Eglises d'Asie

Le gouverneur du territoire entend maintenir les conditions d’octroi du permis de construire des mosquées

Publié le 18/03/2010




Le décret du gouverneur de la province de juillet 1995, subordonnant l’autorisation de construire une mosquée à un accord du clergé catholique local, a suscité des réactions en milieu musulman, tant à Dili que dans la capitale indonésienne. “Le décret doit être modifié, a déclaré le vice-président de la commission nationale des droits de l’homme, Marzuki Darusman, sous peine de prolonger les malentendus entre les communautés religieuses de Timor OrientalAu moment où le conseil indonésien des oulémas se préoccupe de faire réparer les mosquées et les petites maisons de prières (mushalla) endommagées lors des récents désordres, son président, Hasan Basri, estime “inadmissible qu’il faille pour cela attendre la permission du curé catholiqueD’autres organisations ont accusé le nouveau règlement d’être discriminatoire à l’égard de la minorité musulmane de Timor Oriental et de chercher à y freiner le développement de l’islam.

Ces réactions ont pour arrière-plan les récents transferts d’immigrants indonésiens musulmans dans l’ancienne province portugaise. Leur conflit avec la population catholique largement majoritaire avait été à l’origine des flambées de violences de septembre dernier (17).

C’est probablement ce contexte qui a donné un caractère potentiellement explosif au récent règlement sur la construction des lieux de culte. Le 8 novembre, le ministre des affaires intérieures d’Indonésie, Yogi S. Memed, a ordonné au gouverneur de Timor Oriental, Abilio Jose Osorio Soares, d’annuler son décret n°19/1995 de juillet, prétextant que celui-ci omettait de faire référence au décret conjoint des ministres de l’intérieur et des affaires religieuses d’Indonésie de 1969 sur la construction des bâtiments de culte.

M. Soares, s’adressant le 10 novembre aux journalistes dans le district de Viaqueque de Timor Oriental, a fait part de son intention de réviser les termes de la réglementation, sans toutefois l’abolir. Celle-ci, a-t-il expliqué, a seulement complété le décret ministériel conjoint de 1969, qui exige, pour l’autorisation de construire un bâtiment cultuel, “une recommandation des chefs religieux de l’endroit”. “Comme nous sommes à Timor Oriental, dont la population est à quatre-vingt-dix pour cent catholique, les mots ‘chefs religieux’ ont été explicités par ‘clergé de la paroisse’. Si ces derniers termes sont la cause de la controverse, je puis les supprimer dans mon décret et reproduire telle quelle la disposition contenue dans le décret ministériel de 1969.”

Répondant à l’accusation selon laquelle son décret de juillet dernier cherchait à stopper le développement des groupes religieux minoritaires, spécialement des musulmans, M. Soares a demandé aux critiques qu’ils s’en prennent plutôt au décret de 1969, qu’il s’est contenté de compléter. “Je devine, dit-il, que ses rédacteurs songeaient à défendre la majorité islamique. Maintenant qu’il est appliqué à Timor Oriental, où le catholicisme est majoritaire, les dirigeants musulmans ne l’acceptent plus et le gouvernement central est enfermé dans un dilemme” .

A Jakarta, Abdurrachman Wahid, chef de la plus grande organisation socio-religieuse islamique d’Indonésie, le Nahdlatul Ulama, a dit que les protestataires musulmans devraient songer que, dans les provinces à majorité musulmane, ce sont les chrétiens qui affrontent ces mêmes difficultés lorsqu’ils veulent obtenir pour leurs églises un permis de construire. Armindo Soares Mariano, chef du comité “Timor Oriental” du parti au pouvoir (Golkar), a déclaré au début de novembre : “Le décret du gouverneur du mois de juillet ne prête pas à discussion. Ce sont les édifices de culte non catholiques, dont beaucoup ont été construits sans l’autorisation du gouvernement local, qui alimentent la tension entre la population locale et les immigrés

Mgr Belo, administrateur de Dili, partage cet avis. Il rappelle en outre qu’avant l’annexion de Timor Oriental par l’Indonésie en 1976, le diocèse de Dili a aidé les musulmans de la capitale provinciale à bâtir une mosquée au village Alo de Dili.