Eglises d'Asie

La tension s’aggrave et des incidents ont marqué l’inauguration du séminaire de Belide

Publié le 18/03/2010




De retour au Portugal le 8 février 1996, après un voyage de quatre jours à Timor Oriental, Mgr Januario Ferreira, évêque auxiliaire de Lisbonne, s’est montré très pessimiste dans ses déclarations sur la situation dans l’ancienne colonie portugaise. Il a ainsi décrit le climat qui y règne: “Nous avons l’impression que tout est normal, la violence n’est pas visible, mais la peur existe. Les pièces sont toutes sur l’échiquier, mais c’est la répression qui les fait bouger” (14). Ses conversations avec la population, a ajouté le prélat, ont eu lieu à voix basse comme en confession. L’évêque a aussi fait état de heurts entre la guérilla armée et les militaires de Jakarta ainsi que de certaines pertes en personnel et en matériel du côté de l’armée indonésienne, alors que les agences indonésiennes ne signalent généralement que les pertes de la guérilla.

Mgr Januario Ferreira s’était rendu à Timor Oriental pour assister à l’inauguration du séminaire “Notre Dame de Fatima” de Belide, cérémonie dont il était l’invité d’honneur avec Mgr Pietro Sambi, pro-nonce apostolique à Jakarta (15). Le jour de la fête, au tout début des cérémonies, quelques dizaines de jeunes partisans de l’indépendance de Timor Oriental se sont manifestés en déployant des banderoles. La police et les militaires sont intervenus avec des bâtons et des matraques. Quelques manifestants ont été blessés tandis que certains autres étaient arrêtés. Selon les déclarations de Mgr Ferreira, huit manifestants ont été appréhendés et ensuite torturés. Un d’entre eux était encore en prison le jour où l’évêque a quitté Jakarta.

Un autre témoin, beaucoup plus engagé puisqu’il s’agit de Ryak Leman, secrétaire de la troisième région de la guérilla, a utilisé pour décrire la situation des termes assez semblables à ceux de l’évêque auxiliaire de Lisbonne. Dans une lettre publiée à Macao (16), le dirigeant du Falintil (Forces armées de libération nationale de Timor Oriental) écrit: “Une situation d’incertitude, de peur et de mort règne ici et les violations des droits de l’homme continuent à être à l’ordre du jour”. Il ajoute que la famine règne en certaines régions du centre et de l’est du pays et que la récolte de maïs de 1995 a été très insuffisante car la population engagée dans des grands travaux par les autorités indonésiennes a été obligée de quitter les champs. La lettre accuse aussi les autorités de vouloir réduire le nombre de la population, déjà décimée par la guerre, par le contrôle des naissances. Sur le plan militaire, la lettre se contente de noter que les forces indonésiennes tentent d’exterminer les soldats de la guérilla.

C’est sans doute cet état de choses qui a provoqué le mouvement de demandes de droit d’asile que l’on enregistre depuis le mois de septembre dernier dans les missions diplomatiques étrangères de Jakarta. Depuis septembre 1995, près de 70 jeunes Timorais ont été accueillis par le Portugal après s’être réfugiés dans huit des ambassades de Jakarta. Depuis le mois de novembre, l’ambassade de France à Jakarta a ainsi, par quatre fois, accueilli des jeunes gens venus demander le droit d’asile, qu’elle a réussi ensuite à acheminer vers le Portugal. Le dernier départ vers le Portugal a eu lieu le 10 février 1996 pour deux jeunes Timorais qui avait pénétré la veille dans l’ambassade (17). Le 8 février 1996, neuf demandeurs d’asile s’étaient pareillement introduits dans l’ambassade d’Australie (18).