Eglises d'Asie – Philippines
Le récent document romain sur la réforme agraire a été bien accueilli par les divers milieux concernés
Publié le 18/03/2010
Dans l’esprit du “Jubilé” biblique, le document romain incite les chrétiens à restaurer la justice sociale par une nouvelle répartition des terres. Leur concentration dans les mains d’une minorité s’est accentuée dans des proportions alarmantes, dit ce texte. Elle constitue un scandale et s’oppose à la volonté de Dieu et à son dessein de salut dans la mesure où elle prive une large part de l’humanité du bénéfice des fruits de la terre. Le document ajoute encore qu’avec l’expansion de l’industrialisation dans leurs pays, les peuples autochtones ont été dépouillés de leurs terres et de leurs cultures.
Explicitant les directives romaines, Mgr Ledesma a fait remarquer que la situation en Asie était particulièrement préoccupante, les deux tiers des habitants de ce continent étant des paysans pauvres. Il a cité le cas de la minorité ethnique des Higahon, vivant sur les rives de l’Agusan dans le Mindanao. En octobre dernier, leurs représentants ont fait 840 km pour atteindre Manille et y mener une grève de la faim devant les bâtiments du Département de la réforme agraire. Une décision leur accordant la propriété de 144 hectares de terre avait été annulée et la terre était retournée entre les mains des anciens propriétaires qui voulaient y créer un parc “agro-alimentaire”. D’après l’évêque de Ipil, ce cas montre que la réforme agraire n’est jamais achevée non seulement en Asie mais aussi sur tout le reste du continent asiatique.
Les échos recueillis dans les milieux directement concernés témoignent également d’un large accord avec les orientations du document pontifical. Les dirigeants du mouvement paysan philippin ont particulièrement apprécié le critère de la “dimension familiale”, proposé comme critère principal de la redistribution des terres. Le dirigeant paysan Jeremias Montemayor, fondateur de la “Fédération des paysans libres”, affirme que la “ferme à dimension familiale” est une des aspirations fondamentales de la paysannerie de son pays. Elle est susceptible de consolider la solidarité à l’intérieur de la famille, car tous ses membres y travaillent ensemble. Par ailleurs, on peut pallier les critiques de “non-rentabilité” faites à ce type de propriété en incitant les paysans à se regrouper en coopératives comme en Israël et dans d’autres pays.
Selon le militant paysan, la réforme agraire ne s’achève pas avec la redistribution des terres, il faut aussi soutenir financièrement et techniquement les petits paysans pour éviter que ceux-ci ne soient obligés de revendre les terres nouvellement acquises en remboursement de leurs dettes.