Eglises d'Asie

Devant le Congrès américain, deux représentants des Eglises chrétiennes d’Indonésie ont témoigné des persécutions anti-chrétiennes sans soutenir l’embargo

Publié le 18/03/2010




Lors d’une réunion qui s’est tenue à Jakarta le 5 mai 1998, deux dirigeants protestants de retour des Etatsunis où, en compagnie d’un dirigeant musulman, ils étaient allés témoigner des persécutions anti-chrétiennes en Indonésie devant une commission du Congrès américain, ont critiqué la presse locale pour la partialité des comptes rendus publiés par elle à ce sujet. Les deux responsables protestants, le révérend Joseph Pattiasina, secrétaire général de la « Communion des Eglises en Indonésie », et l’évêque Ephorus Soritua Nababan, de l’Eglise protestante Batak, ont reproché aux journaux indonésiens de n’avoir tenu compte que des témoignages donnés à la commission du Congrès américain par le responsable musulman.

Les deux responsables chrétiens ainsi que le dirigeant musulman bien connu, Amien Rais, responsable de la Muhamadiyah, ligue forte de 28 millions d’adhérents, avaient été invités par une commission du Congrès dans le but de préparer un débat sur la projet de loi « Wolf Specter » visant à imposer un embargo économique à tout pays dans lequel des minorités religieuses souffrent de persécution. La presse indonésienne avait présenté les deux protestants comme de simples accompagnateurs de Amien Rais.

Lors de leur conférence de presse, les deux dirigeants protestants ont souligné que leurs témoignages devant le congrès ont été très différents de celui du dirigeant musulman qui a attribué les attaques contre les églises à un sentiment qu’il a appelé « jalousie socialeAu contraire, les deux responsables d’Eglises chrétiennes ont fait valoir qu’il était largement prouvé que les attaques avaient été organisées par des fondamentalistes musulmans et, en quelques cas, préparées avec l’aide d’officiers de l’armée. Par ailleurs, la liste présentée au Congrès américain par Amien Rais ne faisait état que de 39 églises attaquées, alors que, depuis l’établissement de l’Ordre nouveau du président Suharto, en 1967, c’est en réalité au moins 400 églises chrétiennes qui ont été incendiées ou détruites par les fondamentalistes musulmans.

Toutefois, lors de la réunion du 5 mai, le représentant de la Communion des Eglises indonésiennes a apporté un éclaircissement capital sur le témoignage des deux dirigeants protestants devant le congrès. Ceux-ci s’étaient mis d’accord avec le dirigeant musulman sur un objectif commun, à savoir empêcher l’embargo des Etats-Unis sur l’économie indonésienne: « Bien que les minorités chrétiennes soient persécutées ici, a-t-il dit, nous avons appelé le Congrès à un compromis pour éviter un embargo qui, non seulement ferait empirer la situation économique mais encore compromettrait les bonnes relations entre les chrétiens et les musulmans« . Le responsable de l’Eglise protestante Batak a ajouté qu’il avait demandé aux membres de la commission américaine de ne recourir à l’embargo que dans le cas où toutes les autres solutions auraient échoué.

Par ailleurs, le même responsable a déclaré avoir regretté que les catholiques n’aient pas été invités à venir témoigner devant le Congrès des Etats-unis à cause de l’influence particulièrement importante du catholicisme en ce pays. Il a d’ailleurs révélé avoir pris contact, avant de partir aux Etats-Unis, avec l’Eglise catholique en Indonésie pour que ses dirigeants essayent d’influencer les catholiques américains dans le sens d’un refus de l’embargo.

Malgré la position des deux leaders protestants concernant l’embargo américain sur l’économie indonésienne, la majorité des quelques trois cents laïcs venus les écouter semblaient ne pas redouter l’éventualité d’un tel embargo et paraissaient même le souhaiter.