Eglises d'Asie

INTERVIEW DE M. VU QUANG DIRECTEUR DU BUREAU DES AFFAIRES RELIGIEUSES A PROPOS DES RECENTES NEGOCIATIONS AVEC LE SAINT-SIEGE

Publié le 18/03/2010




Pourriez-vous nous faire connaître l’état des relations entre le Vatican et le Vietnam ?

Le Vatican est pratiquement une nation; le Vietnam est aussi une nation souveraine. En 1990, une délégation du Vatican conduite par le cardinal Etchegaray était venue en visite au Vietnam pour la première fois. A la suite des négociations menées alors, il y avait eu accord sur les points suivants:

Sur toutes les questions concernant l’Eglise catholique du Vietnam, le Saint-Siège devrait informer le gouvernement vietnamien et ne prendre une décision qu’après l’accord de celui-ci. Ces dispositions concernaient aussi bien les prises de position du Saint-Siège, les consécrations de cardinaux (sic), d’évêques, d’administrateurs, que d’autres affaires intéressant les deux parties.

Lorsque les deux parties auraient des opinions divergentes, elles se rencontreraient directement pour échanger et discuter.

Depuis lors, par quatre fois, le Saint-Siège a envoyé une délégation en mission au Vietnam; pour sa part, le gouvernement vietnamien en a envoyé une au Vatican. Par ailleurs, dix-huit évêques ont été consacrés après que le SaintSiège en eut informé le gouvernement et qu’il eut reçu son accord. Ainsi l’état des relations entre les deux parties progresse.

Au cours des récentes séances de négociation avec le Vatican, le côté vietnamien a affirmé à nouveau les accords précédents et Mgr Celli a déclaré que le Saint-Siège les approuvait. C’est sur cette base que les deux parties souhaitent développer des relations toujours plus satisfaisantes.

Quelles sont les questions dont se sont occupés le Vietnam et le Saint-Siège, cette fois-ci?

En fin de compte, on s’est surtout occupé de régler le problème des sièges vacants dans un certain nombre de diocèses du Vietnam. La délégation du Vatican a fait remarquer qu’il n’était pas normal de laisser des diocèses sans titulaires trop longtemps, pas plus que de laisser passer deux ou trois ans sans prendre de décision définitive au sujet des candidats proposés par le Saint-Siège et approuvés par le gouvernement. Les deux parties se sont accordées sur la nécessité de régler au plus vite cette situation de vacance de sièges.

Sur une proposition du Saint-Siège, le gouvernement a donné son accord pour des nominations à Hanoi et à Huê. Le gouvernement examinera le cas des évêchés de Hung Hoa et de Thanh Hoa et donnera sa réponse dans un bref délai.

La question cruciale, cette fois-ci, était celle de l’évêché de Hô Chi Minh-Ville. Les deux parties se sont accordées pour que Mgr Binh reste à son poste en gardant la totalité de ses responsabilités et de sa juridiction. La partie vaticane a informé que Mgr Nguyên Van Thuân recevrait le poste qui lui convient au Vatican; ce à quoi le gouvernement a donné son accord. La partie vietnamienne a proposé de mettre un terme au poste d’administrateur apostolique, poste créé hâtivement par le Vatican sans en avoir informé notre gouvernement. A cette occasion, Mgr Huynh Van Nghi a rencontré le Bureau des Affaires religieuses du gouvernement. Au cours de l’entretien, il a promis de se soumettre à la loi de l’Etat et de cesser toute activité pastorale à Hô Chi Minh-Ville. Au sujet du successeur de l’archevêque de Hô Chi Minh-Ville, notre gouvernement en discutera avec le Vatican en se conformant à l’orientation suivante: le prochain archevêque devra poursuivre une ligne qui favorise l’harmonie entre le sacré et le profane, ligne que l’archevêque Mgr Nguyên Van Binh a mise en pratique jusqu’à présent.

Quelle est la position du Vatican au sujet du Comité d’union du catholicisme?

La délégation vietnamienne a clairement déclaré au cours des entretiens, que la décision d’exiger des prêtres vietnamiens qu’il ne participent pas au Comité sous prétexte qu’ils ne doivent pas faire de politique, n’était pas adaptée au Vietnam, violait la législation vietnamienne ainsi que les droits civiques et humains des prêtres qui ont le droit de participer aux associations sociales et aux activités patriotiques.

Le chef de la délégation vaticane a répondu ainsi: le Saint-Siège ne proteste pas au sujet des prêtres qui participent aux organisations sociales et aux activités utiles au pays. Le Saint-Siège ne fait qu’interdire aux prêtres de participer aux organisations et aux activités politiques partisanes. La participation au Comité d’union est question de volontariat pour les prêtres. Le Saint-Siège est loin du Vietnam; il ne saisit pas pleinement la situation, c’est pourquoi il confie aux évêques la décision en ce domaine.

Pouvez-vous nous faire connaître quelle est l’opinion des évêques vietnamiens en ce domaine?

Le bureau des Affaires religieuses a rencontré le président, le secrétaire général de la Conférence épiscopale; il leur a réitéré l’opinion du gouvernement concernant le Comité d’union du catholicisme; il a estimé que les évêques ne devaient pas empêcher les prêtres de participer à cette organisation mais, au contraire, de mettre en pratique la déclaration de Mgr Nguyên Minh Nhât, lors d’une rencontre avec le gouvernement à l’occasion de la récente réunion de la conférence épiscopale: « Il s’agit d’une vieille affaire (); la conférence épiscopale ne défend pas aux prêtres de participer aux activités du Comité à condition qu’ils accomplissent leur ministère pastoral ».

A cette occasion, j’ajoute que lors de notre travail avec la délégation du Saint-Siège nous avons franchement fait remarquer que, tandis que le Saint-Siège s’oppose à la participation des prêtres vietnamiens aux activités du Comité d’union et des organismes sociaux issus du suffrage populaire, appelées par lui activités politiques, en revanche, il laisse, sur son territoire et dans des pays étrangers, un certain nombre de prêtres vietnamiens mener une activité politique contre le Vietnam; ainsi, Mgr Tran Van Hoai qui appelle les représentants à l’étranger des cinq religions vietnamiennes à se rassembler pour diffamer et calomnier le gouvernement vietnamien. Mgr Hoai incite et encourage les fidèles catholiques vietnamiens à l’étranger a renforcer leurs activités politiques conte le Vietnam et considère qu’il s’agit là d’activités apostoliques. De tels actes, en témoignant de l’absence de bonne volonté à l’égard du Vietnam constituent un obstacle à la normalisation des relations entre les deux parties. Mgr Celli a promis qu’il ferait part aux responsables du Vatican des remarques précédentes pour trouver des mesures qui puissent éliminer les obstacles sur la route de la mise en place de relations normales entre le Saint-Siège et le gouvernement du Vietnam.

Quelle est votre appréciation des résultats obtenus au cours de ce voyage de la délégation du Saint-Siège?

Les deux délégations ont affirmé que ces résultats étaient positifs. Leur dialogue a eu lieu dans un climat de bonne volonté, de franchise, de compréhension et de respect mutuels. Des deux côtés, on s’est efforcé de collaborer en vue d’éliminer progressivement les obstacles aux relations mutuelles. Dans cet esprit, le Saint-Siège et le Vatican pensent que ce dernier voyage a fait progresser l’état de leur relations.