Eglises d'Asie

Une réflexion de l’épiscopat indonésien sur les récentes émeutes

Publié le 18/03/2010




La lettre commune de la Conférence épiscopale indonésienne qui a été publiée le 12 février 1997 est consacrée en partie à une réflexion sur la récente succession d’émeutes qui, depuis octobre 1996, ont secoué certaines villes de Java et du Kalimantan oriental ainsi que la grande banlieue de Jakarta. Elles ont causé la mort d’une dizaine de personnes et la destruction de plusieurs dizaines de lieux de cultes chrétiens ou bouddhistes, de centaines de maisons et de magasins. Dans une conférence de presse, le 1er février 1997, le président de la Conférence épiscopale, le cardinal Julius Darmaatmadja, avait présenté l’analyse des événements faite par les évêques.

Selon l’épiscopat indonésien, les chrétiens ne peuvent entreprendre une réflexion sur les émeutes récentes qu’à la lumière de la foi et des valeurs morales. De ce point de vue, il est difficile de ne pas déceler derrière ces incidents violents une baisse de la moralité qui affecte aujourd’hui tous les aspects de la vie. Les personnes impliquées dans les dernière émeutes n’ont été guidées ni par les règles de la moralité ni par celles de leur propre religion. Le cardinal a ainsi résumé son opinion sur le sujet: “Je vois en ces incidents la faillite de la loi, une absence de respect pour les droits et la dignité de l’homme et finalement le triomphe de l’injustice”.

Malgré le sévère jugement porté sur les personnes qui se sont laissées entraîner par le fanatisme au cours de ces derniers mois, les évêques ont éprouvé la nécessité de mettre en garde les chrétiens contre toute confusion et généralisation abusives. Ce ne sont pas tous les musulmans qui ont soutenu les dernières émeutes. Le cardinal a fait état d’un certain nombre d’interventions de musulmans en faveur des chrétiens lors des émeutes de Situbondo en octobre dernier. Des familles de confession islamique, des dirigeants musulmans ont protégé des chrétiens et les ont soustraits à la violence. Les chrétiens ont aussi été encouragés par les communiqués émanant de diverses instances musulmanes qui ont manifesté leur émotion et exprimé leur solidarité avec leurs compatriotes chrétiens. Par ailleurs, beaucoup d’adeptes de l’islam, des fidèles comme des dirigeants, ont apporté leur contribution à la reconstruction des édifices détruits par les émeutiers.

Depuis le mois d’octobre 1996, plusieurs émeutes ont éclaté en diverses régions d’Indonésie et ont pris pour cible des objectifs non musulmans. A Sitibundo, en octobre 1996, cinq personnes – un pasteur et sa famille – avaient été brûlées vives, plus de 20 édifices catholiques et protestants avaient été incendiés (6). A Tasikmalaya, ville située à l’ouest de Java, quatre personnes étaient mortes durant des émeutes qui, le 27 décembre 1996, avaient détruit 12 églises et une soixantaine d’établissements commerciaux. Elles avaient été déclenchées par les mauvais traitements infligés à des enseignants musulmans par des policiers (7). Plus récemment, le 30 janvier 1997, une nouvelle explosion de violence visant les lieux de culte et les biens de non-musulmans a dévasté la ville de Rengasdengklok, localité proche de Jakarta. Durant les troubles qui ont commencé à l’aube et se sont terminés au milieu de la journée, ont été détruits deux temples bouddhistes, cinq églises, une école, un cinéma, de nombreux magasins, ateliers et habitations. On ne déplore pas de victimes, mais les chrétiens et les bouddhistes ont quitté massivement la ville.