Eglises d'Asie

Mindanao : les aborigènes manobo du centre de l’île essaient de se faire une place dans la société avec l’aide de l’Eglise catholique

Publié le 18/03/2010




La partie la plus fertile de son territoire traditionnel lui a été peu à peu enlevée au cours des années par les colonisateurs venant des îles Visayas, mais le peuple manobo, avec l’aide de l’Eglise catholique, retrouve aujourd’hui son identité et commence à défendre ses droits dans la vallée d’Arakan, diocèse de Kidapawan, au centre de l’île de Mindanao.

“L’afflux des colons chrétiens venant des îles Visayas, au cours de ces quarante dernières années, a créé un immense désarroi dans le peuple manobodit le P. Fausto Tentorio, de l’Institut pontifical des missions étrangères de Milan (PIME). Il estime que les Manobos de la vallée d’Arakan ont perdu ainsi 55 000 hectares de leur territoire traditionnel au cours de ces années. Aujourd’hui la vallée compte 665 000 habitants dont 62% sont catholiques.

Le P. Tentorio, qui travaille avec les Manobos depuis dix ans, ajoute : “Depuis le début, nous avons mis l’accent sur l’organisation de la communauté des 20 000 Manobos qui vivent ici, en favorisant la formation des dirigeants, l’alphabétisation, la santé et la formation agricoleDepuis avril 1994, le programme qu’il a mis sur pied est financé par la conférence épiscopale italienne. Aujourd’hui, les revendications territoriales des Manobos sont au premier plan des soucis de la communauté. En 1996, le gouvernement philippin a accepté d’octroyer 12 337 hectares à 1 246 familles manobos de la région. Ce n’est pas encore suffisant, disent les Manobos qui, avec l’aide de l’Eglise catholique, font pression sur le gouvernement central pour qu’il reconnaisse le droit des minorités sur leurs territoires traditionnels.

Selon le P. Tentorio, les Manobos croient que la terre est un don de “Manama” (l’être suprême) à la communauté toute entière qui peut ainsi jouir de ses fruits. Mais quand les colons chrétiens des Visayas sont arrivés, ils ont introduit la notion de propriété privée et ont ainsi accaparé la majeure partie du territoire traditionnel des Manobos. “Aujourd’hui, les Manobos sont placés devant un fait accompli et suivent le même modèle. Comme ils n’avaient pas le choix, ils sont passés d’une économie de cueillette à une économie agricoledit le P. Tentorio. Il note aussi que “les Manobos n’ont pas pu récupérer les meilleures terres au bord de la rivière, mais ils ont tout de même acquis le droit de survivre comme peuple, plutôt que de finir comme mendiants dans les grandes villes philippines

Pour la première fois de leur histoire, les Manobos ont participé comme votants et comme candidats aux élections locales de mai 1997. Jusqu’à présent, les élections étaient pratiquement réservées aux colons. Aujourd’hui, plusieurs milliers de Manobos sont alphabétisés et 577 familles gèrent 73 coopératives agricoles. En 1986, on estimait à environ 375 000, le nombre des Manobos de l’île de Mindanao.