Eglises d'Asie

L’Action catholique ouvrière se penche sur le problème des enfants au travail

Publié le 18/03/2010




Après le Bureau international du travail (BIT) et d’autres organisations non gouvernementales (4), c’est l’Action catholique ouvrière (ACO) qui, à son tour, se penche sur le sort des enfants au travail. Du 8 au 10 mars 1994, elle a organisé à Delhi une consultation nationale sur les moyens concrets susceptibles d’éliminer peu à peu ce problème.

Pour l’ACO, ce problème des enfants au travail concerne avant toute la classe ouvrière. Lorsque, dans une famille, les parents sont au chômage ou sous-employés, ils sont prêts à accepter n’importe quel travail pour leurs enfants. Ces derniers peuvent alors subvenir à leurs propres besoins et parfois rapporter quelque argent à la maison. L’envers de la médaille est qu’ils sont privés d’éducation, que leur santé est souvent affectée par les conditions difficiles dans lesquelles ils sont obligés de travailler et qu’ils ont devant eux un avenir d’adulte aux forces physiques et intellectuelles diminuées. Les syndicats, lorsqu’ils existent, ont tendance à considérer le travail des enfants comme un fait auquel on ne peut rien et leur action consiste surtout à obtenir des employeurs de meilleures conditions de travail.

Dans le courant de l’année 1992, une enquête avait permis d’établir un certain nombre de faits:

1/ Parmi les enfants au travail, les enfants de la rue forment la catégorie la plus isolée, celle dont les conditions de vie et de travail sont les plus difficiles : petits cireurs de chaussures, chiffonniers, mendiants. Ils sont prêts à faire tout ce qu’on leur demande : jouer les garçons de course, servir d’intermédiaires aux trafiquants de drogue ou devenir les jouets de pédophiles. Leur vie est marquée par l’insécurité : sans logement fixe, sans défense, ils sont facilement victimes aussi de la police qui n’hésite pas à les emprisonner ou à leur imposer des amendes injustifiées. Les filles doivent subir enlèvements et violences sexuelles. Ces enfants vivent dans l’instant présent, sans penser au lendemain.

2/ Les enfants des familles pauvres se voient, dès leur plus jeune âge, confier toutes sortes de travaux domestiques. Très tôt, ils doivent aller au travail. Les filles doivent s’occuper de leurs frères et soeurs plus jeunes ou de leurs neveux et nièces.

3/ Ces diverses catégories d’enfants au travail ont des problèmes communs : chaque jour, ils doivent travailler de longues heures ; ils sont souvent maltraités ; leur travail n’est pas apprécié ; ils manquent l’école et restent analphabètes ; ils ne connaissent aucun moment de loisir, sont la proie de l’ennui et de la fatigue.

4/ En raison de leur travail, ils sont exposés à un certain nombre de dangers : beaucoup d’enfants, ceux qui travaillent par exemple dans les fabriques d’allumettes, manipulent des produits chimiques. La plupart souffrent de troubles respiratoires ou d’infections des yeux. De longues heures passées dans des espaces étroits, renfermés et enfumés, sont à l’origine de cas de tuberculose, de maladies de peau, de fatigue ou de brûlures. Les enfants occupés à tisser des tapis doivent passer leurs journées accroupis dans des réduits surchauffés, mal aérés, mal éclairés. Leur vue finit par en être affectée, leur croissance ne se fait pas normalement et au bout de quelques années, ils souffrent de difformités impossibles à corriger. Les enfants chiffonniers se blessent avec les tessons de bouteilles ou les morceaux de métal qu’ils ramassent: les maladies de peau sont fréquentes et les cas de gangrène ne sont pas rares. Des garçons et des filles sont employés dans les cirques où les accidents sont fréquents. La prostitution enfantine propage les maladies vénériennes et le sida.

Après des échanges sur les résultats de l’enquête menée en quatre pays de l’Asie du Sud, la consultation nationale a formulé plusieurs recommandations:

– mesures sociales : que l’on aide les enfants au travail à s’organiser et à sortir de leur isolement. Des groupes de volontaires pourraient se lancer dans cet “apostolat”, en invitant les enfants à se prendre eux-mêmes en charge. On propose encore que des travailleurs sociaux mettent en train des programmes d’éducation, de formation, d’hygiène, de nutrition, de récréation.

– mesures législatives : la législation actuelle est loin d’être au point. La loi indienne de 1986 sur l’emploi de jeunes ne mentionne ni les employés domestiques, ni les travailleurs agricoles. On demande donc qu’une législation donne aux agences locales accréditées pour le travail social, le pouvoir de se livrer effectivement à des inspections et de faire respecter la loi.

Le groupe a été unanime à reconnaître que ce problème du travail des enfants est lié à la pauvreté et au chômage. Les employeurs exploitent la situation. Le gouvernement et le public doivent venir au secours de l’enfance victime de l’injustice. Sinon ce problème continuera d’empoisonner la société. L’ONU et le BIT ont, ces derniers temps, joué un rôle important dans la prise de conscience de ce problème de l’enfance au travail. Les pays du tiers monde, où cette réalité fait partie de la vie ont déjà fait quelque chose : un début de législation a été mis en place, des programmes ont été lancés pour adoucir la situation des enfants et diminuer leurs souffrances. Et plusieurs organisations non gouvernementales sont très actives dans la recherche de moyens destinés à éliminer ce problème de l’enfance au travail.

L’ACO a établi à Madras un bureau dont le rôle sera d’orchestrer une campagne en faveur des enfants au travail, non seulement en Inde, mais aussi au Sri Lanka, au Bangladesh et au Népal.