Eglises d'Asie

Une controverse à propos de deux émissions de Radio Veritas

Publié le 18/03/2010




Si l’on en croit les déclarations publiques qui se succèdent, l’émission de Radio Veritas-Asie du 20 septembre 1994, consacrée au compte rendu de la réunion annuelle de la Conférence épiscopale vietnamienne, a provoqué chez ses auditeurs une émotion certaine. Au cours de l’émission, un prêtre d’origine vietnamienne avait commenté les travaux des évêques sur un ton des plus combatifs et sans cacher son inimitié à l’égard du régime. Il avait notamment affirmé qu’à l’occasion de cette assemblée « le pouvoir communiste avait, avec impudence et barbarie, fourré son nez dans les affaires intérieures de l’Eglise ». Il avait fait remarquer que les évêques avaient été forcés, au début de la réunion, d’aller présenter salutations et souhaits de prospérité à « leurs majestés, le secrétaire général et le premier ministre » et, à la fin, de leur remettre un rapport détaillé des discussions. Après avoir souligné que les communistes contrôlaient, limitaient et dirigeaient à leur guise les activités de l’Eglise, il en avait conclu qu’ils avaient « nationalisé » l’Eglise vietnamienne.

C’est le Bureau des affaires religieuses qui a réagi le premier, deux semaines plus tard, dans une lettre envoyée le 4 octobre 1994 à un certain nombre de personnes, parmi lesquelles le président et le secrétaire de la Conférence épiscopale du Vietnam ainsi que les deux archevêques du pays. Le directeur du Bureau, M. Vu Quang, y faisait connaître son irritation. Il dénonçait Radio Veritas-Asie pour s’être permis de calomnier et de critiquer l’Etat et l’Eglise catholique du Vietnam, alors que cette radio  » est membre du Conseil pontifical de la communication sociale, que son personnel est nommé par le Saint-Siège et responsable devant lui » (18). A son avis, l’émission en question était animée par la volonté de saboter les bonnes relations que l’Etat vietnamien entretient aujourd’hui aussi bien avec le Saint-Siège qu’avec la communauté catholique du pays. D’une manière ou d’une autre, les remontrances du gouvernement vietnamien furent transmises aux principaux intéressés puisque, quelque temps plus tard, le directeur des programmes de Radio Veritas-Asie, qui est aussi le responsable direct des émissions en langue vietnamienne, se rendait au Vietnam avec deux lettres d’excuses, datées du 19 octobre, l’une pour le Bureau des affaires religieuses du gouvernement, l’autre pour les responsables religieux. L’hebdomadaire « Catholicisme et Nation », a publié les fac-similés des deux lettres, accompagnés d’un article mettant en garde les catholiques vietnamiens de la diaspora contre toute ingérence dans les affaires intérieures de l’Eglise locale.

Cependant l’affaire ne s’est pas arrêtée là. Les excuses du directeur des programmes ne concernaient que l’émission du 20 septembre. Or, avant même cette démarche, l’auteur des propos jugés infamants pour l’Etat et l’Eglise du Vietnam, loin de revenir à de meilleurs sentiments à l’égard des autorités vietnamiennes, avait récidivé. Le 11 octobre, dans une émission commentant les interventions de deux évêques vietnamiens au synode, il a critiqué une affirmation contenue dans l’exposé de Mgr Nguyên Van Hoa, évêque de Nha Trang. Celui-ci ayant fait remarquer que l’Eglise du Nord avait eu beaucoup de mal à se remettre de l’exode massif des catholiques en 1954, le commentateur de Radio Veritas répliquait que la véritable cause du malheur de l’Eglise au Nord-Vietnam, comme d’ailleurs au Sud-Vietnam, était l’oppression exercée sur elle par « un régime dictatorial et athée ».

Dans un communiqué publié à l’issue d’un débat sur ce thème, le 4 novembre dernier 1994, l’Union des religieux, qui regroupe des représentants de toutes les congrégations religieuses de Hô Chi Minh-Ville (19), a elle aussi rendu publiques ses réactions. Après avoir fait part de certains sentiments d’indignations exprimés au sein de l’Union des religieux, le communiqué poursuit : « Nous respectons la liberté de pensée et les positions politiques de nos frères, les catholiques vietnamiens à l’étranger. Nous sommes même impressionnés par la solidarité dont ils font preuve à l’égard de la patrie et de l’Eglise vietnamiennes. Cependant nous souhaitons que nos frères à l’étranger respectent et comprennent notre choix de rester ici et d’y servir le Seigneur, l’Eglise et nos compatriotes dans n’importe quelle situation … »