Eglises d'Asie

Une description critique de l’Eglise du Vietnam

Publié le 18/03/2010




A la fin de leur lettre commune du 1er septembre 1996 (15), les évêques du Vietnam avaient invité les fidèles à leur faire connaître leurs suggestions. Prenant l’invitation au pied de la lettre, l’hebdomadaire “Catholicisme et nation”, organe du Comité d’union du Catholicisme, a, dès le mois suivant, ouvert une rubrique à cet effet. Plusieurs contributions ont déjà été publiées dont certaines ne manquent pas d’esprit critique vis à vis des institutions de l’Eglise du Vietnam. L’une d’entre elles (16) se distingue par le caractère global du jugement qu’elle porte sur le fonctionnement et l’administration de l’Eglise vietnamienne. Elle est intitulée “Réflexions sur la situation actuelle de l’Eglise du Vietnam

La première partie de l’exposé souligne la facilité avec laquelle les évêques et les prêtres du Vietnam exercent leur tâche pastorale. Selon l’auteur de ces réflexions, elle provient, pour une part, de l’autorité intellectuelle acquise par le clergé grâce à un niveau culturel généralement élevé et des qualités humaines et religieuses indéniables. Par ailleurs, l’environnement dans lequel évêques et prêtres mènent leurs activités rend leur tâche d’autant plus aisée. L’auteur relève en premier lieu le respect traditionnel dont sont entourées les personnes ayant fait l’option religieuse. Un proverbe affirme : “Tôn su, trong dao” (Respecte les religieux, vénère la religion !). L’obéissance des ouailles, le respect dans lequel elles tiennent leurs pasteurs, leurs connaissances limitées laissent le champ libre aux initiatives de la hiérarchie et des prêtres. Une soumission du même type est observée par les prêtres à l’égard de leurs évêques. Au Vietnam, on ne rencontre généralement pas les confits et refus d’obéissance qui surviennent en d’autres Eglises.

L’exposé énumère ensuite les nombreux aspects négatifs dont souffre le fonctionnement de l’Eglise vietnamienne. Selon l’auteur, un certain nombre d’entre eux auraient leur origine dans une psychologie et un comportement propres à la société vietnamienne. Un obstacle de première grandeur serait constitué par le caractère sentimental de la vie relationnelle dans ce pays. A l’intérieur de l’Eglise, cela se traduirait par la peur d’être accusé de “vouloir en remontrer à son curéde ressembler à “l’oeuf qui veut se montrer plus malin que le canardPar ailleurs un trop grand individualisme des fidèles irait à l’encontre de l’action et de la vie communes nécessaires dans l’Eglise. Autant de causes qui créeraient une distance trop grande entre hiérarchie et fidèles.

Selon l’auteur, cet écart aurait été renforcé par l’absence actuelle de toute organisation catholique au service des fidèles. Celles-ci existaient nombreuses avant le changement de régime de 1975. Elles ont alors été toutes supprimées. Cette absence serait très dommageable et empêcherait un authentique dialogue entre le clergé et les fidèles. A cause d’elle, toute structure intermédiaire entre clergé et fidèle aurait disparu.

Une des difficultés du bon fonctionnement de l’Eglise vietnamienne serait à chercher dans l’épiscopat, lui-même. La description faite par l’auteur de la hiérarchie vietnamienne se veut respectueuse mais insiste sur le grand âge et sur les nombreuses infirmités dont sont affligés les évêques vietnamiens. Selon lui, la formation qu’ils ont reçu il y a cinquante ans les rend peu aptes à comprendre les problèmes et les exigences du temps présent. Par ailleurs, les organismes destinés à aider les évêques au niveau des diocèses, ou au niveau national, serait insignifiants et totalement inefficaces. Ce serait le cas des diverses commissions de la Conférence épiscopale.

Le dernier obstacle évoqué par la contribution est constitué par “l’attitude et les règlements de l’EtatL’auteur se contente ici de citer l’opinion des autres. “Ils ne sont pas rares les catholiques qui considèrent que toutes les difficultés actuelles de l’Eglise proviennent de l’Etat socialiste… Autrefois, l’Eglise faisait ce qu’elle voulait. Elle n’avait pas besoin des règlements compliqués d’aujourd’hui L’auteur s’abstient de porter un jugement sur ce type de réactions. Mais, il reconnaît que l’idéal d’harmonie préconisé entre l’Eglise et l’Etat, préconisé par la première lettre commune de l’épiscopat vietnamien, est aujourd’hui, bien loin d’être réalisé.