Eglises d'Asie

Ayodhya : sur les lieux de la mosquée rasée, le gouvernement propose de bâtir un temple national

Publié le 18/03/2010




Lors de la récente campagne électorale, l’une des promesses du BJP (Parti du peuple indien) la plus controversée par ses adversaires prévoyait de construire un temple dédié à Rama, à l’endroit même où en 1992, des fanatiques hindous avaient détruit une très ancienne mosquée sous le prétexte qu’elle était bâtie sur le lieu de naissance du dieu. A son arrivée au pouvoir au mois de mars dernier, le parti hindouiste avait gardé un temps le silence, et certains avaient pensé que le projet avait été abandonné dans un esprit de conciliation. Cependant, le 11 avril, Lal Kishenchand Advani, président sortant du BJP et ministre de l’Intérieur, a déclaré publiquement que le gouvernement avait l’intention de construire un “temple national” (rashtra mandir) sur les ruines de la mosquée. “Ce temple national, a commenté le ministre, sera un lieu où tous les enfants de l’Inde pourront vivre en paix, dans la prospérité et la sécurité, sans tenir compte des castes et des appartenances religieuses ou régionales”.

Loin d’apaiser les esprits, la proposition du nouveau gouvernement a ravivé les inquiétudes et suscité des soupçons sur les arrière-pensées des initiateurs de ce projet. Le président de la Conférence épiscopale de l’Inde, Mgr Alan de Lastic, a déclaré qu’il trouvait l’idée bonne, mais qu’en réalité, l’Eglise catholique ne savait pas de quelle espèce de temple national il s’agissait. Il a ajouté que cette proposition était sans doute un des éléments d’un projet encore inconnu. Il était nécessaire que le BJP donne des éclaircissements sur celui-ci. Il se pourrait bien, a-t-il encore fait remarquer, que ce soit un piège destiné à abuser les minorités religieuses.

Mgr Karan Masih, de l’Eglise de l’Inde du Nord, a donné son accord à la proposition. Mais il n’a pas caché que son Eglise était impatiente de savoir si le temple nationalserait un temple hindou ou bien un complexe comprenant temples, chapelles et mosquéesIl a aussi ajouté que l’Eglise de l’Inde, elle aussi, voulait vivre en harmonie, en paix et dans l’amitié avec tous. Elle se réjouissait de voir que le gouvernement partageait cet idéal.

Du côté musulman, les soupçons n’en sont pas moins grands. Le président de la ligue musulmane de l’Union indienne, Ebrahim Sulaiman, a brutalement affirmé que la volonté déclarée des musulmans était la reconstruction d’une mosquée sur les lieux de celle qui a été rasée en 1992. Ils ne permettraient pas qu’un temple soit élevé sur le site controversé.

Cependant, il existe des points de vue moins radicaux sur le nouveau projet du BJP. Selon le commentateur politique, Shridar Shankar, l’ambition du parti hindou est plus politique qu’idéologique. L’idée d’un “temple national” devrait être comprise comme une tentative du BJP pour récupérer en son sein les représentants de toutes sortes de milieux, religions, communautés et régions. Selon lui, pour sa survie, le BJP, serait davantage préoccupé d’arithmétique politique que d’idéologie. 18 partis régionaux font, en effet, partie de l’alliance sur laquelle s’appuie le gouvernement.