Eglises d'Asie

LETTRE DES EVEQUES AU GOUVERNEMENT

Publié le 18/03/2010




Conférence épiscopale du VietnamRépublique socialiste du Vietnam

40 Phô Nha ChungIndépendance, liberté, bonheur

Hanoi

Hanoi, le 11 octobre 1998

A monsieur le Chef du gouvernement

de la République socialiste du Vietnam

Monsieur le chef du gouvernement,

L’ensemble des évêques du Vietnam, présents à la réunion annuelle de la Conférence épiscopale du Vietnam, qui a lieu à Hanoi du 6 au 11 octobre 1997, a l’honneur de vous envoyer cette lettre.

En premier lieu, nous vous félicitons pour votre élection par l’Assemblée nationale (10e législature) au poste de chef de gouvernement. Nous souhaitons que, dans l’exercice de la mission qui vous est confiée, vous obteniez beaucoup de réussites.

Nous avons une certaine connaissance de vous grâce à vos déclarations et aux réponses données par vous à diverses interviews. C’est avec confiance que nous vous transmettons les inquiétudes des catholiques devant un certain nombre de difficultés rencontrées par les activités religieuses. A vrai dire, dans de nombreux textes, votre prédécesseur a manifesté son intention de régler ces problèmes ; mais, en de nombreux endroits, en particulier, dans les régions isolées, ils subsistent ou n’ont été réglés qu’en partie.

1 – Nous voulons évoquer d’abord les déplacements que prêtres et évêques doivent accomplir en raison de leurs fonctions. Dans un certain nombre d’endroits, les évêques et surtout les prêtres, lorsqu’ils veulent se déplacer dans le diocèse ou dans leurs paroisses, sont encore obligés de solliciter une autorisation écrite, sur laquelle ils doivent faire apposer de très nombreux sceaux.

2 – La nomination et le changement de poste des prêtres, en fonction des besoins des fidèles, ne peuvent généralement avoir lieu que très lentement et avec beaucoup de difficulté, surtout lorsqu’il faut déplacer un prêtre d’une province à l’autre, à l’intérieur d’un même diocèse. En beaucoup d’endroits, les fidèles attendent encore leur curé, nommé depuis plusieurs années par l’évêque, ce qui trouble la pratique religieuse.

3 – De nombreux jeunes gens, garçons et filles, qui désirent adopter la vie religieuse et se dévouer au service de l’Eglise, en sont, eux aussi, empêchés. Ils sont obligés de mener une vie religieuse “clandestine” et ne peuvent donc pas réaliser librement leur idéal de vie.

4 – En certains lieux, les demandes visant à restaurer les églises et à en bâtir de nouvelles en fonction des “besoins objectifs des fidèles” non seulement ne suscitent aucune sympathie chez les autorités, mais sont de plus pénalisées sous des prétextes mesquins et offensants. Il suffit d’un mètre carré de plus ou de moins dans les projets présentés pour qu’ils soient refusés.

5 – Dans la lettre portant le n° 32 CV/TGCP, datant du 2 février 1996, le chef du gouvernement avait autorisé le Conférence épiscopale à publier une revue trimestrielle à contenu religieux. Mais, jusqu’à présent, elle n’a pu paraître : beaucoup se posent des questions à ce sujet. Nous vous prions de nous aider à écarter les derniers obstacles qui s’opposent à cette publication.

Nous souhaitons aussi avoir beaucoup plus de facilités en ce qui concerne la publication de livres religieux.

6 – Dans la lettre citée plus haut, il n’a pas été répondu à un certain nombre de sollicitations formulées par la Conférence épiscopale. Nous voudrions les exprimer à nouveau et les porter à votre attention.

1 – Les deux séminaires de Hanoi et de Hô Chi Minh-Ville sont au service de nombreux diocèses, plus nombreux que pour les autres séminaires. C’est pourquoi, ils ne suffisent plus à remplir leurs tâches, aussi bien à cause de l’étroitesse de leurs locaux que des limites de leurs corps enseignants. Nous vous prions de nous laisser ouvrir deux nouveaux grands séminaires, à Thai Binh et à Xuân Lôc, afin de régler ce problème. Si cela ne pouvait se réaliser, nous demandons que les deux séminaires puissent ouvrir des annexes en dehors des locaux actuels pour que la formation sacerdotale soit dispensée d’une manière plus efficace.

2 – Dans un même souci d’efficacité en ce qui concerne la formation dispensée dans les grands séminaires, nous demandons, une fois de plus, que le recrutement de nouvelles classes de séminaristes se fasse tous les ans, comme dans les autres institutions universitaires, et non pas tous les deux ans, comme c’est le cas aujourd’hui.

3 – Le gouvernement avait donné son accord à la création d’une année propédeutique aux grands séminaires. Pour le moment, cette formation n’a pas été mise en place et aucun établissement n’a été ouvert à cet effet, faute de permission. Nous sollicitons, pour les évêchés, l’autorisation d’ouvrir ces classes de propédeutique, destinées à alléger la charge des grands séminaires.

4 – Dans les diocèses du Nord-Vietnam, un certain nombre de jeunes gens dont la formation religieuses est ancienne pourraient être ordonnés prêtres et ainsi répondre aux besoins de nombreuses paroisses, qui, depuis plusieurs dizaines d’années, sont sans prêtres. Qu’il soit permis aux évêchés d’organiser un cours de recyclage de deux ans à leur intention et ainsi régler ce qui est un reliquat du passé.

5 – Les personnes privées et de nombreuses associations peuvent aujourd’hui ouvrir des écoles privées pour collaborer avec l’Etat et contribuer à l’oeuvre éducative, présentement la plus grande préoccupation du gouvernement. Notre Eglise désire, elle aussi, y participer et ouvrir des écoles (surtout pour les premières classes, dans les campagnes et les régions isolées où les familles pauvres sont nombreuses).

6 – En plus de ce domaine éducatif, beaucoup de congrégations dans l’Eglise souhaitent que soient créées des conditions favorables pour apporter leur collaboration à l’Etat dans les secteurs hospitaliers et sociaux, au service des malades, des pauvres et des orphelins. Aujourd’hui, notre participation en ce domaine est sujette à de nombreuses limites.

7 – Enfin, pour ce qui concerne les établissements, les terrains d’Eglise qui, autrefois, ont été réquisitionnés par l’Etat, nous ne souhaitons qu’une chose : à savoir que l’Eglise, bénéficie partout de conditions raisonnables lui permettant de mener ses activités. A cet effet, nous demandons que nous soient rendus les établissements qui nous sont nécessaires, surtout lorsque ceux-ci ne sont plus utilisés aux fins inscrites dans les accords passés entre les deux parties à cette époque. Nous demandons spécialement que le gouvernement envisage le retour à l’Eglise des locaux du Séminaire universitaire de Dalat, pour les raisons que nous venons d’énoncer, mais aussi parce que cet établissement appartient au Saint-Siège. L’Eglise en a besoin pour le mettre au service de toute l’Eglise du Vietnam. Nous vous remercions sincèrement. Nous vous souhaitons une bonne santé qui vous permette de servir le pays efficacement.

Pour la Conférence épiscopale

Cardinal Paul Pham Dinh Tung

Président de la Conférence épiscopale

Mgr Barthélémy Nguyên Son Lâm

Secrétaire général de la Conférence épiscopale