Eglises d'Asie

Un député du Parti démocratique indonésien attribue l’échec de sa formation politique à la lettre pastorale des évêques

Publié le 18/03/2010




Dans une déclaration à l’Agence de presse UCA news, un député catholique, Benedictus Nahut Marbun, vient d’attribuer la défaite de son parti, lors des dernières élections générales du 29 mai, à la lettre pastorale publiée par la Conférence épiscopale trois mois plus tôt (5). S’adressant aux catholiques indonésiens, les évêques avaient déclaré que ceux-ci pouvaient s’abstenir de voter dans le cas où ils estimeraient qu’ils n’étaient pas bien représentés ou que leur souveraineté n’était pas respectée. Cela ne constituerait pas un péché, avaient-ils ajouté.

Le député catholique qui appartient à la tendance du Parti démocratique indonésien (PDI), ouvertement soutenue et mise en place par le gouvernement, estime que les propos tenus par les évêques sont directement responsables du sévère échec essuyé par sa formation politique. Celle-ci n’a obtenu que 3 % du total national des suffrages exprimés le 29 mai. Par suite, la coalition chrétienne-nationaliste ne bénéficie que de dix sièges à la Chambre des représentants alors qu’elle en avait obtenu 56 aux précédentes élections de 1992. Pour appuyer ses dires, Marbun a confié que, lors de sa campagne dans le centre et l’est de Java, il s’était aperçu que catholiques et protestants avaient été influencés par le contenu des instructions envoyées par les évêques et les dirigeants de l’Eglise protestante. Selon lui, les prêtres dans leurs commentaires avaient souligné à outrance la liberté donnée par les évêques de s’abstenir de voter.

Dans sa déclaration, le député a minimisé l’impact sur la population catholique du changement de direction, imposé au Parti démocratique indonésien, l’an dernier, de l’extérieur et par la violence. On sait, en effet, qu’en juin 1996, un congrès illégal du parti, organisé avec l’aide de l’armée avait déposé l’ancienne dirigeante Megawati Sukarnoputri et élu un nouveau président, Soerjadi. Quelques semaines plus tard, les amis du nouveau président, aidés par la police, avaient occupé par la force les locaux du Parti démocratique indonésien à Jakarta, occupation qui avait mis le feu aux poudres et déclenché les violentes émeutes populaires qui ont éclaté le 27 juillet 1996 (6). Dirigeants d’Eglise et journalistes catholiques ont très sévèrement jugé les procédés utilisés par les nouveaux dirigeants pour s’emparer du pouvoir, au mépris de toutes les règles démocratiques. Marbun, quant à lui, soutient que le changement de dirigeants n’aurait eu que peu d’effets sur le vote des catholiques.

Interrogé à son tour, un autre député catholique, Marcel Beding, appartenant à la tendance du parti, fidèle à l’ancienne dirigeante Megawati, voit dans les propos tenus par son collègue une tentative de camouflage. On veut dissimuler une humiliante défaite électorale en désignant un bouc émissaire, en l’occurence, la Conférence épiscopale d’Indonésie. Le vrai responsable de la défaite, est, selon lui, la division du parti. A vrai dire, les élections du 29 mai ont tenu lieu de référendum pour le Parti démocratique : en refusant leurs votes, les électeurs ont rejeté les dirigeants actuels. C’est aussi l’avis d’un certain nombre de membres du Parti démocratique, comme le député protestant, Aberson Sihaolo, lui aussi fidèle à Megawati : selon lui, les électeurs n’ont pas accordé de confiance à des dirigeants mis en place par l’armée et le gouvernement. Il réclame la destitution de ceux-ci et le retour de l’ancienne dirigeante.

Un groupe de jeunes du Parti démocratique indonésien, qui s’est appelé “La jeune génération contre Soerjadi”, a fait siennes ces mêmes revendications et les a proclamées récemment dans une manifestation qui s’est déroulée devant la Chambre des représentants.