Eglises d'Asie

De graves incidents opposent dix mille catholiques aux forces de sécurité dans le diocèse de Xuân Lôc

Publié le 18/03/2010




Durant les journées du 7, 8 et 9 novembre, une dizaine de milliers de catholiques se sont rassemblés pour manifester leur mécontentement dans le district de Thông Nhât appartenant à la province de Dông Nai, à une quarantaine de kilomètres de Hô Chi MinhVille. Le premier groupe de protestataires, composé surtout de femmes semble avoir été aperçu devant le siège des autorités du district dès le vendredi, 7 novembre Dans l’après midi, le mécontentement a paru grandir et des bannières ont été déployées; exigeant la restitution de terre confisquées par les autorités. Le samedi, puis le dimanche, des milliers de catholiques de la région sont venus grossir le premier groupe et, selon les témoins oculaires, le nombre de manifestants a atteint alors le chiffre d’une dizaine de milliers. Selon des nouvelles encore incomplètes, des affrontements sévères ont eu lieu avec la police. Quatre manifestants et un policier auraient été blessés. La maison d’un responsable du Front patriotique aurait été incendiée. Selon les sources officielles vietnamiennes, les autorités civiles ont fait alors appel aux responsables de la communauté catholique. L’évêque du diocèse, Mgr Nguyên Minh Nhât, ancien président de la Conférence épiscopale du Vietnam, est intervenu et a publié un communiqué appelant les chrétiens au calme. Le gros des protestataires s’est alors dispersé.

Après la dispersion, un petit groupe de catholiques, surtout des femmes, a continué sa protestation silencieuse devant le siège du Front patriotique de Thông Nhât, brandissant toujours les mêmes banderolles sur lesquelles sont inscrites les revendications. Ils étaient encore quelques centaines le lundi, et 70, le mardi 11 novembre. Le mercredi, au sixième jour de la protestation, une trentaine de personnes continuaient le “sitting” sur les lieux. Selon une source proche des protestataires, les derniers manifestants espéraient toujours obtenir une réponse des autorités concernant leurs revendications.

Les événements se sont déroulés dans un district de la province du Dông Nai, qui, du point de vue Ecclésiastique, se trouve dans le diocèse de Xuân Lôc. Les manifestants exigeaient la restitution de terres diocésaines confisquées par le gouvernement dans la paroisse de Tra cô (n° 1). Dans le diocèse, deux paroisses ont pour nom Trà Cô et sont numérotées un et deux. C’est une paroisse d’une certaine importance Puisqu’elle comprend 6 243 fidèles. Elle est située sur le territoire de la commune de Binh Minh et dans le district de Thông Nhât, province du Dông Nai, à michemin entre Hô Nai et Gin Kiêm. Les terres convoitées par les autorités se trouvent autour de l’église et étaient destinées à la construction d’un marché couvert, alors qu’il en existait déjà un dans la commune. Périodiquement des affaires de confiscations de terrains par les autorités agitent la population de cette région. Récemment, les autorités avaient annoncé la confiscation de terrains situés le long de l’autoroute de Biên Hoa afin d’élargir celleci.

Le chiffre de 10 000 manifestants rapporté par divers témoins est très vraisemblable dans une région majoritairement chrétienne. Le diocèse est le plus grand du Vietnam et comporte, selon les dernières statistiques, près de 800 000 fidèles. Une grande partie d’entre eux s’étaient enfuis du Nord après l’instauration du régime communiste, à Hanoi, en 1954. Les manifestations ont eu lieu dans le district de Thông Nhât qui, à lui seul, compte quatorze paroisses et près de 30 000 chrétiens.

Ces manifestations se produisent dans un diocèse qui connait depuis quelques mois une grande tension due à un conflit entre la population catholique du diocèse et les autorités civiles de la province du Dông Nai (7). Au mois de mai dernier, le Comité populairé provincial du Dông Nai a envoyé une circulaire aux diverses instances subalternes de la province, qui reprochaient à l’évêque du diocèse, Mgr Nguyên Minh Nhât, d’avoir réorganisé son diocèse en contravention avec les directives officielles. Le Comité populaire prononçait la dissolution de tous les mouvements et associations catholiques. Une limite était mise au nombre de membres des conseils paroissiaux qui devraient se limiter à la liturgie. L’archevêché du diocèse était prié de dissoudre luimême les associations et institutions illégales.

Ces directives ont suscité une très forte émotion dans la population catholique. Cette tension était telle qu’au mois d’août dernier, le Bureau politique n’a pas hésité à envoyer un de ses membres, Pham Thê Duyêt, qui est directeur du Bureau d’action populaire (Agit prop) pour s’entretenir avec les deux évêques du diocèse et le vicaire général. Lors de cette rencontre, le représentant de la plus haute instance du parti s’est efforcé d’apaiser les esprits de la hiérarchie et de la population catholiques. On en avait conclu que les autorités civiles étaient revenues sur leurs positions.

C’est la deuxième fois, dans le Sud, que la population catholique se livre ainsi à des protestations violentes. Au mois de mai 1987, dans la régions de Thu Duc non loin de là, des milliers de fidèles originaires de diverses paroisses, armés de pioches et de pelles, étaient venus protéger une communauté religieuse chez qui la police menait une perquisition. Les troubles avaient alors duré trois joues et s’étaient achevés grâce à l’intervention des autorités religieuses (8).