30). Le texte, daté du 20 novembre 1993 et intitulé “Déclaration du recteur par intérim de l’Institut de la propagation du Dharma”, a les apparences d’un document judiciaire. La première partie de ce véritable réquisitoire se présente sous la forme d’une liste de douze “attendus”. La seconde est composée de neuf conclusions qui sont autant de revendications adressées au pouvoir vietnamien.

Dans les premiers attendus, le patriarche commence par brosser un très sombre portrait du Parti communiste vietnamien, de son histoire depuis 1930 et du pouvoir prolétarien qu’il a exercé depuis 1945. Le religieux constate que ce pouvoir qui s’était donné deux ennemis irréconciliables, la religion et l’impérialisme capitaliste, n’en conserve plus qu’un, le premier des deux, puisque, depuis le rétablissement de l’économie de marché et l’ouverture économique, il s’est déjà réconcilié avec le second. Le jugement porté par le religieux est sans appel. Ce régime qui continue à suivre la voie du dogmatisme et du fanatisme, s’est déjà condamné au même sort que l’Union soviétique et les autres pays socialistes qui lui ont donné le jour.

Les attendus suivants concernent surtout l’Eglise bouddhique unifiée. Ils soulignent d’abord que l’histoire de cette institution s’inscrit dans la tradition du véritable bouddhisme vietnamien. Ils retracent ensuite les diverses étapes de la lutte entreprise par cette Eglise depuis la mort du vénérable Thich Dôn Hau au mois d’avril 1992 pour recouvrer son indépendance. Ils soulignent le retentissement international de cette lutte. Par contre, les revendications des bouddhistes n’ont jusqu’à présent trouvé aucun écho auprès des autorités vietnamiennes qui ont au contraire renforcé leur terrorisme. Celles-ci ont récemment répandu des calomnies contre le testament du vénérable Thich Dôn Hâu, et interdit la célébration de l’anniversaire de la mort du religieux.

Le vénérable Thich Huyên Quang estime aussi que, même si le Bouddhisme unifié est le plus atteint, toutes les religions sont également victimes de l’oppression gouvernementale. Il mentionne au passage l’opposition des autorités à la nomination de Mgr Huynh Van Nghi comme administrateur apostolique de Hô Chi Minh-Ville.

Certaines des neuf revendications qui forment la seconde partie de la déclaration concernent plus particulièrement l’Eglise dont le vénérable Thich Huyên Quang est patriarche. Elles appellent l’Etat vietnamien a cesser immédiatement la persécution et à reconnaître le Bouddhisme unifié comme la seule et unique institution responsable de l’animation spirituelle du bouddhisme vietnamien. En particulier, les autorités sont invitées à cesser leurs attaques contre le bureau en exil de l’Institut pour la propagation du Dharma. Le procès du 15 novembre 1993 qui a condamné quatre religieux et cinq fidèles bouddhistes doit être jugé à nouveau en donnant tous ses droits à la défense et en ouvrant les portes du tribunal aux observateurs étrangers, ce qui a été refusé lors du premier procès.

Les plus importantes des revendications ont rapport à la démocratie. Le religieux appelle de ses voeux la formation d’une véritable société civile, dont les religions formeront les fondements. Cette société civile est le seul vrai rempart contre le pouvoir totalitaire. Le communiqué propose de plus des mesures concrètes pour ramener le Vietnam vers la démocratie : abandonner l’article 4 de la constitution qui place le Vietnam sous le patronage du marxisme; procéder, avec les garanties de liberté nécessaire, à l’élection d’une Assemblée nationale où soient représentées toutes les orientations politiques du pays; rédiger et faire voter une nouvelle constitution adaptée aux exigences démocratiques nouvelles.