Eglises d'Asie

Le silence des organisations religieuses sur les violations des droits de l’homme soulève des critiques

Publié le 18/03/2010




Les intervenants au “Forum indonésien pour les droits de l’homme” du 4 décembre 1993 ont été unanimes à déplorer le mutisme des corps religieux sur les violations des droits de l’homme rapportées par la presse. Ainsi les chefs religieux n’ont-ils rien eu à dire quand furent connus l’exécution par les forces de sécurité de membres d’une secte islamique à Java occidental et de quatre paysans de Madura, ou l’assassinat de Marsinah, dirigeante ouvrière de Java oriental.

Le Père Franz Magnis-Suseno, recteur des facultés catholiques de philosophie et de théologie Driyarkara de Jakarta, a dit aux participants du forum que la lutte pour les droits de l’homme est un combat contre le totalitarisme, qui s’enracine dans la négation de la dignité transcendante des êtres humains, créés à l’image de Dieu. Or si les droits de l’homme viennent ainsi directement de Dieu, a ajouté le jésuite, aucun groupe, aussi puissant soit-il, ne peut attenter aux droits d’un autre groupe.

Abdurrachman Wahid, président de l’organisation islamique Nahdlatul Ulama, la plus importante organisation musulmane du pays (5), a expliqué pourquoi les chefs religieux ne semblent plus aussi populaires. Les gens s’intéressent davantage aux militants des droits de l’homme parce que, selon lui, ceux-ci “ont fait l’expérience de la souffrance dans les prisons et ont prouvé leurs paroles par leurs actes“.

Au cours de la même réunion, le Révérend Soritus A.E. Nababan, ancien évêque de l’Eglise protestante Batak (6), a dit que beaucoup de chefs religieux n’ont pas grande connaissance des droits de l’homme, “par indigence spirituelle et théologique“. Selon lui, ils se sont laissé enfermer dans des traditions et des activités ritualistes qui ne laissent qu’une foi rabougrie et de l’étroitesse d’esprit. Et les organes religieux répugnent aussi à élever la voix au sujet des violations des droits de l’homme parce que cela les expose aux interventions de l’Etat.

Dans une déclaration publiée à l’issue de ses débats, le forum demande aux groupes religieux de s’engager contre les abus de pouvoir déshumanisants, d’affirmer leur indépendance vis-à-vis des interventions du gouvernement. Le forum souligne aussi que les corps religieux ne doivent pas seulement combattre pour leurs propres causes, mais aussi pour améliorer le sort de tous ceux qui aspirent à une société bonne et civilisée. La déclaration a été signée au nom de tous les militants du forum par un musulman, deux catholiques et un protestant.