Eglises d'Asie

Pour le P. Chân Tin, le Parti communiste et L’Etat ne se sont pas encore repentis

Publié le 18/03/2010




Voilà déjà six ans que le P. Chân Tin, dans une série de sermons prononcés à l’occasion du carême et vite diffusés sous le manteau chez les catholiques vietnamiens, avait appelé le Parti et l’Etat vietnamiens à se repentir sincèrement de leurs fautes comme d’autres Partis et Etats communistes l’avaient déjà fait en Union soviétique et en Europe de l’Est (6). Dans une interview accordée à une radio vietnamienne à l’étranger (VNCR), le 28 janvier 1996, le P. Chân Tin a évoqué cet appel et a ajouté: « Au lieu de se repentir et de se corriger, l’Etat s’est enfoncé encore davantage dans la voie de la violence exercée contre les hommes 7).

Pour preuve de cette volonté de répression encore présente, le P. Chân Tin fait état des trois ans de résidence surveillée qui lui ont été imposés ainsi qu’à son ami Nguyên Ngoc Lan, de mai 1990 à mai 1993, pour avoir affirmé le droit des citoyens et celui de l’Eglise à critiquer les erreurs de l’Etat. Il cite ensuite les principaux opposants arrêtés ces dernières années pour avoir affiché une volonté politique différente de celle du Parti, comme les militants communistes dissidents, Ta Ba Tong, Nguyên Hô, Hoang Minh Chinh, Dô Trung Hiêu, Hông Ha ou Ha Si Phu, les militants de la démocratie comme l’avocat Doan Thanh Liêm ou Dô Ngoc Long, enfin les dirigeants du bouddhisme unifié qui refusent de faire allégeance à l’Eglise bouddhique patronnée par l’Etat.

Le prêtre rédemptoriste reproche ensuite à l’Etat d’intervenir sans vergogne dans les affaires intérieures de l’Eglise catholique, en s’opposant à la nomination d’évêques dans les diocèses qui en sont dépourvus. Ces ingérences ont commencé dès le lendemain du 30 avril 1975 dans le diocèse de Hô Chi Minh-Ville, où l’archevêque coadjuteur, Mgr Nguyên Van Thuân, a été arrêté puis emprisonné pendant treize ans, et récemment encore accusé d’être redevable d’une dette de sang à l’égard du peuple. La même intolérance des autorité s’est exercée plus tard contre Mgr Huynh Van Nghi, l’administrateur apostolique nommé par le Vatican lors de l’aggravation de l’état de santé de Mgr Nguyên Van Binh, en août 1993. Il est aujourd’hui empêché d’exercer ses fonctions, suivi à toute heure de la journée et ne peut se rendre à Saigon pour rencontrer ses fidèles ou tout simplement sa parenté.

Enfin le P. Chân Tin se tourne vers l’Eglise catholique et rappelle que dans sa deuxième homélie sur le repentir, il avait plaidé pour que l’Eglise, la hiérarchie aussi bien que le laïcat, exerce davantage sa fonction prophétique en luttant pour la défense de la dignité humaine. Selon le prêtre, jusqu’à présent, l’épiscopat vietnamien a certes exigé de l’Etat le respect de la liberté religieuse: la dernière lettre écrite au premier ministre par les évêques à l’occasion de leur réunion annuelle à Hanoi, pour lui rappeler une série de violations de cette liberté, en est un témoignage. Mais il n’a jusqu’ici ni évoqué ni soutenu publiquement les droits de l’homme et du citoyen. Peut-être, se demande le père rédemptoriste, les évêques craignent-ils d’être accusés de faire de la politique ou encore d’attirer des représailles de l’Etat sur le peuple chrétien. Peut-être encore ont-ils une grande expérience de l’inutilité de ce type de protestation. Mais le religieux persiste à croire que la dénonciation des violations des droits de l’homme fait partie de la mission de l’Eglise.