Eglises d'Asie

Des universitaires indonésiens fondent une association pour la liberté religieuse

Publié le 18/03/2010




Quelques intellectuels indonésiens d’horizons religieux différents ont fondé, le 25 janvier 1997, une association destinée à faire campagne pour la défense de la liberté religieuse. L’existence de cette nouvelle association a été rendue publique le 16 avril, à l’issue d’un séminaire sur la liberté religieuse et les idées nationalistes. A cette occasion, deux intellectuels musulmans ont successivement abordé les deux thèmes qui forment, sans doute, l’essentiel du contexte dans lequel s’exerce la liberté religieuse en Indonésie. Le président de l’Association, Sri Soemantri Martosoewignjo, professeur de droit, a parlé des fondements et des limites de l’idéologie du Pancasila qui régit les rapports des cinq grandes religions du pays avec l’Etat et la société. Abdurrachman Wahid, président du “Réveil des intellectuels musulmans”, a parlé du comportement des musulmans à l’égard des chrétiens. L’un et l’autre sont respectivement fondateur et co-fondateur de l’association.

Le premier des orateurs a rappelé que le décret d’application du Pancasila, tel qu’il a été adopté par l’Assemblée consultative du peuple, spécifie clairement que la liberté religieuse est le droit le plus fondamental donné par Dieu. Il est inhérent à notre humanité et ne souffre pas de conditions. Malheureusement, a dit l’orateur, à cause d’une interprétation étriquée, l’exercice de ce droit n’est pas assuré dans sa plénitude. Seuls sont garantis les droits de cinq religions : le bouddhisme, le catholicisme, l’hindouisme, l’islam et le protestantisme. L’interdiction de la religion Baha’i (8), l’intégration du culte kaharingan des Dayaks à l’intérieur de l’hindouisme et l’amalgame fait entre le confucianisme et le bouddhisme non seulement sont des violations des droits de l’homme, mais témoignent encore d’une vision des choses bien mal avisée de la part du gouvernement. Le professeur a aussi critiqué les interdits portés par les autorités contre certaines sectes chrétiennes ou islamiques sous prétexte que leurs activités menaceraient la stabilité du pays. De telles mesures ne servent qu’à nourrir l’hypocrisie religieuse de ceux qui sont obligés de dissimuler leur foi pour des raisons de sécurité.

Dans son intervention, Abdurrachman Wahid a pris pour cible la vision du christianisme et du judaïsme, telle qu’on peut la trouver chez la majorité des musulmans. Ceux-ci ont appris, dès leur enfance, que les chrétiens rejettent l’enseignement de Mahomet au sujet de Dieu. Cette opinion erronée est même partagée par des intellectuels musulmans bardés de diplômes. Cette vision des choses est à l’origine de l’attitude défensive adoptée par les musulmans dans les questions relatives aux chrétiens et aux juifs. Le président du “Réveil des intellectuels musulmans” a affirmé faire campagne contre l’attitude hostile des musulmans en diffusant parmi eux les enseignements du concile Vatican II sur les rapports de l’Eglise catholique et des religions non-chrétiennes, en particulier, le passage affirmant que l’Eglise catholique respecte les efforts accomplis par d’autres religions dans la recherche de l’unique vérité.

L’orateur a aussi souligné le conflit qui existe dans certains domaines entre l’idéologie de la déclaration universelle des droits de l’homme et la vision de l’islam, par exemple, sur la question de la conversion à une autre religion, impossible pour un musulman. Il a affirmé que la tâche actuelle des intellectuels musulmans était d’harmoniser l’universalité des droits de l’homme avec le concept d’un islam unique. Il a conclu : “Dans nos efforts pour maintenir l’harmonie nationale, nous (les intellectuels musulmans) devrions donner une nouvelle interprétation des enseignements religieux et leur attribuer une signification plus profonde”.