Eglises d'Asie

Relations difficiles entre employeurs coréens et ouvriers vietnamiens

Publié le 18/03/2010




Attirés par la main d’oeuvre bon marché, les entrepreneurs coréens ont, depuis 1989, créé au Vietnam un certain nombre d’ateliers et de petites usines, souvent en association avec des capitaux vietnamiens (10). Beaucoup de ces entreprises sont spécialisées dans la confection de vêtements et de chaussures. Cependant, rapidement, les ateliers à direction coréenne ont acquis une fâcheuse réputation: les conflits entre le personnel et les employeurs s’y sont multipliés. La plupart du temps, les mouvements ouvriers qui naissent à la suite de ces incidents sont répercutés par la presse et encouragés par le syndicat officiel du Vietnam (Doan Lao Dông). Selon une déclaration du ministère du Travail, des invalides de guerre et des affaires sociales, depuis 1989, année de l’ouverture économique, plus de cent grèves ont eu lieu au Vietnam. On en a compté vingt uniquement pour les six derniers mois de l’année 1995. La moitié d’entre elles ont touché des entreprises étrangères, en particulier les entreprises coréennes.

Au cours du mois de décembre 1995, la presse a relaté deux grèves qui, toutes les deux ont éclaté dans des établissements coréens. L’une a eu lieu le 5 décembre dans une entreprise de confection de vêtements, l’entreprise Ngoc Liên, située à Go Vap (Hô Chi Minh-Ville). Elle avait déjà connu un mouvement de grève au cours du mois d’août (11). Celle-ci s’est déclenchée lorsque les deux techniciens coréens contrôlant l’entreprise ont refusé de compter les heures supplémentaires effectuées par les employés les jours précédents et ont riposté aux revendications du personnel, par des mauvais traitements corporels et des injures grossières. Une autre grève a eu lieu la semaine suivante dans une entreprise coréenne de confection de chaussures, employant 600 ouvriers dans la province de Song Be (12). Les ouvriers protestaient contre le refus des employeurs de rétribuer les heures supplémentaires et de payer à son juste prix le travail effectué le dimanche. A cette occasion, la presse vietnamienne a accusé les employeurs coréens de pratiquer de trop bas salaires, d’exploiter les ouvriers et d’empêcher la création d’une section syndicale à l’intérieur de l’entreprise.

Un journaliste vietnamien, au cours d’un récent voyage en Corée, a rencontré le professeur Cho Jae Huyn, universitaire coréen connu (13), et lui a fait part de l’attitude brutale de ses compatriotes à l’égard de la main d’oeuvre vietnamienne. Celui-ci lui a répondu qu’il n’y avait là rien que de très normal et que la même situation régnait à l’intérieur des entreprises de Corée, fonctionnant sur le modèle militaire. Le rédacteur en chef de la revue “Công Giao và Dân Tôcle P. Truong Ba Cân, qui depuis quelque temps est chargé de la communauté catholique coréenne de Saigon, a fait allusion à ces propos dans un sermon prononcé le jour du Christ-Roi à la communauté catholique coréenne de Saigon, dont il a la charge. Le sermon tout entier, dont le texte intégral a été publié dans la revue, portait sur l’attitude des employeurs coréens. Le P. Cân y affirmait entre autres choses qu’à son avis l’opinion du professeur Huynh n’était pas partagée par tous les Coréens. Le prêtre espérait du moins que ce n’était pas l’opinion des catholiques coréens. Il a ensuite fait remarquer que l’autorité ne pouvait s’exercer qu’à l’intérieur de certaines limites déterminées par la loi. Il a enfin exposé la conception chrétienne de l’autorité comme service.