Eglises d'Asie

Mgr Nguyên Minh Nhât: l’édification de l’homme est encore à l’ordre du jour

Publié le 18/03/2010




Invité par l’hebdomadaire “Le catholique vietnamien” (11) à dresser un bilan des vingt années écoulées depuis la fin de la guerre au Vietnam, le président de la Conférence épiscopale vietnamienne, Mgr Nguyên Minh Nhât, évêque de Xuân Lôc, a passé sous silence les premières années de socialisme au Sud. Il s’est contenté de souligner, à la fin de l’interview, que durant des dizaines d’années, les Vietnamiens sont allés beaucoup plus lentement que les autres. Par contre, il s’est réjoui du changement qui s’est produit à la fin des années 80, époque où la levée d’un certain nombre de contraintes administratives et économiques a marqué selon lui le début d’un vrai développement du Vietnam. “Grâce à l’ardeur traditionnelle de nos compatriotes, à peine les a-t-on débarrassés des anciennes institutions paralysantes que le développement s’est mis en marcheIl s’est montré satisfait de la rapide évolution du niveau de vie en ville comme dans les campagnes et a souhaité que la réforme d’une administration encore “écrasante” se poursuive pour aboutir à l’établissement d’un Etat de droit.

Selon le président de la Conférence épiscopale, la vie religieuse des catholiques est encore soumise à trop de limitations, en particulier celles qui touchent l’ordination, la nomination et le déplacement des prêtres, le recrutement des séminaristes pour les séminaires diocésains et celui d’aspirants religieux pour les divers ordres et congrégations. Par ailleurs, Mgr Nhât s’est refusé à dissocier, comme on le lui demandait, les contributions des catholiques au développement du pays de celles de tous leurs autres compatriotes. Ce type de bilan relevant les activités spécifiques des catholiques au service de leur pays est souvent dressé lors des réunions annuelles de diverses associations catholiques patriotiques. Il s’agit là de compte-rendus peu fiables et souvent injustes. Selon l’évêque de Xuân Lôc, lorsque les chrétiens “‘vivent l’évangile au sein de leur peuple’, ils ne séparent pas une activité qu’ils mèneraient en tant que catholiques d’une autre qu’ils accompliraient en tant que citoyens.” Le développement du pays est une oeuvre commune à laquelle participent les catholiques, qui n’appartient en propre à personne et que personne ne peut revendiquer même en partie.

C’est dans la dernière partie de l’interview que Mgr Nhât a abordé le point le plus important de son intervention touchant au rôle que le christianisme peut jouer dans la période particulière que traverse la société vietnamienne. Il a d’abord exprimé des craintes suscitées par l’évolution actuelle de la société: “… Si nous continuons à ne privilégier que les réformes économiques en oubliant d’exalter l’édification des valeurs morales, nous ressemblerons à ceux qui construisent une maison sans fondation “. A ce propos, il a énuméré les divers maux dont souffre la société vietnamienne: absence de conscience, recherche du profit à tout prix, concussion, vol. De plus il a noté chez certains responsables un manque de respect pour la loi et l’habitude d’utiliser à leur profit les avantages de leur situation.

Tous ces comportements relèvent d’une même cause, l’absence de fondements moraux. D’une façon voilée, l’évêque a suggéré que les idéaux chrétiens pouvaient remplacer d’autres idéologies aujourd’hui défaillantes. Il a en effet rappelé qu’autrefois lorsqu’il s’agissait d’édifier le socialisme, on disait qu’il fallait édifier des “hommes socialistes”. Il a ajouté: “Aujourd’hui, dans le cadre de l’économie du marché, je pense que l’édification de l’homme reste à l’ordre du jour… Si l’on veut une société où règnent prospérité, progrès et civilisation, l’homme doit respecter les valeurs morales et le droit. Sur ce point, le catholicisme apportera une contribution positive à la société pour y faire naître un nouveau type d’homme.