Eglises d'Asie

De jeunes médecins en chômage dans les villes du Vietnam

Publié le 18/03/2010




Selon l’Organisation mondiale de la santé, les pays en voie de développement devraient s’efforcer de se doter d’une proportion d’environ 10 médecins par 10 000 habitants. Le Vietnam est bien loin d’avoir atteint un tel pourcentage. La proportion nationale n’est seulement que de 4,07 médecins pour 10 000 habitants, moins de la moitié du chiffre préconisé par l’organisation internationale. C’est à Hô Chi Minh-Ville que se trouve la plus forte concentration de médecins du pays. Selon les statistiques du ministère de la santé de 1994, la ville abrite 2 601 médecins pour une population de 4 322 000 habitants, à savoir 6,01 médecins pour 10 000 personnes. Ce pourcentage n’est que de 1,74 dans la province de Soc Trang. Il tombe même jusqu’à 1, 34 dans la province de Minh Hai (12).

Or, malgré cette pénurie de médecins plus particulièrement sensible dans les campagnes, beaucoup de jeunes médecins nouvellement diplômés n’arrivent pas à trouver du travail. Selon des informations fournies par le ministère de la Santé au mois de mai 1995, pour tout le pays il y a actuellement 2 144 jeunes médecins sans travail, dont 500 à Hô Chi Minh-Ville. Dans un rapport destiné aux services de santé de Hô Chi Minh-Ville, le docteur Trang Vinh Thuân, chargé d’étudier la répartition des médecins dans les années à venir, affirme que la principale raison de cet état de choses tient au fait que les jeunes diplômés ne veulent pas travailler ailleurs que dans les grands hôpitaux des grandes villes. Depuis cinq ans, les jeunes médecins doivent eux-mêmes chercher le poste où ils exerceront leur art. Dans leur grande majorité, ils refusent de choisir les campagnes, sous-équipées à tous les niveaux. Tout y manque, y compris l’élémentaire, comme l’eau, l’électricité, les moyens de communication, les possibilités de recyclage. En outre, les revenus d’un médecin y sont modiques et les jeunes diplômés craignent qu’une fois établis en province, ils ne puissent jamais plus revenir vers la ville.

L’attachement à la ville des nouveaux médecins est tel que plutôt que de chercher en province ou même en banlieue de Saigon un endroit où exercer ils préfèrent offrir leurs services gratuitement aux grands hôpitaux de la ville. Il arrive même qu’ils soient obligés de payer 1,5 taël d’or à leur première embauche, puis 1,3 taël les années suivantes jusqu’au moment où ils reçoivent enfin le statut officiel de médecin hospitalier et un traitement convenable. En attendant, il n’y a entre eux et l’hôpital qui les emploie aucun acte officiel, pas même un contrat tacite. Ce type de volontariat a reçu une appellation ironique, tirée du vocabulaire religieux bouddhique, désignant l’acte gratuit accompli en vue d’obtenir des mérites “Công Qua”.

Un certain nombre de mesures viennent d’être prises pour remédier à cette désastreuse situation. En octobre 1995, les services de la santé de Hô Chi Minh-Ville ont lancé une campagne pour attirer les jeunes diplômés de la faculté de médecine vers les dispensaires des régions reculées de l’agglomération, en leur promettant un traitement complet de médecin débutant et la possibilité d’acquérir une clientèle privée en dehors des heures de travail du dispensaire, et, enfin, en leur donnant l’espoir être intégrés dans un poste officiel en ville après un minimum de trois ans de pratique dans un poste éloigné. Pour sa part, le ministère de la santé prépare un projet, imposant aux jeunes diplômés un service de 2 à 5 ans auprès des populations délaissées des régions des hauts plateaux du Centre ou des montagnes du Nord-Vietnam. Un certain nombre d’avantages pour la poursuite de leur carrière seront ensuite accordés à ceux qui se seront acquittés de cette obligation. Ceux qui s’y refuseraient seraient contraints de rembourser la totalité des frais engagés par l’Etat pour leur formation.