Eglises d'Asie

Huitième congrès du Parti communiste: l’Eglise catholique exprime son accord pour la lutte contre certaines dérives sociales

Publié le 18/03/2010




Le 8ème congrès du Parti communiste qui vient de s’achever le 1er juillet 1996 s’est, semble-t-il, peu intéressé aux religions et à l’Eglise catholique en particulier. Le projet de rapport politique ne contenait aucune des déclarations habituelles à ce type de document, pas plus l’affirmation de la liberté de culte que le jugement porté sur la contribution des croyants à l’édification du pays (8). Il semble que cette indifférence au problème religieux ait persisté lors des débats du congrès, où rien n’a été dit sur ce sujet si l’on excepte l’intervention de l’ancien secrétaire général, Nguyên Van Linh, aujourd’hui conseiller du Comité central (9). De son côté, l’Eglise catholique ne s’est que peu exprimée dans la préparation qui a précédé le congrès. Lors du congrès de 1991, la Conférence épiscopale avait envoyé aux dirigeants du Parti sa propre contribution. Cette fois-ci, seules quelques voix se sont fait entendre. Les médias officiels ont diffusé de très courts extraits d’une intervention du secrétaire de la Conférence épiscopale, Mgr Nguyên Son Lâm. Par ailleurs, le supplément mensuel de juin de Công Giao Và Dân Tôc (Catholicisme et Nation), organe du Comité d’union du catholicisme, a publié les contributions critiques de deux religieux de Hô Chi Minh-Ville.

C’est au cours d’une réunion organisée par le Front patriotique à Thanh Hoa que Mgr Nguyên Son Lâm, qui est évêque du lieu, s’est exprimé en donnant son accord aux projets de réforme de la société, contenus dans le rapport politique du huitième congrès. “Comment, a-t-il dit, ne pas se réjouir en lisant des phrases telles que ‘promouvoir le bien et l’harmonie au sein de la population, entre le peuple et son environnement’ ou encore ‘dénoncer le mal et la corruption’L’évêque a fait cependant remarquer qu’“il ne suffisait pas de développer un système de valeurs et de règles sociales en accord avec l’identité et la tradition nationalesIl a souligné que le développement du pays devait s’aligner sur les exigences de notre temps.

Le projet de société exposé par le document préparatoire du huitième congrès a été également abordé dans les contributions critiques présentées par l’organe du Comité d’union du catholicisme à Hô Chi Minh-Ville, “Catholicisme et NationUn premier exposé du P. Nguyên Hông Giao, franciscain, souligne cinq points faibles de la société vietnamienne d’aujourd’hui, auxquels devrait remédier une éventuelle réforme. Le religieux regroupe d’abord sous l’appellation d’“aspects sociaux négatifstrois fléaux sociaux, à savoir la concussion, la fraude et le détournement des biens publics. Selon lui, on n’a que trop parlé sur ce sujet et il est temps d’agir; on n’éliminera aucun de ces maux si l’on ne s’attaque pas aux protections très haut placées, dont bénéficient les auteurs des malversations. En second lieu, l’exposé mentionne la dégradation de l’éducation nationale du pays, due à la baisse de la qualité de l’enseignement et à la course à l’argent qui s’est emparée de tous les esprits depuis une dizaine d’années. L’injustice sociale est aussi un facteur de grand déséquilibre à l’intérieur de la population vietnamienne aujourd’hui. Elle est, pour une part, le fruit de l’introduction de l’économie de marché qui a créé et ne cesse d’accentuer l’écart qui sépare riches et pauvres, villes et campagnes. Le projet de rapport politique a promis de “limiter au maximum le prix à payer pour l’économie de marché”. Si l’on ne le fait pas, souligne l’auteur de l’exposé, on sera rapidement submergé par elle. Une quatrième critique concerne les cadres. Ils sont issus du Parti et détiennent tous les postes de quelque importance dans la société vietnamienne d’aujourd’hui. Il est urgent que soient éliminées l’incompétence et la corruption qui règnent dans leurs rangs.

En dernier lieu, le P. Nguyên Hông Giao souligne le silence observé sur la question religieuse durant la préparation du huitième congrès. Selon lui, malgré les facilités obtenues par les croyants depuis quelques années, la conception religieuse du Parti communiste vietnamienne reste encore négative, dans la mesure où elle veut réduire la foi religieuse au seul exercice du culte et ne tient pas compte des exigences d’action sociale et de service du prochain qu’elle contient en elle. Par ailleurs, le Parti ne s’est toujours pas débarrassé du point de vue marxiste considérant la religion comme un phénomène destiné à dépérir, ce qui l’empêche de comprendre véritablement le dynamisme de la foi religieuse.

Pour sa part, le P. Thiên Cam, dominicain, met en relief deux points névralgiques de la société vietnamienne actuelle. En premier lieu, il dénonce la lenteur et la lourdeur de la communication des informations et propose que soit largement ouvert ce qu’il appelle le “marché des nouvellesLes informations nationales, plus particulièrement celles qui concernent la vie politique, les nominations, les démissions, ne sont connues qu’avec beaucoup de retard et quelquefois restent secrètes, ce qui a été le cas pour l’élimination d’un des membres du Bureau politique (10). Souvent, les Vietnamiens prennent connaissance des événements survenus dans leur propre pays par les médias étrangers qui quelquefois les déforment. La deuxième doléance du religieux dominicain porte sur la sécurité et l’ordre social, troublés non seulement par les divers fléaux sociaux dont souffre le Vietnam, mais aussi par la violation généralisée des divers règlements, concernant la construction des édifices, la possession et l’utilisation des terrains, la circulation, etc.