Eglises d'Asie

L’arrestation en 1994 de trois prêtres engagés dans la lutte pour la reconnaissance des droits des dalits a été connue avec retard

Publié le 18/03/2010




La presse indienne, tant nationale que régionale, semble avoir passé sous silence l’arrestation, en octobre et en décembre 1994, de trois prêtres coupables d’avoir épousé la cause des dalits. Le premier incident date du 10 octobre 1994. Ce jour-là, le P. Y. Lourdunathan, sj, était arrêté par la police de la ville de Chenglepet. Quelque 5 000 dalits s’étaient en effet rassemblés devant les bureaux du chef de district pour demander que leur soient rendues des terres qui, disaient-ils, leur avaient été attribuées en 1890 par l’administration britannique. Ces terrains – il s’agit d’environ 50 000 hectares – seraient actuellement aux mains de non-dalits, des fonctionnaires et des politiciens pour la plupart. Au cours de la manifestation du 10 octobre, la police avait tiré dans la foule, faisant deux morts (dont un jeune catholique) et une cinquantaine de blessés.

Selon des sources d’origine religieuse, le P. Lourdunathan ne participait pas à la manifestation. “Ce n’est pas pour un délit quelconque que nous l’avons arrêté. C’était une mesure préventive”, dit le responsable de la police de Chenglepet. Le 6 octobre 1994, les dalits avaient érigé sur les terres contestées une statue d’Ambedkar, champion des dalits avant et après l’indépendance. Dès le lendemain, la statue était enlevée par la police.

Le second incident s’est déroulé le 5 décembre 1994. Les pères B.P. Martin et A. Neethinathan, qui travaillent dans le district de Chenglepet, archidiocèse de Madras, ont eux aussi fait l’objet d’une “arrestation préventive” par la police du district. Selon des sources religieuses de Pondichéry, ils étaient accusés d’avoir, en compagnie d’un groupe de dalits, attaqué la police. On les tenait aussi pour responsables des désordres créés par les dalits. Le P. Neethinathan est directeur d’un centre d’aide sociale à Chenglepet. Les deux prêtres ont été libérés trois jours plus tard. A sa sortie de prison, le P. Neethinathan a déclaré qu’il avait été arrêté sans raison et que les responsables de la police lui avaient dit avoir reçu des ordres “d’en-haut”. Il regrette aussi que l’Eglise ait “gardé le silence” sur cette affaire. Il aurait reçu instruction de ne pas donner l’impression que les catholiques sont contre le gouvernement.